Vous êtes-vous déjà demandé si La Planète des singes était une histoire réaliste ? Eh bien nous n’en sommes pas passés loin suite aux travaux d’un biologiste russe, Ilia Ivanov. En effet, celui-ci tenta de croiser un singe et un humain pour créer une véritable chimère. Une tentative que les scientifiques n’avaient alors jamais effectuée…
Ilia Ivanov, un savant fou surnommé le « Frankenstein rouge »
Ivanov est né en Russie en 1870. Il étudia à l’université de Kharkov dont il sortit diplômé en 1896. Il se passionna rapidement pour la médecine vétérinaire expérimentale et travailla donc comme chercheur dans plusieurs centres et instituts spécialisés, comme la réserve naturelle d’Ascania-Nova, aujourd’hui dans le sud de l’Ukraine.
Au début du XXème siècle, il révolutionna les techniques et la pratique d’insémination artificielle pour les chevaux. La Russie était ainsi en avance sur les Etats-Unis et le reste de l’Europe concernant le sujet de l’insémination artificielle. Elle commença à la pratiquer une vingtaine d’années plus tôt que le reste de l’Occident.
Ses nouvelles méthodes permirent à un étalon de fertiliser jusqu’à 500 femelles au lieu de 20 ou 30 lors de la reproduction naturelle. Cela permit d’élever près de 7 000 chevaux. Ces résultats étaient incroyables pour l’époque et il fut alors réclamé aux quatre coins du monde.
Le biologiste devint donc spécialisé dans l’insémination artificielle et créa, par le biais de cette dernière, toute une variété d’animaux hybrides. Il fut par exemple à l’origine du zébrâne, hybride entre un zèbre et une ânesse, et le zubron, mélange entre une vache et un bison. Il réussit même à croiser une vache et une antilope, c’est dire l’exploit !
Le projet d’hybridation humain-singe
Dès 1910, Ilia Ivanov rêva de créer un hybride mi-humain mi-animal. Il jeta son dévolu sur nos plus proches cousins, les singes. En effet, leur proximité génétique avec notre espèce, les Homo Sapiens, rendait l’expérience imaginable pour une potentielle réussite. Ce fut cette année-là qu’il réalisa une présentation au Congrès Mondial de Zoologie en Autriche dans laquelle il décrivit son projet. En effet, on connaît aujourd’hui Ivanov pour son expérience controversée dont l’objectif était la création d’un « Humanzee ».
Toutefois, il fallut attendre 1926 pour que le gouvernement russe valide le projet du biologiste. Il fut aidé par Nikolaï Gorbounov, un haut fonctionnaire soviétique. Grâce à ce dernier, il reçut 10 000 dollars pour ses expériences. Le gouvernement soviétique était alors porté par un sentiment anti-religieux et espérait donc que cette expérience prouverait la théorie de Darwin. (Fait amusant : on sait aujourd’hui que l’hybridation n’est pas une bonne méthode pour démontrer la théorie de l’évolution…) L’Institut Pasteur soutint également le projet du scientifique russe.
Ainsi, en février 1926, Ilia Ivanov partit pour le Guinée, en Afrique française, et y mena une expédition pour capturer les femelles chimpanzés dont il avait besoin. Il insémina trois femelles chimpanzés avec du sperme humain. Espérant que la fécondation serait une réussite, il embarqua ces dernières avec lui et rentra en URSS. Toutefois ces tentatives furent infructueuses, car les animaux moururent sur le trajet du retour. Par ailleurs, l’autopsie révéla que les singes n’étaient pas enceintes.
Suite des expériences et fin du projet
Le scientifique ne s’arrêta pas malgré ce ratage. Après cet échec, il en conclut que pour réussir il fallait réaliser l’opération inverse et donc féconder des femmes humaines avec de la semence de singe mâle. En 1929, il se mit donc à la recherche de femmes prêtes à se faire inséminer. Et aussi surprenant que cela puisse paraître, cinq femmes se portèrent volontaires pour porter des bébés à moitié singe, dans l’intérêt de la science.
Toutefois, au moment où Ivanov fut prêt à réaliser son expérience, l’orang-outan nommé Tarzan, le seul singe adulte qui lui restait en Russie mourut d’une hémorragie cérébrale. Le biologiste se mit alors en quête d’un remplaçant et alors que de nouveaux singes allaient arriver en 1930, on arrêta Ivanov avant qu’il ne puisse réaliser ses prochaines expériences.
En effet, en 1930 Staline organisa une purge généralisée des scientifiques soviétiques. Le gouvernement russe l’exila au Kazakhstan où il mourut deux ans plus tard en 1932. Le projet de Humanzee s’éteignit avec lui. Malgré certaines rumeurs, l’existence d’un véritable homme-singe n’a jamais été prouvée.
Finalement, Ilia Ivanov n’arriva jamais à ses fins et l’hybride humain-singe ne vit jamais le jour. Mais on peut trouver surprenant que personne n’ait eu aucun dilemme moral quant à la réalisation de ces expériences d’insémination artificielle. Après le Humanzee, découvrez le crâne de Piltdown, mi-homme mi-singe.
Sources :
- Wikipédia – Ilia Ivanov
- Russia Beyond – Singes-hommes de Russie : comment des médecins ont essayer de croiser notre espèce
- Le Temps – L’homme, le singe et leurs enfants jamais nés
- Wikipédia – Humanzee
- New Scientist – Blasts from the past : The Soviet ape-man scandal
- Interesting Engineering – Ilya Ivanov : The Russian Scientist who tried to create a « Humanzee »