Le 17 septembre 1859, Joshua Norton, un anglais qui a émigré à San Francisco, s’autoproclame « Norton I, Empereur des États-Unis ». Chez Cultea, on vous propose de revenir sur cet excentrique personnage !
Jeunesse de Joshua Norton
Joshua Norton naît entre 1814 et 1818 en Angleterre. Ses parents, John Norton et Sarah Norden, fille d’un commerçant juif prospère, émigrent vers l’Afrique du Sud quand il est encore très jeune, dans le cadre d’un programme de colonisation du gouvernement. En 1849, et donc au moment de la ruée vers l’or, Norton part pour San Francisco. Grâce aux 40 000 dollars laissés par son père après sa mort, il entre rapidement sur le marché immobilier de la ville. Il devient alors un citoyen riche et respecté.
Malheureusement, il perd tout en 1852. En effet, à cette époque, Norton investit dans le riz, puisque les exportations de Chine ont cessé en raison d’une famine. Il achète donc des tonnes de la céréale au Pérou. Cependant, il n’est pas le seul à avoir l’idée, et par conséquent les prix du riz s’effondrent. Norton ne veut pas accepter ses pertes et se lance dans un procès interminable qui le mènera à la banqueroute en 1858.
Son autoproclamation
Ruiné, il disparait pendant environ un an. À son retour, il est encore plus contrarié par le système politique de l’État fédéral des États-Unis. De fait, il distribue des lettres aux journaux de San Francisco dans lesquelles il s’autoproclame Empereur des États-Unis, et ce sous le nom de Norton Ier. Un des journaux publie même le communiqué suivant le 17 septembre 1859 :
« À la demande et au désir péremptoires d’une grande majorité des citoyens de ces États-Unis, moi, Joshua Norton, anciennement d’Algoa Bay, Cap de Bonne-Espérance, et maintenant depuis 9 ans et 10 mois passés de S.F., Californie, me déclare et me proclame empereur de ces États-Unis ; et en vertu de l’autorité qui m’est ainsi conférée, ordonne par la présente et ordonne aux représentants des différents États de l’Union de se réunir au Musical Hall, de cette ville, le 1er jour de février prochain. Ensuite, puis et là, d’apporter des modifications aux lois existantes de l’Union qui pourraient atténuer les maux sous lesquels le pays travaille, et ainsi faire exister la confiance, tant au pays qu’à l’étranger, dans notre stabilité et notre intégrité. »
Plus tard, il ajoutera « protecteur du Mexique » à son titre. Il régnera (le mot est relatif) pendant 21 ans sur les États-Unis et publiera même de nombreux décrets dans la presse.
Ses actions en tant qu’empereur
Norton Ier fait donc publier des décrets impériaux par voie de presse. Il demande par exemple la dissolution du Congrès américain ainsi que l’abolition des deux principaux partis politiques en 1859. L’année suivante, il va même plus loin en déclarant la dissolution des États-Unis d’Amérique ! Ses décrets sont tous ignorés par le gouvernement. Heureusement pour lui, le ton d’humour qu’il emploie lui évite toute menace d’inculpation.
Lors de la guerre civile entre le Nord et le Sud, Norton Ier propose ses services en tant que médiateur des deux présidents rivaux, Abraham Lincoln et Jefferson Davis. En 1870, il essaie également d’intervenir dans la guerre opposant la France à la Prusse. Tous ses efforts seront vains.
Quelques unes de ses propositions sont toutefois assez visionnaires. En outre, il imagine une institution internationale qui réglerait pacifiquement les conflits, et ce des années avant la création de la Société des Nations (SDN). De plus, il propose de construire un pont suspendu au dessus de la baie de San Francisco. Ça vous dit quelque chose, non ?
Un homme apprécié des habitants de San Francisco
Norton Ier passe son temps à se balader dans les rues de la ville ou à inspecter l’état des trottoirs, des routes ou même de certaines propriétés publiques. Il porte constamment un uniforme bleu avec des épaulettes en or que des officiers de l’armée américaine basés au Presidio de San Francisco lui ont donné. De plus, il arbore un chapeau coiffé d’une plume de paon. Un personnage en somme assez excentrique.
Dans l’ensemble, l’empereur autoproclamé est très apprécié des citoyens de la ville. On le laisse en effet manger gratuitement dans les meilleurs restaurants de San Francisco. Ensuite, on lui réserve des places pour des concerts et des pièces de théâtre. Il émet même sa propre monnaie, et on le laisse payer avec celle-ci dans les établissements qu’il fréquente.
Un jour, en 1867, un policier arrête Norton. Il souhaite en outre le soumettre à un traitement pour trouble mental. Les habitants s’indignent, et par la même occasion, les journaux locaux. Par conséquent, le chef de la police de San Francisco, Patrick Crowley, ordonne sa libération. Il s’excusera même officiellement auprès de l’empereur, qui graciera le policier qui l’a arrêté.
Décès et funérailles de Joshua Norton
Norton Ier est victime d’un accident vasculaire cérébral le 8 janvier 1880, en pleine rue de San Francisco. Malgré la réactivité de la police qui envoie une voiture pour le conduire à l’hôpital, il meurt avant que le véhicule n’arrive. En fouillant son domicile, on apprend que l’empereur était en fait très pauvre. Par conséquent, le Pacific Club, une association d’hommes d’affaires de San Francisco, paie le cercueil du défunt. Les obsèques ont lieu 2 jours plus tard et rassemblent 30 000 personnes, selon la presse locale. Le cortège funèbre s’étire ainsi sur 5 km, et on enterre finalement Norton dans le cimetière maçonnique. En 1934, on transfère son cercueil au cimetière Woodlawn à Colma, en Californie. Cette fois, c’est plus de 60 000 personnes qui assistent au nouvel enterrement.
Le règne de Joshua Norton en tant qu’empereur des États-Unis n’a eu aucune conséquence sur le pays lui-même. Malgré tout, un de ses projets fut réalisé 50 ans après sa mort : le pont jeté entre les villes d’Oakland et de San Francisco. Aujourd’hui, sa tombe est constamment fleurie.
Sources :
6 Replies to “Quand Joshua Norton s’autoproclama Empereur des États-Unis”