La 2D est un des vestiges de l’animation chez Disney, qui dans les années 2000, témoigne de la difficulté du studio à renouer avec le succès. En 2004, sortait le très oublié La Ferme se rebelle, ode au folklore américain sacrifiée au profil d’une toute nouvelle révolution 3D portée par Chicken Little.
Disney et le folklore américain : une grande histoire d’amour
L’histoire de La Ferme se rebelle commence bien avant 2004, année de sa sortie. Le monde de Disney a toujours eu un certain attrait pour l’histoire du folklore américain et de la Conquête de l’Ouest. Les lands Frontierland dans les parcs Disney en sont probablement le plus fervent exemple !
Les premiers traits de La Ferme se rebelle se dessinent ainsi en 1995, peu avant le début de la production de Pocahontas, une Légende Indienne. À cette époque, le réalisateur Mike Gabriel souhaite en effet d’adapter des légendes du western comme Annie Oakley, Buffalo Bill ou Pecos Bill en films d’animation. Une idée considérée comme intéressante par Disney, mais mise de côté au profit du majestueux Pocahontas. Gabriel se plie alors aux exigences du studio, il réalise l’acclamé film sur la princesse native américaine pour se tourner par la suite sur cet autre projet qu’il voit comme une « idée qui pourrait combiner Captains Courageous avec un western » !
Un scénario de 40 pages est alors proposé avec pour titre Sweating Bullets. Script d’origine : Un jeune garçon dont le père possède une compagnie de chemins de fer est envoyé dans le fin fond de l’Ouest américain afin d’apprendre à être un homme. Un voyage qui ne se passera pas tout à fait comme prévu.
Un récit seulement temporaire, car celui-ci passera ensuite par une flopée de réalisateurs qui remanieront tous l’histoire à leur guise ! L’histoire du voyage se transforme une première fois en un western fantastique où le jeune homme, visite une ville fantôme dominée par un mystérieux mort-vivant dénommé Slim. Une narration qui fait encore volte face par la suite en devenant l’histoire d’un taureau appelé Bullets qui rêve de devenir un puissant étalon… Une multitude de redressements qui pousse l’artiste Michael LaBash à suggérer que Sweating Bullets soit l’histoire de trois vaches qui deviennent danseuses de saloon afin de sauver leur ferme. On se rapproche enfin de La Ferme se rebelle.
La Ferme se rebelle devient peu à peu un projet fantôme. En 2000, Mike Gabriel finit par être consigné au profit de Will Finn et John Sandford par Thomas Schumacher, le nouveau responsable de la Walt Disney Feature Animation. Sous leur direction Sweating Bullets devient enfin, Home on the Range en français : La Ferme de rebelle.
La Ferme se rebelle : un film 2D tué dans l’œuf
Après plus de dix ans de production La Ferme se rebelle a enfin trouvé son scénario définitif ! Le film racontera l’histoire de Maggie, une vache de concours qui après la destruction de son ranch est envoyée dans la ferme de la fougueuse Pearl : Le Petit Coin de Paradis. Là-bas, elle y rencontre deux autres vaches : Grace et Mme Calloway. Seulement la vie au Petit Coin de Paradis n’est pas parfaite. Pearl a des créanciers sur le dos. Si elle ne paye pas sa dette dans les jours qui suivent, celle-ci verra alors sa ferme liquidée. Une idée insupportable pour les trois vaches. Casse la tienne, elles iront elles-mêmes chercher l’argent en empochant la prime promise pour la capture d’Alameda Slim, le plus grand voleur de bétail du Far West !
Un énième bricolage de l’intrigue qui finira par avoir raison du résultat final. À sa sortie, La Ferme se rebelle est totalement laissée pour compte par Disney. Le film, malgré sa partition écrite par le grand Alan Menken, ne convînt pas le studio qui devant sa 2D vieillissante lui préfère Chicken Little, le premier film Disney à être en imagerie numérique.
La Ferme se rebelle ne profite donc que d’une couverture médiatique et marketing minime. Comme pour Taram et le Chaudron Magique à l’époque, le projet est perdu d’avance. Frères des Ours sorti presque en même temps lui est également préféré afin de promouvoir simultanément la ressortie en vidéo du Roi Lion. On repousse alors la date de sortie du film au 2 avril 2004, un temps peu propice à la sortie d’un classique d’animation Disney. À sa sortie le film est un échec, soldé par une perte de presque 100 millions de dollars pour le studio.
La Ferme se rebelle marque alors la fin d’une ère, celle de l’animation en 2D. L’enterrement définitif d’une époque où l’animation Disney des années 80 jusqu’au début des années 2000 rimait avec opulence et expérimentation.
La Ferme se rebelle : une sympathique petite comédie, pas du tout à la hauteur des attentes…
Qu’avons-nous pensé de La Ferme se rebelle après un visionnage en 2024 ? Un petit film au charme indéniable, mais qui reste trop infime derrière l’héritage des années 90.
La Ferme se rebelle, est l’exemple même de ce film rigolo que l’on va se mettre un soir à la télé pour grignoter devant sans y accorder trop d’importance. Un film réussi dans l’ensemble avec des personnages tous bien caractérisés et amusants. Les décors sont soignés et la partition toujours de qualité ! Un ensemble satisfaisant, mais loin d’être marquant. La faute à un récit saboté par ses difficultés de productions et un manque de dynamisme que ce soit dans la narration ou l’animation. Un résultat final qui manque d’une petite quinzaine de minutes essentielle au développement de l’univers et des antagonistes.
Le film en revanche, qui reste malgré tout empreint d’une profonde forme de modernité, notamment avec sa palette de personnages féminins forts et meneurs de l’action. La Ferme se rebelle, c’est l’histoire avant tout de figures féminines. Allant de Pearl, la courageuse fermière qui tient avec le sourire son Petit Coin de Paradis, aux trois intrépides vaches qui n’ont besoin de personne pour atteindre leur but. Une joyeuse sororité qui fait chaud au cœur dans un studio où les rôles féminins ont trop souvent été réservés à ceux de princesses. Encore une fois, il est dommage de voir ces figues reléguées aux oubliettes, comme le furent avant elles la princesse Kida de l’Atlantide le Capitaine Amelia de La Planète au Trésor.
Un film drôle et plaisant à regarder, mais tronqué dans son récit. Le film ne donne malheureusement pas assez à manger au spectateur et c’est dommage. Une œuvre qui néanmoins a eu l’audace de dessiner un récit de la Conquête de L’Ouest au féminin et ça, c’est cool !
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