Il s’appelle Volt et non Truman. Volt star malgré lui, l’histoire d’un Disney oublié qui, sous la houlette de John Lasseter, deviendra le dernier rempart d’un échec qui tirera sa révérence au profit de La Princesse et la Grenouille et du mastodonte Raiponce.
Quand Volt star malgré lui s’appelait encore American Dog…
Il y eut en premier Chicken Little, le film qui permit à Disney de pérenniser à jamais sa collaboration avec Pixar. Puis Bienvenue Chez les Robinson, un majestueux hommage à la philosophie de Walt Disney, mais sabordé par des conflits internes et une réception publique mitigée. Deux premiers films Disney réalisés entièrement en 3D qui laissèrent alors place à un troisième : Volt star malgré lui. Une réécriture canine de The Truman Show et pour la première fois majoritairement supervisée par John Lasseter, devenu courant 2006 directeur des studios d’animation de la maison de Mickey !
Tout commence sous la plume de Chris Sanders, le coréalisateur d’un des seuls grands succès disneyens des années 2000 : Lilo & Stitch. Il imagine ainsi, à l’aube de ce second millénaire, l’histoire du vaillant Henry, un brave petit chien superstar d’Hollywood et acolyte d’un remodelage animé de James Bond. Le véritable récit du parcours initiatique de ce joyeux compagnon qui un jour, perdu dans le Nevada, demande à Ogo un chat borgne et à un lapin géant de l’aider à retourner chez lui. Le nom : American Dog !
Un projet qui, comme pour Bienvenue Chez les Robinson, peinera à subsister tel quel sous les ordres d’un John Lasseter et de sa mission ultime : redonner à Disney les lettres de noblesse qu’il a égarées à la fin des années 90.
La fin des années 2000, la mort de Disney programmée !
Nous l’avons constamment évoqué au cours de cette série. Les Disney qui sortirent durant les années 2000 furent pour la plupart des échecs ou des œuvres simplement oubliées. La faute à un studio en perte de vitesse, mais aussi à l’ambition toujours grande qui se heurtait alors au modernisme de concurrents tels que Blue Sky ou DreamWorks. Une tendance qui finira par se briser en 2006 via la nomination de John Lasseter, une des figures fondatrices de Pixar, à la place du tout nouveau directeur artistique des studios de la firme.
Celui qui était déjà fortement intervenu sur la production de Bienvenue Chez les Robinson s’empare alors de ce film qui se nomme toujours American Dog. Il laisse le premier couler, car trop avancé dans la production, pour passer au rouleau compresseur le second. American Dog se transforme alors en Bolt (Volt star malgré lui en français), et cela contre l’avis de Chris Sanders qui se voit ainsi gentiment congédié.
John Lasseter en profite ensuite, une fois Chris Sanders relaxé, pour engager deux nouveaux réalisateurs pour Bolt : Chris Williams et Byron Howard. Deux novices de la réalisation, mais dont le travail s’est illustré sur des films comme Mulan ou Kuzco, L’empereur mégalo. Les deux compères, plus obéissants, suivent alors à la lettre les conseils de leur directeur. Henry est définitivement écarté ou profit de Volt. Ogo se transforme en Mitaine, une chatte sauvage et maigrichonne, tandis que le lapin géant disparait pour laisser place à un énorme hamster. On ajoute également le personnage de la maitresse de Volt, Penny, pour enfin modifier le périple au Nevada au profit d’un voyage partant depuis New York.
Volt star malgré lui racontera ainsi l’histoire de Volt. Une superstar d’Hollywood qui doit tous les jours tout faire pour sauver sa jeune maitresse Penny. Seulement, le chien ne se doute pas que sa vie est une entière simulation. Quand Penny se fait alors enlever pour les besoins rocambolesques du scénario, celui-ci y croit. Un peu trop…
Volt star malgré lui : un échec malgré son brio !
Volt star malgré lui, c’est l’histoire d’un film qui, sans concurrencer l’épique de films comme La Planète au trésor ou Mulan, parvient à nous toucher profondément par sa sincérité et sa simplicité.
Nous suivons ainsi Volt, un petit chien aussi courageux qu’attachant qui perdra tous ses repères dans les décombres sombres et réalistes des rues de New York. Volt star malgré lui n’est pas un film qui brille par sa beauté. La faute à un choix intelligent et formel destiné à montrer la dureté et la froideur d’un monde réel loin des projecteurs et décors en carton-pâte. Volt, c’est la critique (certes un peu timide) du star system qui n’hésite pas à exploiter les jeunes acteurs, actrices et animaux au profit d’une rentabilité accrue. Une morale un tantinet manichéenne et hypocrite quand on pense que Disney est le producteur de ce film !
Des décors travaillés, mais loin d’un imaginaire qui nous transporterait à la manière d’Atlantide dans un état de contemplation extatique. Qu’est-ce qui fait le brio alors d’un film comme Volt star malgré lui ? Tout simplement sa subtile galerie de personnages et une alchimie parfaite entre émotion et humour. Volt, contrairement à Aladar dans Dinosaure, est un personnage tout sauf manichéen malgré son cœur pur.
Celui-ci, trompé par les manœuvres d’Hollywood, fera tout pour retrouver sa maitresse tout en s’adaptant avec beaucoup de douceur à ce traumatisme de l’effondrement de ses croyances. Un personnage foncièrement bon à l’innocence bafouée, dont le poids lumineux sera balancé par la cynique Mitaine. Une petite chatte froide et désabusée qui cache derrière sa haine des humains un énième abandon de leur part. Une relation d’amitié profonde et puissante qui tiendra en haleine les spectateurs tout au long du récit (et ce malgré une seule chanson peu inspirée). Un film en somme d’une maturité exemplaire.
Un aboutissement de la maitrise de l’art de la 3D couplé à une palette d’émotions et relations qui ne pourra que tirer une petite larmichette à tous les propriétaires de compagnons à quatre pattes. Un petit film, moins marquant que les grandes symphonies des années 90, mais tout aussi touchant qu’un Roi Lion à sa manière. Un film qui fut à sa sortie presque inaperçu.
Le dernier rempart avant la sortie du dernier vestige de la 2D chez Disney, La Princesse et la Grenouille et l’arrivée d’un rouleau compresseur du nom de Raiponce. Volt star malgré lui marque la fin de la sombre décennie des années 2000 pour une nouvelle ère plus en phase avec les grandes fresques des années 90. Oui Oui, La Reine des neiges s’apprête à pointer le bout de son nez et Disney à renouer avec le succès.