« House of the Dragon » : une saison 2 puissante, mais qui manque d’équilibre… [Critique]

"House of the Dragon" : une saison 2 puissante, mais qui manque d'équilibre... [Critique]

Après une longue année d’attente, les fans du Trône de Fer peuvent enfin se délecter de la totalité de la saison 2 d’House of the Dragon. Entre manichéisme et conflits politiques, que vaut cette seconde saison de la série spin off de l’univers de Game of Thrones ? Quelle sera l’issue de ce conflit politique entre le camp des noirs et celui des verts ? Retour sur cette saison radicale, qui oscille entre le chef-d’œuvre et le pétard mouillé… 

Nota Bene : la saison 2 étant terminée depuis un moment déjà, l’article sera évidemment rempli de spoilers.

House of the Dragon S2E1 : pour le camp des noirs 

C’est avec une pointe de déception que nous finissons le premier épisode de cette seconde saison plus qu’attendue. S’il nous est impossible de ne pas louer le soin extrême porté à la réalisation de la série en termes de décors (naturels), de costumes ou, bien évidemment, d’effets spéciaux, la fin de son premier épisode nous laisse, malgré tout, un goût amer dans la bouche. Une saveur acide se traduisant par une impression de prise de partie de la série pour le camp des noirs.

Pour rappel, le climax de la saison 1 nous laissait sur la mort tragique de Lucerys Velaryon (camp des noirs) assassiné par son cousin Aemond un œil (camp des verts). Un assassinat qui se solde par un plan final sur le visage meurtri de la reine Rhaenyra, prête à venger la mort de son fils.

Une revanche attendue, comme les nouvelles Noces Pourpres, par les lecteurs du livre dont est adapté la série : Feu et Sang de GRR. Martin. Pourtant, si dans les livres la cruauté de la vengeance des noirs est assumée, la série au contraire justifie leurs actions par un mauvais concours de circonstances. L’acte d’une barbarie extrême est commis mais trivialisé, présenté comme un accident de parcours. Les noirs sont les grands gentils de la série après tout… Une déception quand on sait que l’essence même du Trône de Fer et de sa petite sœur : House of the Dragon, c’est sa perspective plus que nuancée.

Affiche promotionnelle House of the Dragon S2 ©HBO

E2S2 : un épisode de transition pour House of the Dragon 

L’épisode 2 : Rhaenyra la Cruelle, comme son nom l’indique, prend le parti de rattraper cette mouvance allant dans le sens des noirs en offrant au spectateur l’un des moments les plus soignés esthétiquement parlant de la série. Un épisode placé sous le prisme du deuil, celui de la reine Helaena Targaryen. 

Avec cet épisode, House of the Dragon explore les ravages de la perte d’un enfant sur une famille. Lucerys Velaryon du côté des noirs, Jaehaerys Targaryen du côté des verts. Ces deuils rapportent un peu d’humanité dans la série en soulignant la douleur d’Helaena et Rhaenyra. Tout ça, saupoudré d’un cynisme très propre à l’univers de Martin. Deux reines meurtries, entourées de personnes cherchant, derrière leurs cajoleries, à instrumentaliser leur peine.

L’épisode 2 d’House of the Dragon rappelle tout en lyrisme et cynisme que l’histoire de La Danse des Dragons, c’est le récit d’une seule et même famille déchirée par l’avidité de la couronne. Cette guerre est alors symbolisée par le combat final des jumeaux légendaires Erryk et Arryk. En s’entretuant au nom des camps adversaires, les inséparables frères portent le stigmate du conflit presque centenaire qui ronge la famille Targaryen. Le goût de feu et du sang au-dessus de la sagesse. Un épisode de transition qui rappelle une fois pour toutes que les victimes comme les bourreaux sont aussi verts que noirs.

Alicent Hightower (Olivia Cooke) et Helaena Targaryen (Phia Saban) ©HBO

E3S2 une palette plus nuancée 

Qui va s’assoir sur le trône de fer ? Ou il y a-t-il réellement quelqu’un de légitime à gouverner Westeros ? Telle est la grande question de l’œuvre de GRR. Martin. Celui qui mérite le pouvoir est celui qui n’en veut pas. En extrapolant la futilité des conflits sanglants entre puissants par la métaphore de la bataille du Moulin Brûlé, première bataille officielle de La Danse des dragons, cet opus repose les bases d’une morale profondément pacifiste.

Il questionne ainsi la légitimité de la guerre.

« Bientôt il ne se rappelleront même plus pour quelle raison cette guerre à commencé.

La raison est simple. Ils ont usurpé mon trône.

                                              Ce n’est qu’une des réponses. »

                  Dialogue entre Rhaenys Targaryen et  Rhaenyra Targaryen – E3S2 : Le Moulin Brûlé (The Burning Mill)

L’épisode 3 de la saison 2 d’House of the Dragon, se place également comme le dernier rempart avant l’entrée officielle des deux clans en guerre. Celui-ci devient ainsi le miroir, à travers la rencontre finale d’Alicent en Rhaenyra à Port-Réal, de l’ultime repas du roi Viserys en compagnie des branches vertes et noires de sa famille. L’épisode nuance la personnalité de ces deux reines qui cachent, derrière leur envie de se montrer comme de grandes reines au service de la justice, leurs propres ambitieuses aspirations. 

Alicent Hightower (Olivia Cooke) et Rhaenyra Targaryen (Emma D’Arcy)  ©HBO

House of the Dragon et La Danse des Dragons : l’épisode 4

L’épisode 4 marque définitivement l’entrée d’House of the Dragon dans La Danse des Dragons. Le réalisateur de l’épisode décide donc de relancer les intrigues politiques et complots au sein même des deux clans respectifs à travers les figures des princes Aemond et Daemon Targaryen. Deux princes de deux camps pour un trône. En dépeignant Aemond comme un frère au bord du régicide et Daemon comme un époux proche de la folie mégalomane, House of the Dragon pose les fondations de la seconde partie de la série placée sous le prisme des chuchotements et coups de poignards dans le dos.

Un épisode qui se clôt par la première bataille à dos de dragons. Une bataille absolument époustouflante, qui amènera à la perte tragique d’un des personnages les plus importants de la série… Le fantôme de la mort d’Eddard Stark de Game of Thrones flotte au-dessus de sa petite sœur. Aucune femme, aucun homme n’est immortel. Ni aucun dragon d’ailleurs, puisqu’en dehors des personnages tués ou blessés gravement, notre cœur se serre en voyant ces créatures majestueuses tomber aussi au combat.

La mi-saison se conclut donc sur 4 premiers épisodes haletants, mais inégaux. Une narration satisfaisante, mais manquant d’impact, d’une séquence clef qui aurait pu se retrouver dans l’épisode 1. Une première moitié de saison placée sous le signe du deuil et du complot. Mais voilà qu’arrive l’épisode 5, plus calme et psychologique…

L’épisode 5 : Miroir de l’épisode 2 

La saison 2 d’House of the Dragon, semble avoir choisi son camp. Si l’épisode 4 se distingue de tout le reste de la série en présentant sur grand écran sa plus impressionnante bataille doublée de la terrible perte de Rhaenys Targaryen, le reste de la saison dont l’épisode 5, prend le parti d’analyser d’un point de vue presque sociologique les conséquences d’une guerre sur l’humain.

Comme en début de saison, la série fait le choix de s’attarder sur les répercussions psychologiques et politiques de la mort de La Reine qui ne fut jamais sur les deux camps, plutôt que sur de vraies réponses armées. Un choix audacieux qui tranche avec la narration de Game of Thrones et son point de vue omniscient. Une série bâtie sur le mythe du feu des dragons qui préfère s’enfermer dans les tours lugubres et humides d’Harrenhal ? Un pari risqué, mais assez réussi.

Cregan Stark, à droite, est incarné par le comédien Tom Taylor et Jacaerys Velaryon est par Harry Collet ©Ollie Upton/HBO dans House of the Dragon. 

L’épisode 6 : Guerre Froide sur Westeros

L’épisode 6 de cette saison 2 confirme nos hypothèses. La seconde partie de la saison 2 d’House of the Dragon n’utilise pas le feu d’artifice de ses nombreux dragons comme le public se l’était imaginé. Plutôt que de jouer sur l’étincelle, la série fait le choix de s’amuser sur la peur de celle-ci. 

Le clan des verts, survivra-t-il à la perfidie d’Aemond Targaryen ? Le clan des noirs surpassera-t-il les aspirations mégalomanes de Daemon ? Le jeu des trônes dans Game of Thrones avait cette dimension géopolitique, mais peut-on en espérer de même d’une série revenant sur une crise de succession qui au sein d’un même royaume oppose et un frère et sa propre sœur ? Pas réellement. Alors, on étire le temps. Les plans se rallongent, les coupes se font rares pour laisser le dialogue surpasser l’action. La série prend le temps de développer ses personnages, mais ne traine-t-elle pas trop seulement ?

House of the Dragon, désacralise dans un sens, le mythe du héros conquérant et des batailles épiques pour s’offrir le luxe de faire l’anatomie d’un conflit qui n’a pas lieu d’être. Les Targaryen, à la manière d’une Rhaenyra ne sachant pas porter d’épée, ne font pas la guerre. Ils y jouent, et ça au grand désespoir d’une foule d’anonymes. Une morale que Talisa Maegyr dans Game of Thrones avait déjà faite au fanfaron Robb Stark. Il est légitime de réclamer vengeance, mais est-ce juste d’y entraîner des millions d’innocents ?

House of the Dragon
Mysaria est interprétée par Sonoya Mizuno ©HBO dans House of the Dragon. 

L’épisode 7 : Le peuple qui sauve House of the Dragon 

Le peuple est la clef de la victoire d’une couleur sur l’autre. Une vérité que les deux personnages les plus intelligents du show : Otto Hightower et Mysaria ont compris dès le début. Ce sera d’ailleurs cette foule qui ramènera l’action et le feu des dragons dans la série !

L’épisode 7 se présente comme l’opus le mieux réalisé de cette saison en alliant une alchimie parfaite entre chocs suffocants et énièmes machinations politiques. Qui renverse la tendance ? Qui fait entrer ironiquement le monde dans le chaos et la destruction ? Les propres bâtards de la maison Targaryen ! En semant les braises de La Semaison Rouge, House of the Dragon s’apprête à s’enflammer (enfin) pour de bon !

Une ironie d’un cynisme monstre. Les héritiers de la population de Port-Réal seront probablement ses futurs bourreaux. Rhaenyra le soulignera d’ailleurs dans l’épisode suivant : il faut faire des sacrifices pour faire (sa) justice !

Emma D’Arcy est Rhaenyra Targaryen dans House of the Dragon.  

Le grand final : une fin loin du panache de fumée promis… 

Ryan Condal, l’avait souligné : la saison 2 d’House of the Dragon n’est pas un épisode de feu et de sang, mais plutôt une métaphorisation d’une sorte de guerre nucléaire. En jouant sur des jeux de répétitions entre ses deux parties, la saison nous emmène pile au point qu’elle désirait : celui de l’exaspération.

Une exaspération bénéfique tant celle-ci se pend à la bouche du spectateur, assoiffé à l’idée d’enfin entrer dans cette Danse de Dragons qu’on lui tease depuis des années. Mais si Game of Thrones nous a bien appris une chose, c’est que Le Trône de Fer ne donne jamais ce que les gens désirent.

Le climax est là ! On le touche du bout des doigts. Une des plus grandes batailles de l’histoire de Westeros est sur le point d’éclater, ça y est ! Coupe et fondu au noir : fin de la saison 2 et rendez-vous dans au moins deux ans. L’épisode final prend finalement le parti de simplement lier les destins de toutes ces âmes rencontrées au cours de la saison, sans aller plus loin.

Un choix audacieux, qui met en valeur le véritable climax de cette saison en la destinée de Daemon et Aemond Targaryen, les jumeaux spirituels des camps Verts et Noirs. L’égocentrique Daemon atteint enfin le chemin de la rédemption tandis que l’ombrageux Aemond plonge du côté de la haine. Deux princes qui se placent comme les nouveaux éléments centraux de ce futur début de saison 3. Une coupe franche et nette en plein milieu de la montée narrative. Comme un dernier doigt d’honneur des showrunners à un public qui brûlait d’impatience à l’idée de voir des combats à dos de dragons.

Une seconde partie de saison singulière, mais cohérente. Divertissante et soignée dans son ensemble, mais pas aussi impactante qu’espérée. Cette saison d’House of the Dragon reste pertinente, mais déçoit tout de même en se présentant, comme le final de saison 1, sous les traits d’un énième le teasing de sa saison prochaine. Il serait temps d’un peu se réveiller… Une saison qui ne peut fonctionner indépendamment de son début de saison 3, ça manque d’équilibre et c’est dommage. 

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