En 1770, on fête en grande pompe le mariage du prochain souverain du Royaume de France : Louis XVI. Le spectacle est grandiose, un peu trop peut-être… Revenons ensemble sur les conséquences tragiques d’un événement pourtant joyeux.
C’est en effet le 16 mai 1770 que le jeune Dauphin Louis-Auguste de France épouse Marie-Antoinette d’Autriche. Ils ont alors respectivement 16 et 17 ans. À cette époque, et surtout cet âge, ils ont tous deux bonne réputation auprès des Français. La jeune Marie-Antoinette a séduit tout le monde en arrivant à la cour. Il faut dire que c’est une magnifique jeune femme de bonnes manières et que le vieux Louis XV est reconnu publiquement comme un libertin. Se crée alors une opposition forte entre ce jeune couple qui porte les espoirs de changement et un vieux décrépit dont on n’attend plus rien. La magnifique cérémonie a lieu au sein du domaine du château de Versailles.
Il est rapidement décidé que le mariage sera aussi célébré en grande pompe dans tout Paris. Ainsi, on prévoit d’installer une foire sur les remparts nord de la capitale. On illumine le tout en disposant des lanternes en réverbère le long des remparts et des allées de commerces. La foire doit rester en place jusqu’au 30 du mois, jour où l’on tirera un magnifique feu d’artifice.
Le feu d’artifice
Tirer un feu d’artifice n’est ni anodin, ni nouveau. Le premier qui eut lieu en France date de 1615. Il marque une occasion bien particulière, puisque tout Paris célèbre alors le mariage du jeune Louis XIII avec une Habsbourg : Anne d’Autriche. Vous l’aurez compris, le schéma se répète. La même famille de Bourbon, avec la même famille de Habsbourg.
Cette première occasion permet aux Français curieux de découvrir un autre usage de la poudre à canon : le divertissement. Cependant, on ne sait pas encore la colorer, on ne voit donc que des explosions blanches et « dorées ». Il semble toutefois aujourd’hui que le véritable premier feu d’artifice sur le sol français remonte à 1606, pour le baptême de ce même Louis XIII, organisé par le Duc de Sully.
Quoi qu’il en soit, on prévoit un nouveau feu d’artifice pour le 30 mai 1770 ! L’événement est exceptionnel. D’habitude, c’est à Versailles qu’on les tire. Dès 10h le 30, des salves d’artillerie annoncent le début des réjouissances. On sert le vin, le pain et les viandes aux gens présents. Le peuple est convié à venir voir le spectacle sur l’actuelle place de la Concorde (anciennement Louis XV).
Dès 21h, on tire un premier feu d’artifice qui permet de révéler les illuminations et les orchestres mis en place sur une large estrade. De plus, on a installé un « temple de l’Hymen ». Il s’agit d’un riche bâtiment orné de fontaines à ses pieds. Il a ici un rôle précis : dissimuler la batterie de lanceurs du feu d’artifice.
Après le spectacle, le drame
Pour une raison non déterminée, le feu d’artifice enflamme la grande estrade… La poudre était-elle mauvaise ou les tireurs avaient-ils mal calculé ? On ne le saura jamais, mais l’incendie qui débute est lui bien concret. C’est alors une foule de plus de 300 000 personnes qui tente de s’enfuir par la seule sortie disponible : la rue Royale, qui conduit aux remparts nord.
La suite est un enchaînement de malchance, de bêtises et de drame. En effet, un mouvement colossal et brusque d’une masse humaine ne se déroule jamais sans victime. De plus, la rue permettant de s’échapper passe devant un gros chantier en cours, ce qui crée un véritable entonnoir. Enfin, à cause de l’incendie, les policiers arrivent avec les « voitures pompes » et poussent la foule dans l’autre sens. Au XVIIIe siècle, c’est en effet la police qui gérait la lutte contre le feu. Cette dernière peut alors compter sur le corps des Gardes Pompes (depuis 1716), des soldats du feu formés professionnellement. Ce corps disposait de charrettes sur lesquelles sont montées des pompes à bras permettant de faire venir de l’eau d’une source proche.
Un lourd bilan
Cette poussée inverse a pour conséquence de faire tomber une partie de la foule, bientôt piétinée par le reste du groupe. Les gens sont alors bloqués et c’est la panique. Certains étouffent à mort, tandis que d’autres voient leur cadavre emporté par la marée humaine. On estime alors que 132 personnes ont perdu la vie. De plus, des centaines de Français sont blessés et transportés vers les hôpitaux parisiens. Des Français du peuple, les nobles ayant été mis à l’abri… Cependant, il semble aujourd’hui que les chiffres furent vus à la baisse et que la réalité soit plutôt autour des 1 500 morts.
On ne trouvera jamais de coupable à cette affaire. Par la suite, le jeune couple princier décidera de prendre les frais médicaux de toutes les victimes à sa charge. Leur mariage ne fut pas vraiment un succès. La réputation de Marie-Antoinette se détériore rapidement et on l’accuse d’être dépensière, frivole, extravagante et de perdre gros aux jeux d’argent. L’image du pauvre Louis XVI n’évolue pas non plus dans le bon sens. Ils paieront tous deux de leur vie cette image lors de la période révolutionnaire de la fin du XVIIIe siècle.
Sources :
- Feu d’artifice au mariage de Louis XVI : 132 morts – Retronews
- Christine Dousset, « Marie-Antoinette : la reine refusée », Les Cahiers de Framespa, 2011
- En 1615 on tire le premier feu d’artifice français à Paris – France Bleu
- Catherine Denys, Ce que la lutte contre l’incendie nous apprend de la police urbaine au XVIIIe siècle, 2011
7 Replies to “Louis XVI et Marie-Antoinette : un mariage explosif… Et 132 morts !”