Avis aux amateurs de contes fantastiques et de folklore japonais : on a l’animé qu’il vous faut pour traverser l’automne et sa mélancolie ! Adapté du célèbre manga du même nom de Yuki Urushibara, Mushishi est un animé simple mais envoûtant, qui garde toujours un air de mystère et se découvre petit à petit…
Un portail vers un autre monde
A chaque fin d’épisode, le constat est le même : en 20 minutes, Mushishi nous plonge irrémédiablement dans une ambiance si épaisse qu’on en oublie tout ce qui nous entoure, comme si on était sous le charme discret mais puissant de la mangaka Yuki Urushibara ou du studio d’animation Artland. Discret, c’est bien le mot, car rien dans Mushishi ne peut-être qualifié de tape-à-l’œil ou de racoleur. Et pourtant, l’effet est immédiat : à tel point que l’œuvre a beau passer sous le radar de nombreux spectateurs, il est encore aujourd’hui classé comme une des meilleures séries animées de tous les temps. Un paradoxe qui s’explique assez facilement.
Mushishi est un vrai défi de marketing pour le monde actuel de l’animation. Ses points forts sont en effet des plus démodés si l’on en croit les grands succès modernes : la poésie, l’ambiance mélancolique et contemplative, l’écologie et la philosophie ne sont pas vraiment au goût du jour. Néanmoins, c’est bien de ces thèmes qu’émerge la qualité de Mushishi, qui sait jouer avec ces pensées et émotions complexes, pour servir des épisodes d’une simplicité agréable et pourtant à l’effet profond. Un exercice de style complexe, mais qui fonctionne parfaitement.
Mushishi est une lettre d’amour aux mystères de la vie et une invitation à s’y plonger sans essayer de comprendre. On ressent la passion de Yuki Urushibara et du studio Artland grâce à la qualité qui transparaît dans chaque détail et qui nous transporte dans leur univers. Un univers où l’invisible et le visible cohabitent et parfois se mêlent et où tout est profondément lié. Et, peut-être le point le plus attirant, un univers qui est en fait le nôtre.
Les mushis : aux sources de la vie
Le titre Mushishi signifie « le maître des mushis ». Et les mushis, ce sont ces bestioles lumineuses et invisibles qui causent parfois bien des soucis aux humains lorsqu’ils interagissent avec notre monde. Le principe des mushis est qu’ils représentent la forme de vie la plus pure, l’origine même de l’évolution. En créant un bestiaire qui repose sur l’ensemble de la nature et de ses manifestations, comme les contes folkloriques, Yuki Urushibara sait que les possibilités sont infinies. Ainsi, le manga et l’animé sont une déambulation qu’on peut imaginer sans fin et sans grand arc narratif, chaque épisode paraît hors du temps.
Yuki Urushibara a créé ce manga pour pouvoir explorer la beauté de la nature et l’animé rend hommage à son travail en plongeant son héros dans un monde luxuriant et foisonnant de détails, que ce soit au sein de forêts gigantesques, d’immenses montagnes enneigées ou d’océans brumeux qui semblent infinis. Une manière de redéfinir la place de l’humain dans la nature et de faire ressentir la puissance de cette dernière. Mais cette immensité est aussi l’occasion de rappeler la part de mystère qu’abrite ces grands espaces inexplorés et où se cachent les mushis.
Avec la nature et l’équilibre de la vie au centre de l’intrigue, on peut considérer que Mushishi est une œuvre profondément écologique et spirituelle. Intimement liée au shintoïsme (et donc à l’animisme) et à l’héritage folklorique japonais, Mushishi touche aux thèmes du taôisme, du bouddhisme et au fameux mono no aware : l’acceptation de l’impermanence des choses.
La mélancolie de Mushishi
Du fait de cette philosophie, c’est tout l’animé qui est baigné d’une atmosphère contemplative et mélancolique. Jouant sur le temps qui passe, la fugacité de l’Homme au sein de la nature, les épisodes sont souvent en demi-teinte et sans ennemi ou allié (les mushis ne sont pas dotés d’intention peu importe leur effet). Il en ressort des événements tristes ou joyeux pour les Hommes mais pris avec un grand recul qui pose un voile apaisant sur les émotions.
Cette ambiance étant liée à plusieurs philosophies chinoises puis japonaises, Mushishi peut rappeler d’autres œuvres qui en sont imprégnées. On peut ainsi penser aux œuvres de Miyazaki qui n’hésite pas à plonger ses intrigues et ses héroïnes dans des mondes en mutation, où la nature a aussi une grande importance et où l’intrigue laisse souvent de l’espace à une contemplation teintée de mélancolie. Parmi les autres animés avec le même effet, on retrouve Samurai Champloo et Cowboy Bebop.
Avec son sound-design discret qui plonge le spectateur dans une ambiance naturelle et sa bande-son à la fois relaxante et onirique, Mushishi se révèle souvent être une expérience spirituelle inattendue. C’est en tout cas un très bon moyen de se détendre tout découvrant des paysages et contes japonais, dans une évasion apaisante.
Ginko, un héros charismatique
Le succès de Mushishi tient aussi dans son personnage principal charismatique, Ginko, le héros vagabond initié aux mystères des mushis. Parcourant le Japon afin de les étudier et d’aider les habitants qui en sont parfois victimes, cet homme aux cheveux blancs et à qui il manque un œil ne croise le chemin de ses contemporains que comme un voyageur éphémère. Il incarne ainsi pleinement la philosophie de l’œuvre, étant lui-même presque une légende folklorique dans son propre monde, tentant de rétablir un équilibre là où il a été rompu.
Plein de mystère, Ginko se situe à la frontière entre les mushis et les humains, ayant été victime du mushi d’après qui il a été nommé et qui lui a volé son œil ainsi que sa mémoire. Paraissant presque immortel, Ginko semble depuis traverser les paysages et le temps sans que les choses n’aient plus d’impact sur lui. Calme, intelligent et attentionné, il est l’âme de Mushishi.
Parfait pour voyager dans les paysages intouchés du Japon et pour découvrir son folklore dans une ambiance apaisante, Mushishi est une perle de l’animation. On ne peut que vous conseiller de découvrir cette œuvre culte, toujours aussi appréciée malgré le temps qui passe et qui offre un moment d’évasion, que ce soit en manga chez Kana ou en animé sur Crunchyroll.
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