Sherlock Holmes est le personnage le plus adapté au cinéma, avec plus de 260 films à son actif. Mais il n’est pas en reste sur le petit écran non plus : Sherlock de la BBC, série iconique de la Granada, adaptation animée de Miyazaki avec son détective canidé… Mais un héros aussi fameux a forcément son ennemi mythique. Le terrifiant professeur Moriarty, génie du crime, marque les esprits à chacune de ses apparitions. Et quand on se lasse des gentils… Il est temps d’aller faire un tour du côté des méchants. C’est ce que Crunchyroll propose avec son Moriarty the Patriot, adapté du manga du même nom de Miyoshi Hikaru et Ryōsuke Takeuchi.
Moriarty the Patriot est un animé sorti en 2020 qui compte seulement deux saisons, soit 24 épisodes. La réalisation a été confiée à Production I.G, à qui l’on doit Ghost Hound, Kuroko’s Basket, Pyscho-Pass et Vinland Saga.
Synopsis : Au XIXe siècle, tandis que la révolution industrielle se poursuit, l’Angleterre étend sa puissance et sa gloire. Cependant, malgré le progrès et le développement technologiques, le système de classes en place depuis des siècles reste inchangé, et le pays est contrôlé par les nobles, qui ne représentent même pas 3 % de la population. Les gens vivent prisonniers du statut qu’ils ont à leur naissance. William James Moriarty décide de passer à l’action pour détruire le système de classes corrompu et créer le pays idéal.
Un Moriarty jamais vu
Dur dur de s’attaquer à une figure mythique de la littérature ! Vaut-il mieux essayer d’offrir de l’originalité quitte à s’attirer les foudres des fans, ou se contenter de copier le matériau de base ?Sûrement grâce à leur éloignement culturel, les mangakas semblent moins s’en faire que nous à ce sujet. Shin’ichi Sakamoto n’a pas hésité avant de présenter sa nouvelle adaptation de Dracula, #DRCL Midnight Children, où il réinvente complètement le personnage culte. Et Miyoshi Hikaru est du même acabit.
Du Moriarty âgé, sévère, cruel au nez en bec d’aigle, on passe ici à un jeune homme charmant, au visage presque angélique. Premier choc, visuel donc. L’esthétisme de Moriarty the Patriot emprunte d’ailleurs plus au shōjo qu’au shōnen, avec ses héros longilignes aux traits fins et le personnage androgyne d’Irène. Derrière la blondeur innocente de Moriarty, on devine le visage de Bjorn Andrésen et de son héritage dans le manga.
Côté caractère, on nous livre un Moriarty tout aussi brillant que dans le canon de Conan Doyle, mais aux motivations complètement inversées. Ici, le Napoléon du crime est un fervent patriote (d’où le titre), qui lutte contre le système de classes. Il ne se tourne vers le crime que parce que son analyse finale est que la société ne bougera pas autrement. Un message révolutionnaire, égalitaire, que n’auraient pas renié Robespierre ou Claire Lacombe. Le côté monolithe solitaire du personnage est lui aussi transformé. Notre Moriarty d’animé est suivi par une troupe d’amis et d’idéalistes loyaux et une famille soudée.
A qui ça s’adresse ?
Dès le premier épisode, où on pourchasse un tueur et violeur d’enfants, Moriarty the Patriot annonce la couleur : rouge sang. L’animé oscille entre le drame social, le crime à l’esthétique gothique et la comédie pailletée avec une aisance qu’on ne voit que dans le manga. Les fans de Black Butler s’y reconnaîtront sûrement, ceux de Hellsing aussi. Les amateurs de Boy’s Love devraient également trouver leur compte dans les interactions entre Sherlock Holmes et Moriarty. Ils nous offrent en effet une alchimie presque aussi homo-érotique que Robert Downey Jr. et Jude Law dans les films Sherlock Holmes de Guy Ritchie. La série prend aussi ses influences du côté de James Bond et de Shakespeare, ainsi que de la littérature classique anglaise.
Côté événements historiques, Moriarty the Patriot aime revisiter les classiques : grand incendie de Londres, Jack l’éventreur… Mais la série n’hésite pas à prendre nos attentes à contre-pied, surtout en ce qui concerne les personnages et leur développement. Une surprise agréable, qui offre un peu de fraîcheur à un Moriarty plus que vu et revu, à une Irène Adler souvent ignorée ou méprisée. Les personnages originaux sont eux aussi développés et se marient bien avec l’intrigue (on pense notamment à la fratrie Moriarty). Enfin, on peut mettre au crédit de Moriarty the Patriot que la série a su s’arrêter au bon moment avec une fin originale, sans finir en queue de poisson. Le manga, lui, est toujours en cours !
Si vous cherchez un animé plutôt court, sur Crunchyroll et que l’Angleterre du XIXe siècle vous attire. Si vous aimez les mystères, les crimes, l’amitié indéfectible et les combats, alors foncez ! Moriarty the Patriot est aussi et surtout un manga à découvrir chez Kana, avec 16 volumes déjà traduits en français.
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