Si, pour beaucoup, les loups en France sont synonymes de décors forestiers et de petites campagnes paysannes, il fut un temps où cet animal terrorisait même notre bonne vieille capitale !
Nota Bene : le sujet du loup génère, encore aujourd’hui, beaucoup de débats et de crispations en France. Ceci étant dit, cet article a pour but l’information historique et n’appelle en aucun cas à la violence envers cet animal.
Paris : la ville misère
Dans la fin des années 1430 à Paris, les conditions de vie de la population semblent plus rudes que jamais. Les ravages de la guerre de Cent Ans se font encore ressentir. La pauvreté des Parisiens s’affiche de toutes parts, de même que la famine qui s’abat sur ces derniers.
Les ressources viennent souvent à manquer, pour ceux que l’on surnomme alors les « gueux ». De leur côté, les activités fermières et agricoles ne parviennent pas à alimenter pleinement la population. Ils faut dire que la misère est telle que même le bétail, présent aux abords de la ville, décède à petit feu.
À cette époque, le paysage parisien est alors complétement différent de celui qu’on lui connaît aujourd’hui. La cité est en effet entourée de forêts et de bois, alors qu’une imposante muraille protège son intérieur de potentielles invasions ennemies. Pourtant, à l’extérieur de ces murs, la faim tenaille aussi une autre population locale… Celle des meutes de loups peuplant les environs.
Ces animaux peinent à subsister, tandis que les hivers rudes s’abattent sans cesse sur leurs territoires.
À ces facteurs s’ajoute aussi la surabondance de la chasse, qui réduit drastiquement la quantité de gibier sauvage, proies de prédilection des prédateurs. Cette situation dramatique pour tous ceux présents dans les environs se conclue alors d’une manière fatidique. En effet, forcés de s’alimenter, les loups décident de se tourner vers la seule source de nourriture à disposition : l’intérieur de la ville-forteresse.
Une menace multiple rodant dans la métropole
L’une des sources d’informations encore accessibles de ces événements extraordinaires est le Journal d’un bourgeois de Paris. Cette œuvre anonyme retraçant l’histoire de la ville entre 1405 et 1449 est une des mémoires permettant aux générations actuelles de se replonger dans ces temps sombres.
L’un des premiers méfaits des loups y est mentionné en date de décembre 1438. Une meute de loups aurait alors pénétré dans la ville et semé la panique. Il faut dire que le manque d’argent de la capitale est tel que ses larges remparts sont jonchés de brèches. Ces entrées sont idéales pour permettre aux carnivores de franchir la limite de pierre. Le bilan de leur premier assaut fait part de divers attaques menées sur des chiens, ainsi que de la mort d’un enfant, dévoré vif.
L’assaut s’accompagne bien sûr d’une vague de panique et fait germer une lourde paranoïa chez les habitants. Malheureusement, d’autres attaques ne tardent pas à être bientôt répertoriées. En septembre 1439, 14 victimes tombent sous leurs crocs entre Montmartre et la porte Saint-Antoine. De nombreuses fois, les prédateurs sont aperçus, rodant en meute dans cet environnement urbain qui leur est peu familier.
Comme à l’accoutumée, les loups s’en prennent principalement aux individus les plus faibles. Femmes, enfants ou vieillards tendent à tomber sous leurs crocs. Leurs excursions meurtrières deviennent si fréquentes que, bientôt, on leur reconnaît même un chef. Il s’agirait d’un mâle, plus imposant que ses congénères et dépourvu de queue. Cette caractéristique lui vaudra le surnom de Courtaud par les locaux. Cependant, les animaux verront bien vite leurs sanglants agissements connaître une fin toute aussi violente.
Une riposte locale qui met fin à la terreur
Le fameux et redoutable Courtaud est tué par les habitants le 10 novembre 1439. Malgré tout, cela ne stoppe pas les attaques. En décembre, près de quatorze femmes sont recensées mortes par la faute des bêtes. Cette liste de victimes, sans cesse en progression, finit par pousser les Parisiens en colère à agir.
Selon divers récits et témoignages, plusieurs habitants courageux menèrent des opérations lors d’une énième apparition de la meute tueuse. Les hommes auraient acculé les animaux jusqu’au centre de la cité, juste en face de la cathédrale Notre-Dame, avant de tous les mettre à mort à coups de pierres et ustensiles à portée de main.
Suite à cette revanche commune, on ne recensa plus aucun méfait meurtrier de loups à Paris. La légende et le bouche-à-oreille, quant à eux, termineront de s’emparer du fait divers qui finira malgré tout par sombrer dans l’oubli. Cela dit, il est aujourd’hui de nature publique que les grandes chasses royales, et notamment celles organisées par le Grand Dauphin (fils de Louis XIV), sont largement responsables de la raréfaction des canidés sauvages près de Paris.
Aujourd’hui encore, plusieurs zones de flou continuent de peupler les récits entourant ce phénomène, issu d’une misère inter-espèce. Cependant, l’histoire de France n’est pas avare en macabres épopées de prédateurs. Les affaires de la Bête du Gévaudan ou des loups du Périgord viennent également compléter ce registre, aussi insolite que bien de chez nous !
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Cf : « Les loups sont entrés dans Paris » de Serge Réggiani
Merci pour votre intéressante article. Ça m’a donné de la lumière sur la cause du comportement des loups. Dans la Meuse j ai trouvé quelques croix qui sont érigés comme souvenir pour une attaque aux hommes par des loups. Mais c était 18 e siècle. Peut-être aussi par manque de nourriture dans les forêts.
Marie Anne
Paris entouré de forêt en 1400…
Paris, Lutèce avant, comme toutes villes un peu important de l’époque avait un problème majeur.
Elle ne produisait aucune nourriture pour une population en augmentation. De plus, les transports logistiques se faisaient par bœufs et voies navigables hors période de crues ou de Seine basse (pas de régulation de la seine avant 1840 avec une écluse coté quai Conti).
La seule solution était d’apporter des denrées à Paris dans un temps rapide pour qu’elles restent fraiches, et naturellement, les champs s’installaient autours de Paris (et Lutèce avant) pour alimenter les bourgeois.
A chaque extension de Paris, des champs étaient cooptés et les plaines agricoles étaient étendues plus loin.
La production agricole avait en plus de faibles rendement et exigeait de vaste terres agricoles.
Les paysans de l’époque auraient été les premières victimes de ces loups.
Comment, avec une forêt dense, le loup aurait il manqué de nourriture (cerfs, biches, sangliers etc…)
De plus, le « récit » d’une meute tuée à proximité de Notre Dame par coups de pierres est beaucoup trop biblique pour être crédible, surtout sur des histoires d’une période ou les fables religieuses alimentent quotidiennement les croyants.
Le « Courtaud » qui tue 14 femmes en plein Paris est aussi étonnante. Ils n’ont pas manger de femmes autours de Paris ? Comment, comme pour Gévaudan plus tard, expliquer que le loup soit un prédateur attiré par ce qui serait appelé aujourd’hui, des féminicides… La femme de l’époque est-elle plus faible qu’un vieillard ?
Ca fait pleurer dans les chaumières, mais cela parait peu crédible.
Dans votre récit, vous mentionnez que je cite » les loups décident de se tourner vers la seule source de nourriture à disposition : l’intérieur de la ville-forteresse. »
J’apprends donc que les loups se réunissent en conciliabule pour déterminer une stratégie…
Contes et légendes ne sont pas vérités.