La Bibliothèque nationale de France (BnF) est aujourd’hui une institution publique administrative dépendant du ministère de la Culture. Celle-ci renferme toutes les collections royales provenant de la fin du Moyen Âge !
Il s’agit d’un lieu de passage évident pour tout un public assoiffé de connaissances. Son histoire riche et ses nombreuses collections la placent dans un rôle symbolique de gloire du savoir et des richesses. Elle est l’un des monuments les plus importants du patrimoine de France, mais aussi une institution récente qui joue sur le flux culturel et son implication sur la scène internationale. Beaucoup ont recours à ses trésors, mais connaît-on vraiment son histoire ?
Histoire de la BnF, une collection monument
La notion d’institution comporte une dimension historique. Non seulement parce que chaque institution culturelle a sa propre histoire, mais aussi parce que la plupart d’entre elles sont liées à une histoire nationale, régionale ou locale.
Charles V et le début d’une bibliothèque royale
La fondation de la Bibliothèque nationale de France en tant que monument est étroitement liée à son histoire. La longue histoire des bibliothèques prend racine dans les scriptoriums des abbayes du Moyen Âge. Les copistes rangent alors leurs œuvres finies dans les armarius des maisons religieuses. Si la culture se concentre à cette époque chez les Chrétiens en Occident, un marché du livre se développe dès le XIIe siècle. Il conduit à l’élargissement de l’accès aux livres à la société laïque. Ainsi, de nombreuses collections privées voient le jour.
En 1368, Charles V (roi de France de 1364 à 1380) installe sa collection de livres dans les trois étages de la tour aménagée du palais du Louvre. Elle compte plus de 900 volumes riches et rares ! C’est la première Librairie Royale officielle, coexistant avec une collection privée. On y trouve les livres les plus précieux, traduits en français en bas. Puis, on a les romans d’aventures, les livres de médecine. Enfin, en haut, sont conservés des livres en latin, des encyclopédies et des textes scientifiques. Avec les prêts et les dons, la collection est complétée : avec des apports d’autres bibliothèques, mais aussi avec des transferts dans d’autres bibliothèques.
Sous Louis XI, une nouvelle bibliothèque se constitue à Amboise, puis au château à Blois. Les rois qui se succèdent enrichissent la bibliothèque royale. Charles VIII et Louis XII rapportent par exemple lors des guerres d’Italie des manuscrits de la bibliothèque des rois de Naples, ou de la bibliothèque Laurentienne, financée par Laurent de Médicis et réalisée par Michel-Ange. Ce foisonnement d’ouvrages attire alors de nombreux visiteurs.
La Révolution de l’imprimerie
L’utilisation d’un nouveau support venu d’Orient, le papier, permet une révolution dans l’histoire du livre. Il est inventé en Chine en 105 de notre ère. Il suit ensuite la route de la soie jusqu’en Espagne musulmane en 1100. Les Italiens l’importent finalement au XIIIe siècle, et il va coloniser la France au XIVe. Le parchemin est abandonné pour le papier qui est treize fois moins cher au XVe siècle. Tous ces facteurs nouveaux, provenant de nouvelles ouvertures et avancées technologiques, profitent à l’industrie du livre, et mènent à la mise au point de l’impression de Gutenberg en 1450. Cela permet l’explosion du marché du livre.
En 1537, l’ordonnance de Montpellier de François Ier institue le dépôt légal, qui impose que chaque livre publié dans le royaume doive se trouver copié dans la collection privée du roi à Fontainebleau. Il y a donc deux bibliothèques royales jusqu’à ce que celle de Blois soit transférée à Fontainebleau. Jusque-là composée de nombreux ouvrages luxueux et rares, la bibliothèque royale se dote de documents moins coûteux : périodiques, estampes, images, affiches, cartes de géographie, partitions, mais aussi monnaies et médailles et, plus tard, supports audiovisuels. Cette évolution de la collection de la bibliothèque royale fait état du marché de l’édition de la France de la Renaissance, liée à l’imprimerie.
Un symbole de puissance
On sépare la bibliothèque des appartements royaux en la plaçant dans le Quartier latin à Paris sous Charles IX. Elle connaît alors plusieurs déplacements pendant les guerres de Religion, jusqu’à ce qu’elle soit établie rue Vivienne à Paris en 1666 sous Louis XIV. Son ministre Colbert y associe des collections plus matérielles, comme celles de pierres, médailles, objets d’art. La bibliothèque royale continue de s’enrichir de nombreuses collections privées (Catherine de Médicis, Dupuy, Gaston d’Orléans…). Elle multiplie par deux le nombre de manuscrits et par quatre les ouvrages imprimés. On l’ouvre alors au public. Le roi Soleil en fait un symbole de puissance, de richesse et de savoir. Un instrument au service de sa gloire.
Le siècle des Lumières va continuer d’enrichir la bibliothèque royale en intégrant entre autres la bibliothèque de Colbert, de Baluze, de Sébastien de Brossard et en 1784 une partie de la bibliothèque de la Vallière. Elle est déplacée dans la rue Richelieu, dans l’ancien palais de Mazarin, et attire le projet d’agrandissement de l’architecte Etienne-Louis Boullée en 1785, car elle était trop petite pour accueillir toutes les nouvelles collections.
Avènement de la bibliothèque de la Nation
Lorsque la Révolution renverse l’Ancien Régime, les principes républicains dominent la France. La politique culturelle des intellectuels du gouvernement révolutionnaire passe par la sacralisation de l’esprit et des livres. Aussi, la bibliothèque de l’Ancien Régime est protégée du vandalisme contrairement à la bibliothèque privée du roi. La nationalisation des biens de l’Église et l’accaparement des biens des émigrés fuyant la révolution permettent un apport d’ouvrages nouveau au sein de la bibliothèque, à présent appelée la bibliothèque de la Nation (bibliothèque nationale). On centralise la culture à Paris. La bibliothèque nationale devient un symbole des principes de la République que l’on va entretenir. Avec la création d’écoles et les conquêtes révolutionnaires, entrent dans la collection de la bibliothèque 250 000 livres, 15 000 manuscrits, 85 000 estampes et cartes. Mais aussi des objets du trésor religieux qui complètent ses collections matérielles et renforcent un certain rôle de musée.
Au cours du siècle, l’évolution du livre et son accès, les écoles et universités créées entraînent un accroissement de la soif de culture et du besoin du livre. On ouvre en 1833 une salle publique de lecture de plus de cent places. De 1854 à 1875, le Second Empire engage des grands travaux. La bibliothèque nationale évolue peu à peu vers la modernité du XXe siècle avec la lumière électrique, de nouvelles salles… La bibliothèque est un outil au service de ceux qui veulent s’instruire.
Ses changements de lieux nombreux sont tous liés à divers monuments historiques. Son ultime déplacement au palais Mazarin a été déterminant quant à la constitution même du bâtiment. La Bibliothèque nationale de France est donc autant un monument d’histoire de France qu’un monument du livre et des arts.
Institution de la République française
La BnF est une institution d’organisation publique de diffusion culturelle, sous la tutelle du ministère de la Culture et de la Communication. Malgré sa grande histoire, la bibliothèque en tant qu’institution concerne surtout la période récente. Ses sites principaux se situent sur le site Tolbiac-François Mitterrand (quai François-Mauriac, Paris 13e) et le site Richelieu (58 rue de Richelieu, Paris, 2e).
Missions de la BnF
La Bibliothèque nationale de France en tant qu’institution est officialisée par décret le 3 janvier 1994 et a pour mission, d’après l’article 2, de collecter, conserver, enrichir et communiquer le patrimoine documentaire national.
Sous la présidence de François Mitterrand en 1998, la bibliothèque nationale devient donc la Bibliothèque nationale de France. Plusieurs sites vont dépendre de cette institution, notamment le site Richelieu dans la rue Vivienne, la bibliothèque de l’Arsenal et la maison de Jean Vilar à Avignon. Le plus important est le site François-Mitterrand. Le président entreprend de grands travaux architecturaux pour promouvoir les monuments de Paris qui symbolisent le rôle de la France dans l’art, la politique et l’économie. De ce fait, s’ouvre le site Tolbiac qui montre le nouveau rôle que l’on attribue à la BnF en tant qu’institution. Aussi, le site se met au service de la recherche et offre de meilleures conditions à la transmission vers un public élargi, avec de nouvelles salles de lecture, une bibliothèque tout public et une bibliothèque consacrée à la recherche. On y déménage de nombreux ouvrages.
Sur les différents sites, une politique culturelle est en place. Manifestations culturelles, expositions, conférences, colloques, etc. forment ainsi un échange entre bibliothèque et public. Ce public si important est la cible de cette institution qu’est la BnF. Dans cette idée, des projets de modernisation vont avoir lieu.
Se moderniser pour s’étendre au monde
Dans les missions que l’on octroie à la BnF, il y a celle d’établir une coopération entre les bibliothèques, avec des pôles dans le pays qui permettent de mettre en relation les collections des bibliothèques du territoire national. Cette mise en relation se traduit par les bases de données nouvelles de libre accès, comme Gallica. Ou encore le catalogue collectif de France qui met a disposition de nombreux documents. Cette coopération entre bibliothèques s’extériorise. La BnF impose la France dans la politique culturelle mondiale en contribuant dans les grandes bases de données internationales. En 2016, 33 % du public de la BnF était étranger.
En 2017, les collections de BnF disposent de 15 millions de livres, 15 millions d’estampes et de photographies, plusieurs centaines de milliers de manuscrits, des cartes et plans, des partitions musicales, des objets, des costumes, des phonogrammes. Mais aussi des vidéogrammes, et surtout 31 milliards d’archives du web !
La BnF est donc une institution complexe qui permet un accès conséquent à la culture grâce à son adaptation aux nouvelles technologies. L’histoire de la Bibliothèque nationale de France nous montre en quoi elle est un monument. Un monument du livre notamment, avec le foisonnement des collections diverses, mais aussi un véritable musée. Elle atteste des évolutions technologiques et spirituelles de la France du Moyen Âge à nos jours. Aujourd’hui, elle sert au quotidien des chercheurs ou autres curieux d’apprendre…
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