« Les Contes de Kokkola » : un hommage à Méliès et Chaplin par Juho Kuosmanen !

Il fut un temps où les mots se faisaient rares au cinéma. Une époque faite de noir et blanc et de cartons de dialogues… Un monde fantasmé, que le réalisateur de Compartiment n°6, Juho Kuosmanen, se plaît à explorer le temps de trois courts-métrages : Les Contes de Kokkola.

Les Contes de Kokkola : « Une trilogie finlandaise »

Synopsis : « A Kokkola, charmante petite ville finlandaise non loin du cercle arctique, ce ne sont pas les déjantés qui manquent ! Comme Romu-Mattila, un marginal qui décide de partir s’installer en Suède avec son chien, des trafiquants d’alcool accompagnés d’un cochon ou encore une gardienne de phare qui rêve de se lancer dans une grande aventure spatiale. »

Tout commence dans la (véritable) ville de Kokkola, terre de naissance et surtout d’expérimentation du metteur en scène Juho Kuosmanen. En 2010, le réalisateur et son ingénieur du son/bruiteur Heikki Kossi nourrissent la folle idée de créer une « performance cinématographique » où des films projetés en salle seraient bruités et mis en musique en direct. Un véritable hommage aux artisans du son au cinéma qui prend finalement un nom : Les Contes de Kokkola.

Alors bienvenue à Kokkola, une petite bourgade nichée derrière les couches de neige finlandaises où vous aurez peut-être la chance de croiser un vieil homme et son fidèle chien, deux sympathiques et naïfs contrebandiers d’alcool, ou une gardienne de phare la tête dans les étoiles !

Les Contes de Kokkola nous plongent ainsi dans l’histoire d’une ville que le réalisateur aime comparer à l’étrange bourgade de Twin Peaks. Un parallèle plus que pertinent quand on pense à cet hybride film composé en réalité de trois courts-métrages bien distincts :

• Mattila le vagabond et la jolie femme (29minutes) : L’histoire d’un homme, qui après l’expropriation de son logement, décide de se rendre en Suède pour démarrer une nouvelle vie. Un récit inspiré de l’acteur principal Seppo Mattila, qui grâce au film et à sa médiatisation, peut désormais rester chez lui jusqu’à la fin de sa vie !
• Bouilleurs de cru clandestins (16 minutes) : Le récit d’un frère, d’une sœur et d’un cochon à la recherche de la fortune, mais sans jamais renoncer une petite partie de cartes ! Le remake signé Juho Kuosmanen du tout premier (et malheureusement perdu) film de fiction finlandais datant de 1907 : The Moonshiners ou Salaviinanpolttajat en finnois !
• Et Une Planète fort lointaine (17minutes) : Ou la plongée dans le rêve fantasmagorique d’une gardienne de phare, devant des astres qu’elle rêve de toucher du bout des doigts ! Un court-métrage digne du cinéaste George Méliès où les accessoires et costumes sont tous faits à la main !

Avec ses Contes de Kokkola, Juho Kuosmanen dresse à la manière d’un David Lynch virtuose le portrait d’une petite ville, sa petite ville, et de ses quelques habitants marginalisés. Rassurez-vous ! Ils sont plus proches des tirades incongrues de la Femme à la buche que du traumatique Bob de Twin Peaks ! La chronique d’un petit bout de terre et de ses habitants !

Une trilogie du voyage au centre du cinéma !  

Les Contes de Kokkola sont une ode, un cri rempli d’amour et d’humour un point sarcastique d’un réalisateur à l’endroit qui l’a vu grandir. Ils sont également, d’un autre côté, un hommage aux balbutiements d’un Septième Art artisanal où tout était fait de bric et de broc.

Des acteurs pour la plupart non professionnels, une touche de mélodrame drolatique que ce cher Charlie Chaplin a tant su manier avec des films comme The Kid ou encore ce clin d’œil si évident au Voyage dans la Lune de Méliès… On pousse le pastiche jusqu’à exploiter les défauts des pellicules de l’ancien temps en laissant les caméras trembler ou les brûlures de cigarette apparentes (un procédé que David Fincher s’était amusé à recréer par ailleurs avec Mank).

La parole enfin s’efface au profit du travail de l’accompagnement musical et sonore. Les Contes de Kokkola sont muets, mais loin d’être dénués de son. On a pleuré devant The Kid, éclaté de rire devant La Ruée vers l’or et tremblé devant Métropolis.

Provoquer l’émoi du spectateur ne passe pas que par la beauté du phrasé d’une tirade… Celui-ci se trouve aussi bien dans la puissance d’une image évocatrice ou de quelques notes de musiques. Un enseignement bien connu du réalisateur qui livre par conséquent un des plus bels hommages des dernières années à un cinéma par qui tout est arrivé.

Les Contes de Kokkola, une série de trois courts-métrages signée Juho Kuosmanen à découvrir au cinéma depuis le 26 mars 2025 ! 

Les Contes de Kokkola : bande-annonce

Sources : 

• Juho Kuosmanen : « Le cinéma finlandais est obsédé par l’alcool » – Sofilm