Le syndrome K, la maladie imaginaire qui sauva des Juifs en 1943

Le syndrome K, la maladie imaginaire qui sauva des Juifs en 1943 - Cultea

Alors que Rome est occupée par les nazis en 1943, une nouvelle maladie apparaît : le syndrome K. Un service de l’hôpital Fatebenefratelli, situé sur l’île Tibérine, est dès lors dédié à l’étrange épidémie. Les nazis s’abstiendront alors de pénétrer dans l’enceinte de l’hôpital…

Contexte historique

Avant de devenir un hôpital moderne en 1934, l’hôpital Fatebenefratelli est un hospice. Il est ensuite géré par le docteur Giovanni Borromeo, aidé du père Maurizio Bialek, qui dirige aussi l’hôpital au nom de l’ordre hospitalier de Saint-Jean-de-Dieu, propriétaire de l’établissement. Quatre ans plus tard, en 1938, l’Italie fasciste adopte des lois antisémites. Pour autant, le médecin juif Vittorio Emanuele Sacerdoti continue à travailler à l’hôpital grâce à de faux papiers, avec l’autorisation de Borromeo.

On est alors en pleine Seconde Guerre Mondiale et l’Italie est sous occupation nazie. Le 16 octobre 1943, la rafle du ghetto de Rome a lieu, et les nazis déportent plus de 1200 juifs vers le camp d’extermination d’Auschwitz, en Pologne. Les réchappés trouveront refuge dans le fameux hôpital Fatebenefratelli. Alors que les nazis tentent de fouiller l’hôpital à la recherches des fugitifs, Giovanni Borromeo les met en garde. De nombreux patients seraient en effet atteint d’une nouvelle maladie, le syndrome K, et ils sont tous confinés dans un service dédié de l’hôpital. Les nazis font donc rapidement demi-tour et ne reviendront plus jamais à l’hôpital.

hôpital Fatebenefratelli - Cultea
L’hôpital Fatebenefratelli sur l’île Tibérine à Rome.

Le syndrome K

D’après le médecin-chef Borromeo, des premiers cas de syndrome K seraient apparus à la fin de l’été 1943. Il avance que c’est une maladie neurologique très contagieuse, et même mortelle. Parmi les symptômes, on retrouve des convulsions, de la démence suivie d’une paralysie progressive et, finalement, la mort par asphyxie. Le docteur nomme cette maladie le syndrome K (Il Morbo di K en italien) en référence à la bacille de Koch, bactérie entrainant la tuberculose, ou à la maladie de Krebs. Mais en fait, cette maladie est inventée de toute pièce ! L’objectif est en effet d’empêcher les nazis de pénétrer dans l’enceinte afin de protéger les juifs des déportations.

Si Borromeo a choisi d’appeler la maladie syndrome K, c’est plus en lien avec les noms des chefs nazis. En effet, la personne dirigeant les troupes à Rome s’appelle Albert Kesselring. De plus, Herbert Kappler est l’actuel chef de la police de la ville.

Giovanni Borromeo - Cultea
Le docteur Giovanni Borromeo.

Un subterfuge pour éloigner les nazis

La grippe espagnole ayant décimé la population environ 20 ans avant, personne ne veut d’une nouvelle épidémie. Alors, de peur de contracter la maladie, les nazis restent éloignés de l’hôpital. En plus de cela, on conseille aux personnes réfugiées dans l’hôpital de paraître malade et de tousser fort. De tels symptômes, semblables à ceux de la tuberculose, assurent l’absence des nazis.

L’hôpital ne protège pas que les juifs, puisqu’il accueille aussi des opposants politiques. En plus de cela, il délivre des faux documents à des familles entières pour leur permettre de quitter la ville. Celles-ci trouveront par la suite refuge dans des monastères de campagne. Par la suite, un émetteur radio clandestin installé au sous-sol de l’hôpital relie la structure avec le général Roberto Lordi de la Regia Aeronautica. 

Résister face aux nazis

Borromeo n’a toutefois pas travaillé seul. Il a en outre reçu l’aide de Sacerdoti et du docteur Adriano Ossicini dans la mise en place de son stratagème. Ossicini a raconté dans le journal italien La Stampa : 

« Le syndrome K était mentionné sur le dossier du patient pour indiquer que la personne malade n’était pas malade du tout, mais juive. Nous avons créé ces documents pour les Juifs comme s’ils étaient des patients ordinaires, et au moment où nous devions diagnostiquer la maladie dans les dossiers, nous indiquions que c’était le syndrome K. Ils étaient tous en bonne santé, c’était juste un code qui signifiait secrètement que ces personnes étaient cachées dans l’hôpital ! »

Adriano Ossicini - Cultea
Le docteur Adriano Ossicini, dans le laboratoire de l’hôpital Fatebenefratelli, dans les années 1940.

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement italien félicita Borromeo pour son action. Il fut également reconnu Juste parmi les nations et inscrit au mémorial de Yad Vashem en 2004. Enfin, en 2016, l’hôpital Fatebenefratelli reçut le titre de « Maison de vie ».

L’hôpital fut malheureusement attaqué en juin 1944 et 5 Juifs de Pologne furent arrêtés. Cependant, la maladie imaginaire du syndrome K permit de sauver environ 100 réfugiés des nazis

 

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Sources :

 

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