Gavrilo Princip : l’adolescent qui a précipité l’Europe dans la Première Guerre mondiale

Gavrilo Princip : l'adolescent qui a précipité l'Europe dans la Première Guerre mondiale - Cultea

Le 28 juin 1914, l’histoire de l’Europe prend un tournant. Deux coups de feu sont tirés par un jeune étudiant serbe de Bosnie, nommé Gavrilo Princip. Son acte entraînera la chute des empires et fera basculer l’Europe dans la Grande Guerre. Il est désormais une figure controversée, tandis que l’histoire cherche encore à savoir s’il fut un héros ou un terroriste.

En ce jour du 28 juin 1914 à Sarajevo, il est bientôt 11h lorsque deux coups de feu retentissent. Ces coups de feu ont atteint deux personnes, et pas n’importe qui. François Ferdinand, héritier de l’Empire austro-hongrois, et sa femme Sophie de Hohenberg, sont mortellement touchés par les tirs. Ce jour-là, il ne le sait pas encore, mais Gavrilo Princip vient de déclencher un compte à rebours. Celui qui entraînera l’Europe dans un conflit mondial. En effet, ce double assassinat fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase des tensions internationales…

Qui était Gavrilo Princip ?

L’assassin qui a changé le cours de l’histoire s’appelle Gavrilo Princip. Ce dernier est né en Bosnie en 1894, à Obljaj, un village désolé et reculé en plein milieu des montagnes. De fait, son enfance fut marquée par la pauvreté et la misère, comme la plupart des Serbes de Bosnie. Il est issu d’une famille de neuf enfants. Malheureusement, seuls lui et son frère aîné survivront.

« Six de ses frères et sœurs sont morts alors qu’ils étaient bébés ou enfants à cause de la pauvreté endurée par sa famille. »

Tim Butcher dans son livre « The Trigger »

Son enfance dramatique et misérable le marqua profondément. Malgré cela, le jeune garçon excellait à l’école. Il a appris à lire seul et a un penchant pour la lecture. Ainsi, en 1907, âgé de 13 ans, il rejoint son frère aîné à Sarajevo pour débuter des études. Là-bas, il se passionne pour la littérature et commence à fréquenter des cercles nationalistes. En 1910, il est témoin du suicide de Bogdan Zerajic – qui a tenté d’assassiner le gouverneur militaire de Bosnie, mais a échoué. Cette vision, bien que morbide, deviendra une inspiration majeure.

En 1911, un sentiment général de révolution plane dans l’air. Gavrilo Princip adhère à la société Jeune Bosnie (Mlada Bosna). Il est de moins en moins concentré en cours et finira par se faire expulser. En octobre 1912, alors que la première guerre Balkanique fait rage, l’ancien étudiant tente de s’enrôler dans l’armée serbe. Il part à Belgrade dans l’espoir de faire partie de la bataille. Seulement, l’adolescent a un physique trop fragile et il est refusé. Il reste alors sur place avec deux de ses amis, Cabrinovic et Grabez.

L’attentat de Sarajevo

En 1914, la nouvelle se répand que François Ferdinand – l’archiduc d’Autriche-Este – serait présent à Sarajevo cet été. Ce dernier a choisi la date du 28 juin pour se rendre dans la capitale, date de la bataille du Kosovo. Les Serbes bosniens prennent alors ce choix comme un affront, puisque cette date est empreinte d’émotions. De plus, le bruit courait que cette visite était une diversion pour une attaque de l’Autriche contre la Serbie. C’est alors que Gavrilo Princip et ses complices choisissent cette occasion pour assassiner l’héritier et mettre un terme à l’empire. Ainsi, la Main noire, une organisation secrète aux ramifications dans l’armée serbe, appuie Princip et ses complices en leur faisant passer la frontière bosniaque, direction Sarajevo. Là-bas, ils mèneront une vie « normale » dans l’attente du jour J. Ils ont même fait la fête, la veille de l’attentat.

« Ils avaient décidé d’avoir une soirée ordinaire afin de ne pas attirer l’attention sur eux. »

Slodoban Soja, historien bosnien

François-Ferdinand et Sophie à Sarajevo le 28 juin 1914 - Cultea
François-Ferdinand et Sophie à Sarajevo le 28 juin 1914 (Wikimedia Commons)

Dans la matinée du 28 juin 1914, François Ferdinand et sa femme montent à bord d’une décapotable. Ils se rendent à l’Hôtel de ville, accompagnés d’une protection policière réduite. Sur leur trajet, Gavrilo Princip et quatre complices les attendent. Tous sont armés de pistolets et de grenades, ainsi que d’une capsule de cyanure pour se suicider s’ils se font attraper par les autorités. Ils se placent tout le long de l’itinéraire emprunté par l’archiduc. Les trois premiers complices se figent lors du passage de la décapotable de François Ferdinand et laissent passer leur chance. Cabrinovic, lui, bien que nerveux, saisit l’occasion et jette une grenade. Seulement, par manque d’expérience, cette dernière explosera à l’arrière de la voiture alors que le chauffeur avait accéléré pour l’éviter.

Le double assassinat par Gavrilo Princip

Cabrinovic est arrêté immédiatement et sa capsule de cyanure n’aura pas réussi à le tuer. Face à cette tentative d’assassinat, l’archiduc décide de changer l’itinéraire lorsqu’ils repartent de l’Hôtel de ville, par mesure de sécurité. La chance sourit alors à l’adolescent lorsque, lors de ce trajet, le chauffeur se trompe de route et doit faire machine arrière. Un bouchon se crée et la voiture est immobilisée. Et, comme par hasard, Gavrilo Princip, qui était toujours dans le coin, se trouve désormais à proximité de la décapotable.

« Ce fut une erreur fatale ! » – Valerian Zujo

« L’archiduc lui a été servi sur un plateau. » – Slodoban Soja

Il n’hésite pas un instant et saisit la seconde chance qu’on lui offre. Gavrilo Princip fonce vers la voiture et tire sur ses passagers. François Ferdinand et sa femme ont été mortellement touchés, froidement assassinés par un jeune homme de 19 ans. Cet assassinat met le feu aux poudres en Europe et sera le premier domino à tomber, entraînant l’embrasement du continent. De fait, c’est cet assassinat qui est à l’origine de la Première Guerre mondiale.

Gavrilo Princip : héros ou assassin ?

« J’aspire à l’union de tous les Yougoslaves, sous quelque forme politique que ce soit, et à leur délivrance de l’Autriche. Le mobile principal était encore la vengeance pour toutes les souffrances que l’Autriche fait endurer au peuple. »

Gavrilo Princip, lors de son procès en 1914

Le procès de Sarajevo. Gavrilo Princip est assis au centre de la première rangée - Cultea
Le procès de Sarajevo. Princip est assis au centre de la première rangée.

Le garçon frêle au visage émacié fait face à son procès pour le double meurtre à Sarajevo, en octobre 1914. Ce dernier se présente comme un défenseur de la cause yougoslave et confie au tribunal ne pas regretter son geste, excepté pour la mort de l’épouse de François Ferdinand, un dommage collatéral. Tim Butcher tient à souligner ce fait dans son livre :

« Il ne voulait pas terroriser la population. Il voulait tuer un homme qui était perçu comme cruel et méprisant. Les terroristes, eux, tuent volontairement des civils pour instaurer la terreur. »

Plus d’un siècle plus tard, il renvoie encore cette image controversée. Pour certains, il est un héros national, tandis que pour d’autres, c’est purement et simplement un meurtrier. Comme il n’avait pas encore 20 ans au moment des faits, Gavrilo Princip échappe à la peine de mort. Il est alors envoyé en prison, celle de Theresienstadt, située dans l’actuelle République Tchèque.

Ce dernier ne vivra pas bien longtemps après avoir signé l’acte qui conduisit l’Europe droit vers la Grande Guerre. Il mourra en prison en 1918, des suites d’une tuberculose. Gavrilo Princip aurait écrit sur les murs de sa cellule, un dernier message : « Nos ombres s’en iront à Vienne. Errer à travers le Palais. En épouvantant les seigneurs. »

 

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