Akira Toriyama : le garnement du manga, toujours épris de liberté

Akira Toriyama : le garnement du manga, toujours épris de liberté

Le souvenir que le monde garde de lui ne serait sûrement pas pour lui déplaire… Akira Toriyama et ses œuvres évoquent immédiatement un rire et un enthousiasme débordant, jusque dans les cours d’école où l’on entend encore hurler les attaques de Dragon Ball, 30 ans après sa sortie. Ce passionné qui voulait avant tout faire rire et qui ne se prenait jamais au sérieux a touché du doigt l’immortalité des grands artistes. 

Toriyama, la forte tête…

Il y en aurait des tantōs pour approuver ce titre. Comme nous l’avions rappelé dans notre article concernant ce métier de responsable éditorial spécial, n’ayant pas vraiment d’équivalent en France, Akira Toriyama s’est parfois vengé d’eux de manière taquine. En effet, avec son caractère borné et son manque de respect des deadlines, le mangaka donnait des sueurs froides au Shōnen Jump ! Harcelé par ses tantōs, Akira Toriyama s’est inspiré de chacun d’eux pour créer ses méchants iconiques de Dragon Ball.

Vous pouvez situer qui était éditeur à l’époque par rapport aux personnages ennemis. Après avoir exercé ce poste pendant un moment, vous finissez par apparaître comme un ennemi.

Kazuhiko Torishima

Mais ce ne sont pas les premiers à avoir dû concilier avec la tête de mule qu’est Akira Toriyama. Dès la fin du lycée, ses propres parents n’ont pas réussi à l’empêcher de travailler dans le manga, malgré leur refus véhément. Puis, c’est en tant que designer qu’il se confrontera à ses supérieurs. Après deux ans de retards, de conflits avec sa hiérarchie, Toriyama démissionne.

Akira Toriyama : le garnement du manga, toujours épris de liberté

Même une fois reconnu comme un des mangakas les plus importants de tous les temps, Akira Toriyama continuera de faire preuve d’esprit de contradiction !

Quand je reçois une lettre d’un lecteur qui m’explique que mon dessin est devenu trop anguleux et qu’il préférait mon ancien style, ça me pousse presque à en rajouter. (rires)…

Akira Toriyama

…Qui ne se prenait pas la tête

Akira Toriyama n’a jamais caché être partisan du moindre effort. Drôle de choix, pour un homme paresseux que de devenir mangaka, lorsqu’on sait que ce métier croule sous le travail. Mais celui qui devait rendre près de 30 pages par semaine, lors de la publication de Dragon Ball dans le Shōnen Jump, faisait tout pour minimiser son travail.

À propos des dessins, je demandais souvent à maître Toriyama pourquoi le paysage était relativement clairsemé, et il me disait que dessiner des choses comme des villes était trop pénible. Je lui avais également demandé pourquoi les cheveux de Goku devenaient blancs quand il se transformait en Super Saiyan, et il m’avait répondu que c’était parce c’était trop fastidieux de noircir les cheveux. (rires)

Fuyuto Takeda – Tantō

Celui dont on admire la mise en scène dynamique et percutante, le trait efficace et les chara-designs inventifs, n’a clairement pas envie de sacrifier ses points forts pour des éléments qu’il considère facultatifs.

Selon ses propres mots, il ne prend jamais plus de plaisir que quand il innove, qu’il invente. Et si les univers dans lesquels évoluent ses personnages sont imaginaires, c’est qu’il s’agit pour lui d’un coup double ! Non seulement il ouvre la porte à un imaginaire débordant, mais il peut aussi s’affranchir des nombreuses recherches de références.

Dans Dr Slump, les décors étaient constitués de montagnes rondes et de quelques arbres. Je lui avais demandé « Pourquoi ce paysage ? » et il m’avait répondu « Parce que c’est le plus simple ».

Kazuhiko Torishima – Tantō

Un travailleur discret

Si la devise « pour vivre heureux, vivons caché » avait un visage, ce serait celui d’Akira Toriyama. Ou plutôt de son alter-ego recouvert d’un masque, qu’il dessine dans les avant-propos de ses œuvres. En effet, le mangaka n’a jamais été très sociable et se tient à l’écart des foules, recherchant le calme. Ainsi, il a toujours refusé de s’installer à Tokyo, malgré les demandes répétées de sa maison d’édition. Au grand dam de ses tantōs qui auraient été rassurés de l’avoir sous la main…

Même lors des grands événements, Toriyama se fait discret et ne se déplace pas. Ainsi, lorsque la France le fait Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres en 2019, la cérémonie se fait sans lui. Néanmoins, il accepte de donner des interviews régulières et se livre, comme beaucoup d’artistes, dans ses pages. Ses œuvres regorgent de clins d’œil au lecteur, de 4ème mur brisé, d’anecdotes sur sa vie… Sans compter que de son propre aveu, ses personnages lui ressemblent parfois dans leurs attitudes et leur caractère.

S’il s’éloigne de son public et de ses éditeurs, Toriyama se montre proche de ses collègues artistes. En effet, parmi ses amis, on compte plusieurs mangakas célèbres avec qui il collaborera parfois. Ainsi, avec Masakazu Katsura (Zetman, Video Girl Ai) qu’il connaît depuis l’enfance, il créera Trop forte, Sachié !! et Jiya. De son amitié avec Eiichiro Oda, naîtra Cross Epoch, un one-shot mélangeant Dragon Ball et One Piece.

Je l’admire tellement depuis que je suis enfant, alors je me souviens du jour où il m’a appelé par mon nom pour la première fois. Sur le chemin du retour depuis le jour où [il a] utilisé le mot ‘ami’ pour moi et Kishimoto, je me souviens avoir été ravi avec Kishimoto.

Eiichiro Oda

Pour Masashi Kishimoto (Naruto), Akira Toriyama est en plus d’un ami, un dieu du salut et un dieu du manga.

Quelques anecdotes sur Akira Toriyama.

  • Sa femme a trouvé le nom du Kamehameha :

Ma femme est celle qui a nommé le Kamehameha. Je me creusais la tête en disant « L’attaque spéciale de Kame-Sennin devrait s’appeler quelque-chose-ha, quelque-chose-ha. » et elle a dit « Pourquoi pas Kamehameha ? ». Ça sonnait bien, c’était idiot, et ça correspondait tout à fait à l’humeur de Kame-Sennin.

Akira Toriyama

  • Son illustration préférée de tous les temps sur Dragon Ball était celle-ci :

Autrefois, je jouais souvent à des jeux de rôles, mais quand vous commencez un RPG, ça prend beaucoup de temps. Donc je préfère jouer à de simples jeux de type action. Récemment, j’étais en train de jouer à Super Donkey Kong avec mes enfants quand Katsura-kun [un ami mangaka] est venu à la maison. Je lui ai dit « Merde, j’arrive pas à le finir. » et il m’a répondu « Je vais le finir pour toi. » C’est un vrai gamer.

Akira Toriyama

  • Il était lié à la SHUEISHA, sa maison d’édition, par un contrat à vie.
  • Il n’était pas fan des doublages de Dragon Ball :

Je n’en ai pas vu directement mais j’ai vu certains extraits qui ont été présentés dans un programme télé spécial. Ça faisait très bizarre, mais je me suis dit « Bah, pourquoi pas ? ». En particulier, j’ai vu une scène où Goku était en train de manger quelque chose et s’exclamait « Mmm. c’est bon ! » [en français], et je ne pouvais m’empêcher de penser que ça n’allait tout simplement pas bien ensemble. (rires)

Akira Toriyama

Au moment de son décès, le 01 Mars 2024, Akira Toriyama travaillait sur le retour de son manga Sand Land, adapté en animé et jeu-vidéo. Le mangaka, qui était scénariste sur la série Dragon Ball Super, ainsi que sur les films Broly et Super Hero, trouvait plus que jamais du plaisir dans le changement et la nouveauté.

Sources :

 

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