« Midnight Special » : un film de science-fiction indépendant à découvrir absolument [critique]

"Midnight Special" : un film de science-fiction indépendant à découvrir absolument [critique]

Que feriez-vous si votre enfant était doté de pouvoir surnaturels, faisant de lui la cible d’une secte ainsi que du gouvernement américain ? C’est à ce dilemme que nos personnages doivent faire face dans Midnight Special, un film de science-fiction unique en son genre, sorti en 2016 et réalisé par Jeff Nichols. Une œuvre d’une puissance folle, merveilleusement portée par ses interprètes, qui aurait mérité bien plus de reconnaissance à sa sortie. 

Synopsis : Alton, un jeune garçon de 8 ans, est séparé de ses parents et traité comme un « sauveur » par une secte, du fait de ses pouvoirs surnaturels. Roy, le père d’Alton, décide cependant de récupérer son fils de force, aidé par un de ses amis, Lucas, un ancien membre de la police d’Etat. Les deux hommes et le petit garçon se retrouvent alors en cavale, poursuivis par la secte ainsi que le FBI et la NSA, bien décidés à se servir du garçon comme d’une arme…

Un film qui vous attrape, et qui ne vous lâche plus 

Rares sont les introductions comme celle de Midnight Special ! Le film s’impose, dès ses premières minutes, comme une œuvre à la fois intimiste, oppressante et touchante. Malgré sa nature de film indépendant (et donc à faible budget), cette œuvre parvient à combiner son intimisme à des enjeux d’envergure mondiale, avec beaucoup de réalisme. Outre la paranoïa ambiante et son atmosphère très anxiogène, Midnight Special se démarque par sa musique. Jamais ostentatoire mais toujours parfaitement utilisée, la bande-son est peut-être l’élément qui nous immerge le plus rapidement dans l’histoire.

Si le synopsis est, de prime abord, peu original, le traitement qui en est fait s’impose comme un véritable tour de force. On ressent les influences de Steven Spielberg et de son film Rencontres du troisième type sur la mise en scène. À la différence près que le film de Nichols, malgré quelques touches d’espoir disséminées çà et là, convoque une noirceur et un nihilisme bien plus pénétrants.

Visuellement, Midnight Special brille par une approche minimaliste mais sans concessions. Nichols évite les excès d’effets spéciaux, préférant une ambiance très sombre, avec une lumière qui jaillit essentiellement par les yeux de l’enfant, rappelant que ce film est avant tout une affaire de regards : ceux qui jugent et ceux qui cherchent à comprendre.

Malgré une mise en scène qui n’hésite pas à prendre son temps, le film ne connaît aucun temps mort et nous maintient dans une tension constante. Entre les « fous de Dieu » d’un côté et les autorités américaines de l’autre, Alton, Roy et Lucas ne connaissent pas beaucoup de répit dans leur périple. Et les rares moments d’accalmie sont très vites perturbés par les pouvoirs incontrôlables d’Alton, mettant en danger tout son entourage… Bref, pas de répit pour les braves, ni pour les spectateurs, pour notre plus grand plaisir.

Un casting cinq étoiles, typique du réalisateur 

Jeff Nichols est un des réalisateurs indépendants sachant le mieux s’entourer à Hollywood. Ici, il fait appel aux talentueux Michael Shannon (Man of Steel), Joel Edgerton (Gatsby le Magnifique), Adam Driver (Star Wars 7, 8 et 9), Kirsten Dunst (Spiderman 1, 2 & 3) ou encore Jaeden Martell (ça 1 & 2). Et force est de constater que la performance du casting est l’une des autres grandes forces de Midnight Special. Les acteurs.trices accentuent avec brio l’impact émotionnel et l’intensité du récit. Jeff Nichols, fidèle à son approche centrée sur les personnages, s’est entouré d’acteurs capables de transmettre des émotions complexes avec subtilité.

Michael Shannon et Joel Edgerton nous offrent ainsi une performance à fleur de peau, où chacun doit faire preuve de douceur et de calme, dans un contexte pourtant propice à l’énervement et à la violence. Kirsten Dunst, bien trop rare à Hollywood mais toujours aussi talentueuse, brille par la sobriété de ses émotions et la force qui transparaît d’elle. Sans oublier Adam Driver, coqueluche d’Hollywood, à mille lieues du rôle de Kylo Ren, absolument parfait en agent du FBI timide et débonnaire. Mention spéciale également à Jaeden Martell, qui malgré son jeune âge ne démérite pas face à l’imposant casting qui l’accompagne, témoignant d’une intensité de jeu rare pour son âge.

Midnight Special : un film à réhabiliter 

Midnight Special est un film au budget anémique dans l’industrie hollywoodienne : à peine 18 millions de dollars. Oui, ça a l’air beaucoup dit comme ça, mais si l’on compare au reste de l’industrie, il s’agit d’un montant assez risible, surtout pour de la science-fiction. Avec aussi « peu » d’argent investi, on aurait pu espérer une forte rentabilité. Malgré cela, le film de Jeff Nichols fut un échec absolu au box-office ($7.7 millions de dollars). Des résultats tout bonnement déprimants, au vu de la qualité et de l’originalité de cette œuvre.

Pourtant, Midnight Special jouit d’une qualité rare pour un film d’auteur indépendant : son accessibilité. Pour beaucoup de spectateurs.trices, le terme de « cinéma indépendant » est un quasi repoussoir, une étiquette réservée à des cinéphiles plus aguerris. Mais là est la grande force de Jeff Nichols : faire beaucoup, avec peu de moyens. En se focalisant sur des personnages forts et des thèmes universels, il s’impose comme un des plus beaux films de 2016 et comme l’un des plus sous-cotés de ces dernières années.

Midnight Special est une œuvre qui mérite indubitablement une nouvelle attention. Dans un paysage cinématographique où la science-fiction est généralement synonyme de spectacle extravagant, Nichols nous prend à contrepied en signant un film intimiste, où l’intrigue se construit moins dans l’action que dans l’émotion. Une œuvre à la fois originale et universelle, portée par un casting cinq étoiles et une réalisation parfaitement maîtrisée. 

Midnight Special : bande-annonce (VOSTFR) 

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Journaliste, photographe et réalisateur indépendant, écrire et gérer Cultea est un immense plaisir et une de mes plus grandes fiertés.

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