Début 2023, il était possible de découvrir au musée Carnavalet (Paris) une exposition pour le moins fascinante sur l’histoire des engagements des femmes de 1789 à 2000. L’exposition Parisiennes citoyennes ! est un travail tout à la fois impressionnant et nécessaire, que nous avons eu le plaisir de découvrir.
200 ans d’émancipation des Parisiennes citoyennes !
L’exposition a rassemblé des supports très variés : peintures, gravures, sculptures, affiches, extraits de journaux, mais aussi des vidéos, des badges et des vêtements. L’idée est de témoigner des luttes des femmes entre 1789 et 2000. « Une synthèse inédite », insistent les commissaires de l’exposition. Le musée a vu les choses en grand. La commissaire scientifique extérieure n’est en effet autre que Christine Bard, enseignante-chercheuse à l’université d’Angers, spécialiste de l’histoire contemporaine des femmes.
Pourquoi de telles bornes chronologiques ? En 1789, a lieu la Marche des dames de la Halle à Versailles. Elles obtiennent le retour du roi Louis XVI à Paris. En 2000, la parité devient obligatoire dans les assemblées élues. L’exposition adopte un parcours chronologique. On relie plus facilement les combats des femmes à des contextes historiques bien précis. Tous les temps forts de la libération des femmes sont au rendez-vous : des salons des femmes révolutionnaires à la participation des femmes à l’effort de guerre, en passant par l’ouverture des écoles aux petites filles et par les suffragettes… Du Front Populaire aux luttes contre les violences sexuelles, en passant par la naissance du MLF et du Planning Familial et par l’essor du féminisme.
Nous constatons ainsi que, de la Révolution au début de la IIIe République (1871), les femmes prennent activement part aux bouleversements politiques que connaît la France. Nous mesurons également à quel point la Libération et Mai 68 ont été des moments d’émancipation pour les femmes.
L’exposition Parisiennes citoyennes ! porte bien son nom. Les archives exposées déclinent la citoyenneté sous tous ses aspects. Les commissaires insistent en effet sur les différents combats menés par les femmes pour exister dans l’espace public. Nous partons à la découverte de la place des femmes dans tous les domaines de la vie publique : la politique, les médias et les syndicats, bien sûr, mais aussi l’école, le sport, les arts ou encore la mode.
Une exposition vivante
Les salles regorgent de portraits. L’exposition est en effet très incarnée, on se représente ainsi plus facilement les faits. Parfois, on a même l’impression que ces femmes illustres nous parlent, tant l’exposition est vivante. On retrouve des noms connus : Olympe de Gouges, George Sand, Hubertine Auclert, Simone de Beauvoir, Gisèle Halimi et Simone Veil sont bien sûr de la partie. En revanche, on constate, non sans effroi, que beaucoup de noms sont absents des livres d’histoire ! Qui connaît Séverine, la première journaliste française professionnelle ? Qui a entendu parler de Natalie Barney et de son salon dédié à la culture lesbienne ?
Le parcours se veut interactif. Afin de permettre un dialogue encore plus vivant avec le public, le musée Carnavalet propose plusieurs tables rondes animées par des spécialistes de l’émancipation des femmes. Les commissaires ont veillé à représenter les femmes et leurs combats dans toute leur diversité. Des salles sont consacrées aux luttes plus récentes des femmes lesbiennes et racisées. Les derniers moments de l’exposition sont consacrés aux mouvements féministes contemporains qui dénoncent des inégalités structurelles.
Mais pourquoi toutes ces héroïnes n’ont-elles toujours pas leur place dans nos manuels d’histoire ? Telle est la question que l’on se pose en sortant de cette expo Parisiennes citoyennes. Cette promenade à travers 200 ans de luttes se révèle bien instructive et nous rappelle qu’ « il suffira d’une crise politique, économique et religieuse, pour que les droits des femmes, nos droits, soient remis en question. Votre vie durant, vous devrez demeurer vigilante. » (Simone de Beauvoir).