La chasse aux sorcières aux Etats-Unis et les procès de Salem sont très connus. Mais saviez-vous qu’avant les évènements de Salem, nous avons aussi eu en France notre propre chasse aux sorcières ? L’affaire des possédées de Loudun s’est déroulé dans les années 1630. Retour sur cet évènement étrange.
Les religieuses du couvent de Loudun possédées
En septembre 1632, trois religieuses, dont la mère supérieure Jeanne des Anges du couvent des Ursulines de Loudun, furent soudainement victimes d’hallucinations, certaines de gens morts et d’autres érotiques. Elles eurent ensuite des convulsions et blasphémèrent, insultant Dieu. A l’époque, cela ne faisait aucun doute, elles avaient sombré dans la possession démoniaque.
Malheureusement, ces crises de délire s’étendirent vite aux autres sœurs. Les nuits suivantes, la folie gagna quatorze autres religieuses. Le mal semblait alors inarrêtable. Elles se mirent à courir à moitié nue et à grimper aux arbres. Les crises, d’abord nocturnes, devinrent vite constantes. L’Eglise ne tarda donc pas à les déclarer officiellement possédées. On chercha même la marque du démon sur leur corps.
Les femmes subirent des exorcismes, d’abord privés puis en public, au cours desquels elles furent formelles : le fantôme qu’elles voyaient n’était autre que le curé de la ville, Urbain Grandier, un ennemi du cardinal Richelieu. Ce prêtre officiait dans la ville de Loudun et était connu pour avoir un don pour la parole et un certain charisme. Il avait une réputation de séducteur. Jeanne des Anges avait proposé au curé de devenir le confesseur de la communauté mais il refusa la proposition. Suite à cela, les religieuses accusèrent Urbain d’obscénités et de les avoir ensorcelées et contraintes à tomber amoureuses de lui.
Urbain Grandier, le bouc-émissaire
Urbain Grandier fut au centre d’un premier procès qui finit par l’acquitter. Toutefois, l’enquête s’intensifia. En 1633, à la suite d’un Conseil du Roi de France, Louis XIII à l’époque, une commission spéciale fut instaurée, composée de 12 magistrats, pour enquêter sur le prêtre. L’Eglise arrêta, emprisonna, interrogea et tortura même Urbain Grandier. On trouva chez lui un pacte avec le diable, prétendument signé par le prêtre et par des démons.
Le cardinal de Richelieu décida donc d’organiser un second procès en prenant en compte les nouvelles trouvailles. Les sœurs finirent par rétracter leurs aveux et Urbain continua de clamer haut et fort son innocence. Toutefois, les différents documents ainsi que les témoignages constituèrent des preuves irréfutables pour les autorités de l’Eglise et prouvèrent sa culpabilité. Il fut condamné au bûcher en août 1634 et fut brûlé vif. Des milliers de personnes de la ville et des alentours se rassemblèrent pour assister à son exécution.
Malgré la mort du prêtre, l’épidémie de possessions s’étendit à d’autres nonnes et même à la population civile. Les exorcismes, certains en public, se multiplièrent pendant plusieurs années et les spectateurs de ses démonstrations furent toujours plus nombreux. Les possessions durèrent jusqu’en 1637 et la guérison de Jeanne des Anges. Les cas de crises diminuèrent alors peu à peu. Jeanne fut ensuite considérée comme une sainte et fut même présentée à la Cour royale.
Les raisons de l’affaire des possédées de Loudun
Les explications et responsabilités de cette affaire son multiples et le théories sont donc légion. Il est possible que la sœur Jeanne des Anges ait accusé Urbain Grandier par jalousie, lui qui était un séducteur notoire. Certaines religieuses accusèrent également un adversaire de Grandier de les avoir encouragées à l’incriminer. Par ailleurs, à l’époque, une communauté religieuse reconnue comme possédée pouvait obtenir une compensation de la part du Roi pour palier à la mauvaise réputation que cela engendrait. Il est donc possible que le couvent des Ursulines ait tenté de servir ses propres intérêts.
Concernant les intérêts personnels, il est également possible que le cardinal de Richelieu ait cherché à se débarrasser d’un opposant. En effet, Urbain Grandier avait publié un violent texte contre le cardinal Richelieu, qu’il critiquait beaucoup. Par ailleurs, le prêtre tolérait les protestants, ce qui put jouer contre lui.
Enfin, il est possible que, comme pour l’épidémie dansante de Strasbourg, la détresse psychologique de la société ait causé cette hystérie collective. En effet, au début de l’année 1632, une épidémie de peste frappa la ville de Loudun et fit près de 4 000 victimes, soit plus d’un habitant sur quatre.
Finalement, l’affaire des possédées de Loudun au XVIIème siècle fut une folie contagieuse qui mena à une grande chasse aux sorcières orchestrée par le cardinal de Richelieu. Alors, véritable possession ou stratégie planifiée ? On ne le saura pas pour sûr, une part de mystère demeure encore aujourd’hui.
Découvrez également une autre affaire célèbre, l’affaire du pain maudit.
Sources :
- Wikipédia – Affaire des démons de Loudun
- France Culture – Les possédées de Loudun : histoire d’une société malade d’elle-même
- Histoire pour tous – L’affaire des possédées de Loudun (1630-1634)
- Futura Sciences – Quelle est l’histoire des possédées de Loudun au XVIIe siècle ?
- Le Monde – Erotomanie en série chez les ursulines
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