Le 25 novembre 1915, Albert Einstein présente sa théorie de la relativité générale à l’Académie royale des sciences de Prusse. Celle-ci permet enfin de réconcilier la théorie de la relativité restreinte avec les lois de gravitation newtonienne. Tout cela est bien formidable. Mais qu’est-ce que cela signifie vraiment ? Pourquoi cette théorie, considérée comme une des plus importantes du XXe siècle, voire même de l’histoire de l’Humanité, est-elle si nécessaire pour décrire le monde qui nous entoure ?
Petit tour d’horizon vulgarisé de la physique en 1905
En 1905, Albert Einstein propose une théorie, celle de la relativité restreinte. Concrètement, que contient-elle ? Tout d’abord, la fameuse équation E = mc². Bien qu’elle soit la formule la plus connue, nous allons la mettre de côté puisqu’elle n’est en fait pas au cœur de la théorie.
Ensuite, la théorie de la relativité restreinte apporte des outils mathématiques supplémentaires à la relativité galiléenne. Cette dernière permettait de formaliser le fait qu’un voyageur dans une cale d’un bateau ne pourrait être capable de deviner si ce bateau avance à vitesse constante ou s’il est immobile (bien évidemment, sans hublot pour le vérifier). Cela fonctionne aussi avec le TGV, et tout autre système en vitesse constante et en « ligne droite ».
Enfin (en tout cas, dans les principes simples), la théorie d’Einstein définit le temps comme une dimension « relative », et non absolue. Présent dans un grand nombre de livres ou films de science-fiction (dernièrement Interstellar de Christopher Nolan), cela permet de poser le fait que deux objets voyageant à des vitesses différentes verront le temps s’appliquer différemment sur eux. Deux horloges synchronisées se désynchroniseront, si l’une observe une vitesse différente de l’autre. Cela donnera en 1911 le paradoxe des jumeaux de Paul Langevin.
Nous n’allons pas nous attarder sur d’autres principes, mais sachez que si vous souhaitez en savoir plus, vous pouvez toujours écouter le physicien Etienne Klein dans sa vidéo sur la relativité restreinte.
Une physique à réconcilier
Mais voilà, cette théorie de la relativité restreinte pose un autre problème. En effet, elle déclare que rien ne peut aller plus vite que la vitesse de la lumière dans le vide. C’est une valeur plafond, qui rend les moteurs supraluminiques de bon nombre de livres de SF incompatibles avec notre univers.
Pourquoi cela dérange-t-il ?
Et bien, Newton, dans sa loi sur la mécanique gravitationnelle, indique que deux objets (prenons deux planètes) voient s’appliquer une force qui les rapproche, dépendant de leurs masses et de la distance qui les sépare. Et dans l’expression de sa loi, Isaac Newton applique un principe d’immédiateté. C’est-à-dire que deux objets apparaissant soudainement à 1 année-lumière de distance l’un de l’autre verrons cette force s’appliquer immédiatement. Ce qui implique que l’information de leur distance a été immédiate, plus rapide que la lumière.
Impossible, dit la relativité restreinte ! Il se trouve également que les mouvements des objets célestes observés vont avoir des trajectoires légèrement différentes à celles prévues par les calculs. Einstein part donc à la recherche d’une nouvelle théorie.
La relativité générale, et la courbure d’espace-temps
Attaquons-nous à cette fameuse théorie !
De la manière la plus simple possible : imaginons que l’univers soit une nappe (à carreaux, à fleurs, selon votre goût) tendue. Si on pose une planète sur cette nappe tendue, la nappe va se creuser localement, là où se trouve la masse. Juste autour de celle-ci, la nappe sera donc déformée. Plus on s’en éloignera, plus la déformation de la nappe sera minime.
Tel est le principe de la relativité générale : la nappe représente l’espace et le temps, qui se déforment à proximité d’une masse. Plus celle-ci est grosse, plus la déformation est grande. La trajectoire de la lumière, que l’on considérait jusque-là comme rectiligne, se courbe donc à l’approche d’une masse, selon le principe que l’espace est déformé autour de celle-ci.
Quid de l’immédiateté de l’information de la gravitation de Newton ? Elle se transforme en principe d’onde gravitationnelle. Comme un bateau fendant la mer en dispersant des vagues autour de lui, le déplacement d’une masse dans l’espace-temps créerait des ondes qui se déplacent à la vitesse de la lumière.
Rectification d’Einstein : la constante cosmologique
Tout lot de découverte vient avec ses critiques et ses limites. En 1915, Einstein est persuadé que l’univers était statique et éternel. Or, la première équation impliquait que l’espace est fonction du temps. Plus clairement, plus le temps passe, plus l’espace grandit. Alors, comme l’univers « doit » être statique, en 1917, il ajoute à l’équation une constante, dite constante cosmologique.
Qu’importe, en 1922, le physicien Alexander Friedmann démontre mathématiquement que cette constante n’est pas incompatible avec un univers en expansion. Cinq ans plus tard, Georges Lemaître combine équations et observations pour montrer que l’univers est bel et bien dynamique. En 1932, Albert Einstein admet ce qu’il qualifie de la « plus grosse erreur de sa vie », et proposera une équation qui remet cette constante à 0.
Mais en 1998, retournement de situation cosmologique ! Là où l’on pensait que l’univers grandissait à une vitesse constante, on observe ce que l’on pense être une accélération de son expansion ! Plusieurs hypothèses sont mises sur le tapis (où la nappe précédemment citée), dont la réutilisation de la constante cosmologique, utilisée cette fois-ci non plus pour annuler son agrandissement mais pour l’amplifier.
Affaire à suivre donc !
L’équation d’Einstein, à quoi ressemble-t-elle ?
Même si cela doit paraître extrêmement clair à la plupart d’entre vous, essayons de l’expliquer. Pour faire très simple, les éléments à gauche décrivent la géométrie de l’espace-temps, sa forme. À droite de l’équation, se trouve le contenu en masse et en énergie de l’espace-temps. Ainsi, on voit que la forme de l’espace-temps dépend directement de la masse et de l’énergie qu’il contient. Et si vous trouvez cela trop simple, un article un peu plus complet (et plus complexe…) vous apportera des d’informations supplémentaires.
La relativité générale et la physique quantique, deux cousines fâchées
La relativité générale serait-elle donc la description parfaite de notre univers ? Pas vraiment. En fait, elle définit parfaitement l’univers visible, la physique des masses et des astres. Mais un aspect de notre monde résiste encore et toujours à l’envahisseur. J’ai nommé… la physique quantique !
La physique quantique décrit l’univers de l’infiniment petit. En effet, la physique des particules ne peut être expliquée avec les lois de la physique dite « classique ». Le centre des trous noirs, par exemple, échappe complétement aux règles de la relativité. La théorie capable de réunir les deux reste encore à être trouvée, si elle existe…
La théorie de la relativité générale est la description la plus complète que nous ayons de l’univers observable. De sa découverte découlent tout un tas d’applications, notamment les GPS, grâce à la compréhension de la distorsion du temps entre la Terre et les satellites qui gravitent autour. Mais comme souvent, il faut partir du principe que c’est la meilleure description « actuelle » de l’univers. En attendant peut-être de nouvelles découvertes, de nouvelles observations, elle est un rappel que le XXe siècle fut un siècle de bouleversement dans la compréhension du monde qui nous entoure.
7 Replies to “Pour ses 105 ans, comprenons la théorie de la relativité générale d’Albert Einstein !”