Le cœur séparé du corps : l’étrange coutume funéraire des rois de France

Anaïs Girard
Anaïs Girard
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À partir du Moyen-Âge, à la mort d’une personnalité de haut rang, il y avait pour coutume de séparer le cœur du reste du corps. Cette tradition était le plus souvent réservée aux membres de la famille royale, dans le Royaume de France.  

Au temps des rois de France, il fallait avoir le cœur bien accroché. Pas question de faire durer l’éternité, il fallait avoir sa Majesté en odeur de sainteté. En plus d’éliminer les émanations désagréables dégagées par le cadavre et de retarder sa décomposition, cette coutume funéraire est riche en symboles. Elle a été popularisée à la mort du roi Philippe III le Hardi puis à celle de Philippe IV le Bel, c’est-à-dire à partir du XIIIème siècle.

Statue funéraire du roi Charles V à la Basilique de Saint-Denis, nécropole des rois de France. © Wikimedia Commons

On appelle cette pratique la tripartition. Plus exactement, elle consiste à retirer le cœur et les entrailles du mort, alors mis dans des « gisants », des sculptures dédiées à chacune des parties : le corps, le cœur et les entrailles. Répartir les viscères dans plusieurs lieux de sépulture permettait en effet de décupler les cérémonies en l’honneur du Roi. 

Le cœur, une relique palpitante

Au centre de la vie humaine, l’organe vital tenait un rôle important dans la cérémonie mortuaire. Après son ablation, le cœur du roi ou de la reine était embaumé. Pour ce faire, il était macéré dans des arômes et dans de l’alcool, le plus souvent de l’huile de vin. Avec sa forte résonance religieuse dans la chrétienté, le cœur est une pièce maîtresse, le « lieu de foi ». En effet, il est la représentation de l’âme de Jésus.

Analyses de l’écrin du cœur d’Anne de Bretagne. © Musée Dobrée

L’organe est ensuite conservé dans un reliquaire, le cardiotaphe, qu’on appelle aussi le « tombeau du cœur. » Chaque cardiotaphe est unique, à l’image de celui d’Anne de Bretagne, véritable écrin en tôle d’or, autrefois gardé dans la chapelle des Carmes, à Nantes. Mais c’est à l’église du Val-de-Grâce qu’ont longtemps reposé les cœurs de quarante-cinq membres de la famille royale, comme Anne d’Autriche et Philippe Ier d’Orléans

Par la suite, la Révolution française a mis à mort toutes les représentations de la monarchie, entraînant le pillage et la profanation des églises. Certains cardiotaphes ont néanmoins survécu, tels que ceux des Condé, préservés avec soin dans la chapelle de Chantilly.      

 

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