Alan Turing, pionnier de l’informatique au destin tragique

Alan Turing, pionnier de l'informatique au destin tragique

Alan Turing est l’un des premiers hommes informaticiens des années 1930. Avec plusieurs diplômes en poche, il fut sollicité plusieurs fois pour aider son pays lors de la Seconde Guerre mondiale. Souvent considéré comme l’un des pères de l’informatique moderne, il a joué un rôle déterminant grâce à son travail sur le décryptage du code Enigma, utilisé par l’Allemagne nazie. Pourtant, malgré ses contributions inestimables, il fut victime d’une persécution systémique après le conflit, en raison de son homosexualité, alors illégale au Royaume-Uni à l’époque. Retour sur son histoire… 

Quelques mots sur Alan Turing

Né en 1912, Turing était un passionné de mathématiques, arrivant à se faire admettre par le King’s College, université prestigieuse de Cambridge en 1931. Dès son plus jeune âge, il manifesta un talent exceptionnel pour les mathématiques et les sciences. Son esprit brillant le distingua rapidement des autres, bien que son parcours scolaire ait été marqué par un certain manque d’adaptation au système traditionnel.

Il rédigea une thèse de doctorat sur les mathématiques entre 1936 et 1938 à l’université de Priceton dans le New Jersey. Dès les années 30, le travail d’Alan Turing jeta les bases de l’informatique moderne. On pense notamment à son article scientifique révolutionnaire intitulé On Computable Numbers, with an Application to the Entscheidungsproblem, où il conceptualisa un dispositif théorique, désormais connu comme la machine de Turing. Lorsque la guerre fut déclarée en 1939, il suivit des cours au Government Code and Cypher School. C’est ici que tout va commencer. Turing et ses collègues vont peu à peu craquer les codes de la machine Enigma pour déjouer les nazis.

La machine Enigma

La machine Enigma avait été inventé vingt ans plus tôt par l’ingénieur électricien allemand Arthur Scherbius. Elle servait à la base à déchiffrer des messages commerciaux. Elle se présente sous la forme d’une machine à écrire. Mais grâce à un système ingénieux, la machine à écrire toute simple devenait une vraie machine de guerre. En effet, les lettres écrites initialement sur le clavier se transformaient en une autre lettre.

Alan Turing

C’est avec les « rotors », des disques de fer qui tournaient entre eux que ces messages étaient codés. C’est ce qui a inventé les messages codés modernes. Ce qui est d’autant plus astucieux, c’est que cette machine ne fournissait jamais le même codes. Elle a généré en tout plus de 159 quintillions de permutations. Pour lire les messages, le destinataire devait posséder la même machine et taper le code chiffré, qui était déchiffrable grâce à un tableau lumineux qui remettait le message voulu.

Alan Turing : un homme d’une aide précieuse dans l’effort de décryptage 

Grâce à la collaboration entre certains mathématiciens polonais et français, la machine Enigma a été partiellement craquée. Mais les Allemands parviennent à renforcer leurs codes en augmentant par conséquent le nombre de possibilités. Sept mille personnes sont sur le coup de la machine Enigma. Et pourtant seulement une va sortir du lot : Alan Turing. 

Avec William Gordon Welchman, ils vont reproduire les « rotors » d’Enigma. Grâce à cela, ils peuvent décoder les messages transmis. Leurs « rotors » qu’ils ont appelés « bombes » peuvent tester jusqu’à vingt mille configurations par seconde. Ils testent ainsi des milliers de combinaisons possibles. En 1942, la machine Enigma se voit améliorée, mais le génie de Tuning perce ses secrets, et Enigma se voir définitivement décodée. La machine Enigma a cessé d’être produite par la suite. De nombreux collectionneurs en ont en leur possession, et on peut en retrouver certaines dans des musées. Toutefois, l’histoire de Turing par la suite fut passablement tragique…

Exemple de machine Enigma.

La persécution d’après-guerre 

En 1952, malgré ses contributions à l’effort de guerre, Alan Turing fut arrêté après que la police eût découvert sa relation avec un jeune homme, Arnold Murray. À cette époque, les relations homosexuelles étaient encore considérées comme un crime en vertu des lois britanniques sur la « grossière indécence » (issues du Criminal Law Amendment Act de 1885). Plutôt que de nier les faits, Turing admit ouvertement sa relation. Il fut alors inculpé et condamné.

Plutôt que de purger une peine de prison, il choisit une alternative imposée par le tribunal : la castration chimique. Cette « thérapie » consistait en des injections d’œstrogènes destinées à réduire sa libido. Un traitement qui avait des effets secondaires graves, notamment une prise de poids, une gynécomastie (développement de la poitrine chez les hommes) et des troubles psychologiques.

En tant que condamné, Alan Turing perdit également son autorisation à travailler sur des projets de cryptographie ou toute activité liée à la défense nationale. Cela mit fin à son rôle clé dans le développement des technologies qu’il avait aidé à concevoir. À cela s’ajouta une stigmatisation sociale, conduisant à isoler encore plus le chercheur.

Le 7 juin 1954, Alan Turing fut retrouvé mort chez lui, empoisonné au cyanure. Près de son corps se trouvait une pomme croquée, ce qui mena certains à spéculer sur le fait qu’il se soit inspiré du conte de Blanche-Neige, qu’il affectionnait particulièrement. L’enquête conclut à un suicide, bien que certains théorisent encore sur un accident, voire un meurtre déguisé. En 2009, le Premier ministre britannique Gordon Brown présenta des excuses officielles au nom du gouvernement pour le traitement réservé à Alan Turing. Et en 2013, il fut gracié à titre posthume par la reine Elizabeth II. Un an plus tard, en 2014, sortit le film Imitation Game avec Benedict Cumberbatch, retraçant sa carrière. 

Sources : 

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