Dans le genre du survival-horror, Silent Hill 2 est une véritable œuvre d’art abordant des thématiques difficiles avec une grande intelligence. Plus cérébral que la majorité de ses concurrents, le titre de Konami parvient à montrer une image glaciale, mais juste, d’une survivante d’abus en la personne d’Angela Orosco. On vous en dit plus.
Nota Bene : Cet article est une analyse autour d’un personnage de Silent Hill 2, il n’a pas vocation à remplacer un spécialiste ou à avoir un quelconque point de vue politique.
Traitant de la culpabilité et du traumatisme, Silent Hill 2 se dévoile bien plus par ses personnages à mesure que le protagoniste dépérit. Cette galerie de personnages étranges définit le dégoût de soi, la déchéance, la dépression ou tout simplement la volonté de vivre. La ville de l’horreur, elle-même personnage du jeu, se transforme au fur et à mesure que James Sunderland se rapproche de sa vérité. Dans ce cauchemar cérébral, il fait alors la rencontre d’une jeune femme à la recherche de sa mère…
Angela Orosco est l’un des rares humains que l’on rencontre dans Silent Hill 2. Si ses apparitions sont assez courtes, elle marque l’esprit des joueurs. Elle est la preuve que le jeu vidéo peut aborder les thématiques les plus controversées, puisqu’on peut voir en elle les conséquences des abus incestueux.
L’image la plus représentative d’une survivante d’abus ?
Angela souffre de tics vocaux et de stress post-traumatique. Elle est tétanisée et a tendance à s’excuser en permanence lorsque James vient à sa rencontre. Son comportement et son physique en disent beaucoup sur son vécu. Bien qu’elle possède la silhouette et la voix d’une femme bien plus âgée, Angela n’a en réalité que 19 ans.
Dans la ville de Silent Hill, la jeune femme recherche désespérément sa mère, qu’elle préfère appeler « maman » à l’instar d’une petite fille. Une mère qui a contribué à sa déchéance en lui faisant croire qu’elle méritait tous les abus. En l’appelant ainsi, cela lui permet de se rattacher à une autre réalité dans laquelle sa mère se soucierait encore d’elle. A chaque fois qu’elle ressent le besoin de se défendre, Angela se comporte comme une enfant.
Au cours du difficile périple, James peut lire un article de presse retraçant l’assassinat de Thomas Orosco. Cet homme n’est autre que le père d’Angela. Survient ensuite l’affrontement dérangeant contre le monstre qui la persécute. Son père prend alors l’apparence d’un lit constitué de chairs humaines. Abstract Daddy est le symbole de l’innocence volée d’Angela. Si c’est bien James qui affrontera cette monstruosité, ce sera pourtant la survivante qui en finira une bonne fois pour toutes.
Angela et la conception de son enfer
Après ce combat, il ne reste alors plus qu’à mettre fin à la double peine d’Angela. La première est d’être perçue comme une hystérique tout au long du jeu. La seconde est de la faire paraître coupable d’être la prétendue mauvaise petite fille que ses parents décrivent. Malheureusement, la culpabilité semble beaucoup trop forte.
Dans Silent Hill 2, Angela est l’incarnation de l’enfance brisée. Elle est souvent dissociée lors de ses courtes apparitions, se culpabilisant en permanence lorsque James tente de la rassurer. Puis, lors de sa dernière apparition, elle devient « insupportable » devant lui. James sait pertinemment qu’il ne peut pas l’aider.
Elle lui reproche d’être égoïste et d’être un homme mauvais. Comment lui en vouloir ? Elle a été brisée à maintes reprises et refuse de donner sa confiance. Impossible pour elle de ne pas voir en James un potentiel agresseur. Après tout, son esprit a créé un Pyramid Head qui agresse sexuellement des mannequins, et sa présence à Silent Hill prouve qu’il doit se faire pardonner d’un acte passé… James Sunderland n’a donc pas la représentation du héros que l’on souhaiterait, et Angela le lui rappelle bien !
« Tu as dit que ta femme Mary était morte, n’est-ce pas ? Menteur ! Je sais pour toi, tu ne voulais plus d’elle ! Tu as probablement trouvé quelqu’un d’autre ! »
En fait, il serait judicieux de voir Silent Hill comme une représentation de l’enfer pour Angela, finalement très proche de sa propre réalité : « Pour moi, c’est toujours comme ça ! », dit-elle en avançant vers les flammes. Il ne reste plus que le silence.
Il en résulte alors un fait encore plus dramatique : Angela n’était pas à Silent Hill pour être punie, mais parce qu’elle a toujours cru qu’elle devait l’être…
De nombreuses histoires dans le jeu vidéo traite du traumatisme et nous vous invitons à découvrir notre dossier sur ce sujet. En attendant, on souhaite de tout cœur que ce personnage ne soit pas oublié dans le remake à venir.
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