En 2016, à l’occasion du 150e anniversaire de la célèbre marque de whisky, Jack Daniel’s a rétabli la vérité sur sa conception. La marque a en effet révélé que son fondateur avait appris l’art de la distillation auprès de Nearis Green, un esclave de Dan Call. On vous parle des détails de cette révélation !
Depuis 150 ans, la marque avançait que Jack Daniel avait appris à distiller l’alcool dans le Tennessee, aux côtés de Dan Call. Celui-ci était un pasteur et épicier américain. En effet, le musée de la distillerie historique de la marque situé à Lynchburg racontait cette histoire. Pourtant, il semblerait que cette version ne soit pas la bonne…
La vérité derrière le Jack Daniel’s
En réalité, Jack Daniel aurait appris l’art de la distillation auprès de Nearis Green, un esclave de Dan Call. Ce dernier aurait en outre demandé à Green d’enseigner à Jack Daniel tout ce qu’il savait. La biographie du fabricant de whisky écrite par Ben A. Green et publiée en 1967 confirme cette histoire. En effet, Dan Call aurait dit :
« Oncle Nearest [Green] est le meilleur fabricant de whisky que je connaisse. »
Un an après l’abolition de l’esclavage aux Etats-Unis, Jack Daniel ouvre alors sa propre distillerie. Il y emploiera d’ailleurs deux des fils de Green. Désormais, le musée de la distillerie Jack Daniel’s met en avant cette histoire lors de certaines visites guidées. Pourtant, chose très étrange, les guides ne sont pas obligés d’en parler…
Nearis Green : une stratégie marketing ?
Certains dénoncent cependant la stratégie de communication de la part de la marque de whisky. En effet, en dévoilant cette vérité, la marque chercherait à intéresser de jeunes consommateurs de whisky, puisque ces derniers sont en général sensibles aux questions ethniques. Dans une interview accordée au New York Times, Peter Kreass, le biographe de Jack Daniel, explique :
« Dans les années 1980, leur cible était les yuppies. Je les ai vu passer au niveau supérieur avec les “millenials” [autrement nommés “génération Y”], qui sont sensibles aux problèmes sociaux. »
De l’autre côté, Nelson Eddy, historien de la distillerie Jack Daniel’s, défend la marque dans le Times :
« Il a fallu quelque chose comme l’anniversaire pour commencer à parler de nous-mêmes. »
De plus, l’entreprise prétend de jamais avoir voulu passer sous silence la vérité. Cependant, il semblait préférable à leurs yeux de ne pas trop de parler des origines esclavagistes d’une telle marque, principalement destinée à des consommateurs blancs.
Un cas non-isolé
Jack Daniel’s est loin d’être le seul à commencer à accorder plus d’importance à la place des Afro-Américains dans son histoire. C’est également le cas de la demeure historique de George Washington, située à Mount Vernon en Virginie. La structure a en effet mis en place une visite de la distillerie de l’ancien président. Celle-ci se concentre alors sur le rôle des six esclaves et des deux contremaîtres écossais qui travaillaient dans la distillerie.
Il faut savoir qu’à la fin du XVIIIe siècle, les fabricants de whisky du sud des Etats-Unis (actuels Tennessee et Kentucky) emmenaient avec eux leurs esclaves. De plus, ces fabricants vantaient les compétences de ceux-ci en distillation. Ces compétences provenaient en fait d’une autre tradition.
En outre, en Afrique, on fabriquait des alcools de fruits et de maïs. Malgré tout, aucune preuve matérielle n’existe quant à l’implication de ces esclaves dans la fabrication du whisky américain, les témoignages étant en majorité oraux. Toutefois, des fouilles archéologiques réalisées autour de la maison de Jack Jouett, un héros de la guerre de Sécession, pourraient confirmer le rôle des Afro-Américains dans ce domaine. Il semblerait d’ailleurs que ses esclaves aient eu leurs propres distilleries.
Enfin, on centre généralement l’origine du whisky américain sur les colons allemands, écossais, et irlandais. On raconte notamment que ces derniers distillaient les excédents de leurs céréales afin de créer cet alcool.
On est donc en droit de se demander si la révélation de Jack Daniel’s est coup marketing ou si l’entreprise a des intentions réellement louables. Dans tous les cas, rappeler l’implication des Afro-Américains dans le processus de fabrication du whisky reste une étape cruciale dans la reconnaissance du rôle des esclaves et on espère que d’autres secteurs suivront.
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