Le Québec : une terre historiquement déchirée entre Français et Anglais

David Jonathan
David Jonathan
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Suite à la conquête de la Nouvelle-France (qui deviendra le Québec) par la Grande-Bretagne durant la guerre de Sept Ans (1756-1763), une partie de la population, sans argent et admiratrice de la couronne française, revient en Europe. Le reste de la population, qui se sentait plus canadienne que française, prête alors allégeance à la couronne britannique.

L’échec de la Proclamation royale de 1763

La Proclamation royale d’octobre 1763 instaure la première structure politique établie par Londres. Elle met en place les règles politiques visant à assimiler la population française au peuple britannique. Elle fait reposer tout le pouvoir politique entre les mains d’un gouverneur nommé par Londres.

Mais l’agitation de ses colonies force bientôt l’Angleterre à modifier la Proclamation royale. Pour s’assurer la loyauté des Canadiens, elle proclame l’Acte de Québec en 1774. Elle abolit ainsi les lois établies par la Proclamation royale de 1763 pour faire disparaître toute trace du Royaume de France dans la population.

L’impact de la révolution américaine

L’Acte de Québec instaure au Canada les lois civiles françaises concernant des domaines particuliers. Il autorise le libre exercice du culte catholique, la perception de la dîme et l’accès des Canadiens aux fonctions publiques.

L’indépendance américaine (1783) provoque un afflux de colons américains « loyalistes » dans la vallée du Saint-Laurent. Cette situation nouvelle commande de nouveaux changements. L’Angleterre décide alors de diviser la Province du Québec en deux colonies :

  • Le Haut-Canada, où vivraient les colons anglais.
  • Le Bas-Canada, où les Canadiens français seraient largement majoritaires (143 000 en regard de 20 000 Anglais).

Pour chaque colonie, la Loi de 1791 instaure une Chambre d’Assemblée élue. Le pouvoir est limité dans les faits par un Conseil législatif non élu constitué surtout d’Anglais, et muni d’un droit de veto arbitraire sur toute décision de l’Assemblée.

Canadiens français vs Canadiens anglais

Dans le Bas-Canada, l’opposition inévitable entre les Canadiens français, maîtres de l’Assemblée, et les Anglais, qui contrôlent le Conseil législatif, débouche sur une série de querelles et de luttes pour le pouvoir politique.

Louis-Joseph Papineau apparaît donc comme le chef de file des Canadiens français qui se soulèvent en 1837-1838. Des Français combattent aux côtés des rebelles, tels que le « Général » Hindenlang, pendu par les Anglais avec d’autres patriotes, dont le jeune Chevalier de Lorimier. Mais la rébellion échoue.

Londres suspend alors la Constitution de 1791 et envoie un enquêteur spécial, Lord Durham. Celui-ci propose la mise en minorité des Canadiens français, en regroupant territorialement les populations anglophones du Bas (150 000 habitants) et du Haut-Canada (450 000 habitants), laissant les Canadiens français dans une partie moindre du territoire.

Dans un Canada uni, les Canadiens français (500 000 habitants) deviendraient une minorité qui ne pourrait plus empêcher l’édification durable d’un Canada anglais.

L’Acte d’Union

L’Acte d’Union (1840) vient abolir la séparation entre les deux Canada pour n’en former qu’un, uni et administré par un seul gouvernement. Les Canadiens français sont désormais minoritaires.

Déjà exclus du commerce par les Britanniques qui avaient pris en main la traite des fourrures, puis l’exploitation de la forêt, les Canadiens français, repliés sur leurs terres, s’enracinent peu à peu dans une économie et un écosystème basés seulement sur l’agriculture, allant à contre-courant de la Révolution industrielle se propageant en Europe et dans le monde.

Alors que s’annonçait l’expansion industrielle, ils ne pouvaient ainsi que fournir la main-d’œuvre ouvrière dans les usines bâties par les Britanniques.

Ainsi se forge la physionomie du Québec. D’une part, les Canadiens français dominant par leur nombre, massivement répandus dans les campagnes. Le trop-plein commençait à se déverser dans les villes telles que Montréal pour former un prolétariat ouvrier. D’autre part, les Britanniques, dominant par la fortune et maîtres de l’économie. Par ailleurs, l’échec de la rébellion entraîne le recul des idées libérales d’avant 1837. Ce contexte de nationalisme défensif va rendre la formule de Gouvernement fédéral envisageable.

Sources : 

  • Jean-Claude Castex, Dictionnaire des batailles terrestres Franco-Anglaises de la guerre de Sept Ans, Québec, éditions Presses universitaires de Laval
  • Bernard Cottret, La Révolution américaine : La quête du bonheur 1763-1787, Paris, Perrin, 2003
  • L’acte d’Union
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