La DMZ, cette zone démilitarisée la mieux armée du monde

Eliott Lerat
Eliott Lerat
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La DMZ (demilitarized zone) est la ligne de démarcation entre les deux Corées. Cette dernière est scrupuleusement surveillée des deux côtés, en plus d’être lourdement armée. Certains y voient cependant une opportunité de s’échapper de la dictature.

Les origines de la DMZ

Cette ligne – synonyme de statu quo entre la Corée du Nord et la Corée du Sud – trouve son origine en 1945. À l’époque l’URSS et les États-Unis sont soucieux de conserver leur influence en Asie de l’Est. Ainsi, ils se sont partagé la péninsule coréenne à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Ce sont les Américains qui ont identifié le 38e parallèle comme ligne permettant un partage égal du territoire. Le lieu devient la frontière politique entre le Sud et le Nord de la Corée. Dans ses mémoires, Dean Rusk, colonel de l’état-major du général George Marshall, raconte :

« Ni [Charles Bonesteel] ni moi n’étions des experts du territoire coréen, mais il nous a semblé que Séoul, la capitale, devait être placée dans le territoire américain. […] À l’aide d’une carte du National Geographic, nous avons cherché au nord de Séoul une ligne de démarcation pratique, mais nous n’avons pas pu trouver de ligne géographique naturelle. Nous avons au lieu de cela repéré le 38e parallèle et avons décidé de recommander cette démarcation… [Nos chefs] l’ont acceptée sans trop de difficulté, et étonnamment, les Soviétiques aussi. »

Aux origines du conflit

La séparation en deux états distincts devient opérationnelle trois ans plus tard, en 1948. C’est cette scission qui provoquera dans un premier temps des tentatives de réunification, puis la guerre de Corée en 1950. Ce conflit de grande envergure, premier du genre lors de la Guerre Froide, ne changera rien à la situation. Alors que les combats s’arrêtent à la suite d’un accord de cessez-le-feu en 1953, le 38e parallèle reste la ligne symbolique de partage de la péninsule.

Plus de 2 millions de personnes ont perdu la vie dans ce conflit. Ce dernier semble n’avoir fait qu’accroître les antagonismes créés artificiellement par la séparation décidée par deux puissances étrangères. Débute alors la phase d’armement de la DMZ. Les deux côtés organisent la surveillance, et 70 ans plus tard, la DMZ n’a toujours pas bougé. La guerre n’est par ailleurs pas officiellement terminée. Les deux parties, espérant une réunification, n’ont jamais signé de traité de paix.

La DMZ, un lieu de passage ?

La DMZ est large de 4 km et s’étend sur 248 km de long, soit sur toute la largeur de la péninsule. Sur cette bande, une petite zone appelée Joint Security Area fait la jonction entre les deux pays. C’est là que se déroulent généralement les négociations entre le Sud et le Nord. Cette zone est pour certains soldats du Nord un lieu de fantasme, car elle représente la possibilité de s’échapper du pays. Il est cependant particulièrement compliqué de la traverser. Chaque défection de soldat se solde par des salves de tirs.

Plusieurs ont tenté leur chance, avec plus ou moins de succès. En 2017, un soldat nord-coréen qui tentait de s’échapper a été la cible de 40 coups de feu, dont 6 ont trouvé leur cible. M. Oh, 25 ans, fils de général, a survécu à ses blessures ; il a déclaré en 2018 ne ressentir aucun devoir de loyauté envers son pays.

L’une des frontières les plus surveillées au monde

La frontière avait également été le théâtre de coups de feu en 1984, faisant 3 morts au Nord et 1 au Sud. Les échanges avaient débuté alors qu’un étudiant moscovite avait traversé la frontière du Nord vers le Sud.

L’armée du Sud a par ailleurs trouvé des tunnels d’agression aux abords de la DMZ. Ceux-ci permettent aux raids venant de Corée du Nord de pénétrer le territoire ennemi.

Les nord-Coréens ne fuient cependant pas majoritairement par cette zone. 700 000 soldats nord-coréens la surveillent en permanence avec des fusils et des canons. De plus, son sol miné compte plus d’un million d’engins explosifs. La majorité des quelques 30 000 habitants qui ont réussi à fuir la dictature sont passés par le nord. En payant des passeurs, il possible de passer en Chine avant de s’échapper vers d’autres états.

Ligne symbolique de démarcation, la DMZ n’a pas bougé depuis 70 ans. Malgré les conflits, elle représente un avantage : c’est un sanctuaire pour les oiseaux migrateurs. Chaque année, des hérons et grues blanches séjournent dans sa flore préservée depuis 1953. Elle pourrait même intégrer le patrimoine mondial de l’UNESCO prochainement.

 

Sources :

 

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