La déferlante Minecraft en ce début d’année aura prouvé un changement de prisme majeur au sein du box-office américain ainsi que mondial. En ayant grapillé un peu moins d’un milliard de dollars, le film de Jared Hess confirme une nouvelle dynamique dans le secteur cinématographique adapté des jeux vidéo. Est-ce toutefois avéré pour tous les films de ce domaine en particulier ?
Round 1 : Les années 90/2000
Le cinéma et les jeux vidéo ont toujours été le fruit d’une mésentente mutuelle, offrant quelques brèves réussites critiques et commerciales. Tout commence en 1993 avec l’adaptation du jeu vidéo le plus connu dans le monde entier : Super Mario Bros. Rien de mieux que de commencer par le biais du plombier le plus réputé du milieu du jeu vidéo ? Le résultat est à l’image d’une première tentative qui ne sait pas sur quel pied danser.
Cherchant à combler les attentes des joueurs de l’époque tout en voulant attirer dans les salles obscures un public non accoutumé à une expérience vidéoludique, le film se transforme en monstre de Frankenstein en voulant surfer sur le ton décalé des deux films SOS Fantômes et n’arrive finalement jamais à atteindre les intentions recherchées. Malgré cela, cette première expérimentation ouvre la porte à un nouveau potentiel cinématographique. Suivront des adaptations sans queue ni tête de grands succès de jeux d’arcade de l’époque comme Street Fighter en 1994 ou encore Mortal Kombat en 1995.
Le début des années 2000 offre des propositions un peu plus abouties via les sorties respectives de Lara Croft : Tomb Raider, avec en tête d’affiche une Angelina Jolie qui semble tailler pour le rôle, et de Resident Evil. Ces deux films connaissent un succès assez conséquent pour mettre en chantier des suites qui finiront par baisser significativement en qualité, essentiellement du côté de la franchise Resident Evil qui finira par devenir une hexalogie avec en tête d’affiche une Milla Jovovich qui vampirisera peu à peu la franchise aux côtés de son mari, le réalisateur Paul W.S. Anderson.
La suite des années 2000 n’arrive pas à confirmer un premier essai relativement réussi en s’enfermant dans le secteur du Direct-to-video avec comme porte-étendard le mal-aimé Uwe Boll, et ce malgré quelques bonnes surprises comme le Silent Hill de Christophe Gans.
Les tentatives avortées des années 2010
Les années 2010 voient les studios hollywoodiens tenter un nouvel essai d’envergure en injectant des budgets imposants dans l’adaptation à l’écran de franchises vidéoludiques à renommée mondiale pour profiter de l’intérêt grandissant du grand public envers les jeux vidéo. C’est ainsi que les studios Disney, en collaboration avec le producteur Jerry Bruckheimer, lancent la production à hauteur de 200 millions de dollars d’un film inspiré de la licence Prince of Persia d’Ubisoft, avec comme volonté de le transformer en un nouveau Pirates des Caraïbes.
Malgré un joli succès en France, le film de Mike Newell n’arrive pas à combler les attentes des studios et déçoit au niveau du box-office et des retours critiques, en ne réussissant pas à rentabiliser l’entièreté de production, s’échouant aux alentours des 300 millions de dollars mondialement.
C’est également le cas du film Assassin’s Creed sorti en 2016 et porté par Michael Fassbender, qui était censé lancer toute une gamme de longs-métrages au cinéma, mais ne s’arrêtera qu’au premier épisode avec un box-office stagnant autour de 240 millions de dollars pour un budget de 125 millions et des retours négatifs à l’égard d’un scénario n’arrivant pas à capter l’attention du spectateur en s’embourbant dans un récit ronflant, et ce malgré quelques séquences bienvenues durant l’Inquisition espagnole, toutefois sous-exploitées.
Durant la même année, un autre projet ambitieux basé sur une licence connue et affichant les mêmes ambitions que la franchise Assassin’s Creed débarque au cinéma. Réalisé par le fils de David Bowie, qui avait déjà offert aux spectateurs deux longs-métrages au concept fort et abouti, Warcraft : Le Commencement avait en tête de lancer toute une série d’adaptations de la trilogie vidéoludique Warcraft, tout en visant le public chinois.
Le projet s’écroule dès la sortie du premier volet face à des attentes démesurées de la part des studios. Le film n’arrive qu’à satisfaire un public déjà acquis à la cause Warcraft et laisse sur le carreau un public néophyte de l’univers perdu face à un canevas trop alambiqué pour eux.
Le retour en grâce des années 2020
Les années 2020 amènent une nouvelle dynamique. Tout commence à partir de la controverse du prochain film Sonic, arlésienne des studios Sega depuis les années 90. Le premier trailer sorti en 2019 dévoile un personnage ayant perdu toute son essence en voulant offrir une approche réaliste du hérisson bleu qui débouche sur une débâcle du côté des fans. A la suite de cette grogne, le réalisateur Jeff Fowler annonce relancer la post-production pour se rapprocher du design original de Sonic.
Les premières images rassurent les fans et le film sort au cours de l’année 2020 durant la pandémie covidienne mais s’en sort très honorablement au box-office en engrangeant quelque 300 millions de dollars pour un budget estimé de 85 millions, malgré des critiques mitigées. Cela est suffisant aux yeux des studios Paramount qui lancent le développement d’une suite qui connaîtra un plus gros succès que son aîné.
Le tout aboutira à une trilogie au succès qui n’en démord pas et qui se justifie par une proposition généreuse réussissant à ravir les fans de la première heure ainsi que les jeunes générations, malgré un scénario simpliste, mais aidé par un Jim Carrey en roue libre qui arrive à se démarquer de la mascotte de Sega.
Le début des années 2020 voit également arriver les succès plus ou moins relatifs des adaptations de Five Nights at Freddy’s et de Mortal Kombat, qui verront tous deux arriver une suite en milieu et fin d’année 2025.
Ces succès sont tout de même à nuancer face à des catastrophes industrielles sorties durant ce même laps de temps, à l’image de Borderlands d’Eli Roth. Véritable ratage sur tous les niveaux, ce film avec un budget estimé à hauteur d’un peu plus de 100 millions de dollars ne réussit à récolter que quelque 30 millions de dollars mondialement, ce qui en fait un échec cuisant pour Lionsgate, qui n’a vraisemblablement pas cherché à s’investir considérablement dans ce projet qui annonçait déjà la sortie de piste dès la diffusion des premières images sur le net.
Le jeu vidéo : nouveau mastodonte ?
La sortie de la nouvelle adaptation de Super Mario Bros en 2023 a sûrement fait changer l’intérêt que les studios de cinéma portent envers le potentiel des adaptations de jeux vidéo sur grand écran. Projet longtemps vu comme maudit par les spectateurs à la suite du résultat plus que bancal de la première incursion de 1993, l’adaptation en animation par les studios Illumination aura éveillé la curiosité de nombreuses personnes dès la diffusion de la première bande-annonce et aura connu une déferlante inédite le premier jour de sa sortie mondiale, pour finir par battre de nombreux records en fin de carrière en dépassant le milliard au box-office mondial.
La sortie de Minecraft : Le Film confirme cette nouvelle tendance en frôlant de peu ce jalon tant convoité avec un jeune public qui répond présent, malgré des retours extrêmement mitigés de la presse et du public plus pointilleux.
Face à la fin de l’hégémonie super-héroïque au cinéma, une question se pose : les jeux vidéo vont-ils être leur successeur au box-office ? La réponse semble plus nuancée au vu de l’analyse que l’on peut en tirer. Mario, Sonic, Minecraft… Ces noms représentent peut-être des jeux jouissant d’une réputation mondiale, mais ils sont aussi devenus des marques au fur et à mesure des années. Le plombier à la salopette rouge possède désormais un parc d’attractions à son nom, ainsi qu’une gamme LEGO, tout comme Minecraft et Sonic.
Face au succès surprise de Barbie en 2023, la réponse se dirigerait plus vers un autre biais. Ce seraient plutôt les marques qui dominent maintenant le box-office mondial. Et face aux différentes annonces d’adaptations de licences telles que Cluedo ou encore Uno, peut-être que le filon se trouve aujourd’hui dans ce domaine. Il ne reste plus qu’à voir ce que l’avenir nous réserve…
Les adaptations de jeux vidéo reviennent de loin, c’est certain. Le développement de suites et l’arrivée de nouvelles licences telles que The Legend of Zelda le confirme d’autant plus. Cette revanche prise par les jeux vidéo commencent également à s’étendre dans le monde des séries avec les succès de Fallout et de The Last of Us notamment. De là à dire que ce secteur va devenir la nouvelle locomotive du box-office américain et mondial, rien n’est moins sûr et l’analyse en sera plus nuancée, surtout face au mastodonte Barbie qui pourrait lancer une nouvelle mode à l’avenir. Néanmoins, ce qui est certain, c’est que les jeux vidéo ont pris une place importante au sein de ce milieu restreint.
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