Alan Wake 2 est le titre que l’on espérait voir un jour arriver. L’attente de ce retour était alors l’une des plus insoutenables de 2023. Et le résultat est tout simplement exceptionnel. En plus d’être un des meilleurs jeux d’horreur, il est aussi l’un des meilleurs de cette année… Ce suvival-horror est déjà parmi les candidats pour le Jeu de l’Année, et autant avouer que c’est largement mérité !
Treize longues années. C’est le temps qu’il a fallu attendre pour avoir cette suite du jeu vidéo culte. Malgré de nombreuses tentatives pour le teaser, Remedy voulait livrer une suite à l’histoire de l’écrivain maudit. Elle a d’abord pris la forme de Control, un excellent TPS sous fond de paranormal. On y retrouvait de drôles de similitudes avec les précédentes œuvres du studio. Arriva ensuite le Remedy Connected Universe, dont cet Alan Wake 2 représente l’apogée des expérimentations des développeurs.
Inspirés des écrits de Stephen King et des réalisations de David Lynch, ils sont parvenus à créer un véritable survival-horror qui surpasse toutes les attentes. Difficile de mentionner le premier volet d’Alan Wake sans se rappeler de cette dernière réplique mystérieuse qui devenait source de théories. « Ce n’est pas un lac, c’est un océan. »
Après avoir délivré sa femme Alice de l’Antre Noir et pris sa place, Alan Wake s’est égaré dans ce cauchemar éveillé où l’écriture permet de distordre sa réalité et de survivre. Voilà maintenant 13 ans que l’auteur désespère de ne jamais quitter ses lieux. Au même moment, le FBI enquête sur des meurtres sordides à Bright Falls, plus précisément près de Cauldron Lake, la source du mal du premier volet. Saga Anderson et Alex Casey (portant étrangement le même nom que le héros littéraire d’Alan Wake) ignorent encore que l’affaire risque d’être plus complexe que prévu et que personne ne va en ressortir indemne.
Nota Bene : Le jeu étant particulièrement gourmand dans sa configuration PC, nous n’avons pas pu le tester sur ce support. Néanmoins, nous avons testé le jeu sur PS5 et il est graphiquement à la hauteur. Nous n’avons eu aucun bug durant toute l’aventure, si ce n’est que le jeu passait à de très rares moments en VO alors que nous testions le titre en VF. Il convient d’ailleurs de souligner l’excellence du doublage français.
Il convient également de préciser que le jeu pourrait devenir incompréhensible sur de nombreux aspects du scénario si le public ne connaît pas les précédentes productions de Remedy. Ainsi, Alan Wake 1, Control et son DLC sont absolument nécessaires pour ne rien louper de cet Alan Wake 2.
Enfin, il faut rappeler que le jeu n’est disponible qu’en version dématérialisée…
Peur à Cauldron Lake
Tout d’abord, Alan Wake 2 est très oppressant. Il trouve toujours le moyen de mettre le public dans une situation de danger et de crainte. Cela se renforce aussi par l’excellent travail du moteur graphique Northlight, qui plonge immédiatement dans l’immersion avec un travail d’ombre et de lumière très imposant. La modélisation des visages est très impressionnante et la moindre goutte de pluie d’une météo grisante se fait ressentir. Pour faire simple, Alan Wake 2 est peut-être le jeu le plus beau graphiquement depuis The Last of Us Part II et God of War Ragnarok. Il y a un réel soin du détail et on sent que les développeurs maîtrisent leurs outils tels de vrais professionnels.
On pourrait croire que les graphismes seraient le gros point fort, mais ce serait sous-estimé l’immense talent de Remedy. Le travail sonore est tout aussi maîtrisé, plongeant véritablement dans un cauchemar onirique. La moindre voix d’une menace dissimulée dans les décors peut ajouter une grosse dose de stress. Remedy réalise un excellent survival-horror qui connait particulièrement ses aînés à l’instar de Resident Evil 4 Remake. Toutefois, il sait brillamment se servir du genre pour aborder divers thèmes à travers toutes les structures vidéoludiques.
Une véritable fantaisie dans le cauchemar
En plus de celui de la boucle, Alan Wake 2 prend la thématique du double dans tout son concept. D’un côté, nous avons Saga Anderson. Cette inspectrice du FBI est envoyée à Bright Falls pour enquêter sur le meurtre sordide d’un individu (dont nous tairons le nom). Entre Twin Peaks et True Detective, on retrouve l’ambiance mortifère de la petite ville balnéaire des Etats-Unis. Orienté dans l’investigation et l’enquête, il faudra résoudre l’affaire et se méfier des monstres apparaissant la nuit tombée. De l’autre côté, Alan Wake, l’écrivain déchu piégé dans l’Antre Noir, doit radicalement changer le décor et le scénario pour sortir vivant via des schémas d’intrigue de roman. Cette fois, sa campagne est plus orientée survival-horror et folie décadente. Silent Hill n’est pas si loin. Fait à préciser : il possède le Game Over le plus malsain que l’on ait vu depuis longtemps.
Le point commun entre ces deux personnages est un espace mental. Une idée très intéressante pour peaufiner la narration du jeu et dérouler les événements. Avec Saga, il faudra construire les dossiers d’enquête, les trier afin de trouver des éléments communs et interagir avec des discussions et points-clés pour renouveler l’objectif. C’est parfois long, mais l’idée est bonne, nous faisant imaginer des possibilités pour un futur jeu d’enquête. De quoi semer des graines pour de nouveaux titres ?
En revanche, cet Antre Mental pour Alan (la pièce de l’écrivain) est une merveille. Elle permet de changer considérablement l’environnement, révélant de nouveaux objectifs et de nouveaux ennemis. L’hostilité et la menace deviennent alors permanentes dans cette nouvelle réalité. Préparez-vous à vous perdre régulièrement dans les méandres de l’écrivain tourmenté.
En plus d’apporter une étonnante durée de vie au jeu, les deux campagnes sont un festival d’idées grandioses, qui trouvent le moyen de s’unir régulièrement. Cela apporte une lecture supplémentaire à l’intrigue de l’autre. Tout au long de la vingtaine d’heures de jeu, Alan Wake 2 propose des éléments de mise en scène que l’on aimerait voir plus souvent dans un jeu vidéo. Chaque chapitre (entrecoupé d’une chanson, dont This Road de Poe) est une véritable leçon cinématographique qui refuse littéralement la redondance et la facilité. Le titre de Remedy brouille tellement les frontières du genre et s’en amuse que l’on peut être légèrement frustré de voir que son gameplay est finalement très classique.
« Ce n’est pas un lac, c’est un océan ! »
Largement inspiré de Resident Evil 2 Remake et de The Evil Within 2, il faudra trouver des coffres, faire le plein de ressources pour survivre, le tout avec une caméra à l’épaule. Nullement besoin d’expliquer plus, puisque ce sont des codes de gameplay connus. Cependant, le fait est que le jeu réussit à se les réapproprier en inversant de nombreuses tendances.
En exemple, la lumière permet de se cacher. Car contrairement au premier volet, la lumière ne fait plus disparaître les ennemis, bien qu’elle les affaiblisse considérablement. Il faudra donc être équipé de tout objet lumineux pour se tirer d’un bien mauvais pas. Il ne faudra jamais essayer de se cacher dans le noir. Heureusement, les affrontements ne sont pas légion (bien que les ennemis soient très agressifs) et il est possible d’esquiver et de riposter en cas de fâcheuse posture. Sur ce point, il est bien dommage d’avoir une telle classicité, d’autant que chaque séquence d’Alan Wake 2 est unique et donne immédiatement envie d’y retourner.
Enquête policière, thriller expérimental, comédie musicale, horreur expressionniste et survival sont des démonstrations possibles de ce que peuvent apporter le talent et le savoir-faire de Remedy. Véritable OVNI dans la production des AAA en jeu vidéo, Alan Wake 2 joue sur l’abondance de la folie et la cruauté de l’imaginaire comme jamais auparavant. Et pour cela, quoi de mieux que de jouer entre la fiction et la réalité, en alternant séquences réussies de Full Motion Vidéo et cinématique « in-game » ?
L’imagination de l’écrivain
Jamais ridicule, on reste bouche bée devant la mise en lumière, l’esthétique et l’acting. D’autant que l’histoire est si complexe que l’on se prend à analyser chaque séquence comme un théoricien du cinéma. On se retrouve alors devant une véritable lettre d’amour interactive au 7ème art qui transpire l’originalité, la passion et la maîtrise artistique. On est très vite pris dans l’ambiance et on frissonne. Jamais le jeu ne se veut facile. Il n’apporte aucune solution si on reste bloqué. Il faudra compter sur sa précision, son instinct et son intuition pour avancer.
C’est alors un excellent moyen de découvrir toutes les fantaisies plantées par l’équipe de développement, comme une fourmilière d’easter-eggs, mais aussi des morceaux musicaux et des publicités tantôt hilarantes, tantôt inquiétantes. Mention spéciale à la diffusion d’un véritable court-métrage (Yoton Yo) maîtrisé et palpitant. On pourrait pourtant totalement passer à côté. En revanche, il est important de souligner le nombre hallucinant de jump-scares. S’ils sont certes nécessaires dans la mise en scène, ils frôlent parfois l’exagération. Attention, certains sont très bien placés et pourraient bien vous tétaniser !
Le jeu de l’année ? C’est fort probable !
Alan Wake 2 est une expérience qui ne se vit pas par le visionnage d’un stream, mais bien par un ressenti personnel. Le jeu dispose vraiment d’une aura qui saisit à la gorge et qui ne peut être transmise par une diffusion sur Internet. Certes, le titre manque cruellement d’affrontements et ne brille pas forcément par ses combats avec les possédés. Mais c’est aussi une manière de s’émanciper définitivement du premier volet. En le regardant, le titre pourrait être ennuyant, alors qu’en réalité, on en louperait toutes les subtilités. Le moindre détail n’est pas laissé au hasard et peut devenir objet d’interprétation. Alan Wake 2 est une expérience qui se vit manette en main.
C’est un véritable cauchemar visuel et sonore qui bascule son public dans un maelström hallucinatoire, une véritable folie immense dans laquelle on replonge volontiers. Alan Wake II est un voyage personnel et la moindre surprise dévoilée serait un véritable gâchis pour le joueur. Personne ne doit être spectateur, mais bien joueur. On se retrouve alors vraiment au cœur du roman de l’écrivain dans lequel tout le monde a un rôle à jouer. C’est une véritable invitation à « l’Initiation » pour savourer ce « Retour » (vous comprenez, n’est-ce pas ?).
N’ayons plus peur des mots. Alan Wake 2 est le survival-horror le plus ambitieux et le plus frappant depuis très longtemps. Probablement depuis Silent Hill 2 ou, plus récemment, The Evil Within. Original, dérangeant, étouffant. Cela fait longtemps qu’on n’avait pas eu une virtuosité dans le mélange des genres et des médias aussi exaltante. Sam Lake est un grand fan de David Lynch. Et cela se ressent tout le temps, tant le jeu finit par prendre l’apparence et la beauté d’un Twin Peaks. Le scénariste tient pourtant son Mullholland Drive. Le genre de jeu auquel on ne croyait plus… Ajoutons par là une dernière petite mention savoureuse aux Olds Gods of Asgards, le sosie fictif du groupe Poets of the Fall qui compose des morceaux d’anthologie, à l’instar de ceux du premier volet. Ouvrez grand les oreilles… Et quoi qu’il arrive, restez dans la lumière !
Répétons-le, car c’est vrai : « Ce n’est pas un lac, c’est un océan. » Cette définition de l’écrivain face aux ténèbres pourrait largement correspondre à cet Alan Wake 2. Débordant d’imagination créative et doté d’un scénario en or massif, le titre de Remedy arrive à proposer quelque chose d’absolument exceptionnel dans un rivage de titres qui se ressemblent en permanence. Une véritable leçon de cinéma par le jeu vidéo, prouvant le talent inébranlable du studio finlandais. Oui, c’est l’une des meilleures expériences de cette année…
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