Création de monnaie, équilibre monétaire, assurer le système des paiements… Les banques centrales ont des activités qui peuvent sembler parfois ennuyeuses, parfois mystiques. Mais comment et pourquoi ces banques ont-elles été créées ?
La Banque d’Angleterre, banque de guerre, aux prémices des banques centrales
Créée en 1694, elle est la deuxième plus vieille du monde derrière la banque centrale de Suède. Elle est fondée afin de subvenir à un besoin primaire des États à cette époque : faire la guerre. Les premiers partisans de la banque expliquent qu’elle permettra de lever de l’argent frais si l’occasion de devoir faire la guerre se présente. En plus de cela, elle facilitera les transactions entre les citoyens. H.M., auteur anglais, écrit que la garantie de financement pour la couronne d’Angleterre est la clé de la victoire sur ses ennemis.
Les avantages ne s’arrêtent pas là : prenant exemple sur la banque d’Amsterdam, les « whig » considèrent que la création d’une telle banque permettra de développer le commerce et la richesse globale de la nation. Elle se finance au départ sur les sujets du Royaume d’Angleterre et reverse l’argent au Roi et au gouvernement.
La Banque d’Angleterre réunit rapidement des millions de livres permettant de financer la Navy anglaise. Grâce à l’argent prêté par la banque centrale, la marine compte un total de 272 vaisseaux en 1702, soit une augmentation de 77 % par rapport à 1688. Mais la « Bank of England » a d’autres prérogatives.
Elle devient l’une des premières au monde à créer des billets de banque. Elle est donc l’une des premières institutions accordant de la valeur à un bout de papier, ce qui constitue assurément une révolution monétaire. Finalement, elle permet aux barons anglais de prêter de l’argent à l’État, qui en retour leur donne un pouvoir de décision dans la conduite de la politique. La Banque d’Angleterre constitue de ce fait un jalon majeur vers la monarchie parlementaire anglaise.
La Banque de France
En janvier 1800, sur la demande de plusieurs banquiers célèbres, les Consuls créent la Banque de France. La banque est alors une banque d’émission classique, qui ne dispose pas du monopole de la création de billets. C’est sans compter sur ses futurs actionnaires. En février de la même année, les premiers actionnaires ne sont nul autre que Napoléon Bonaparte et sa mère !
Fort d’une renommée et d’un pouvoir incomparables, le Consul va faire évoluer l’établissement bancaire. Dès 1803, les autres banques du pays se voient interdire l’émission de billets. Les actionnaires (majoritairement Bonaparte et ses proches) sont alors en mesure de maîtriser l’inflation. Banque privée à l’origine, elle sera nationalisée par De Gaulle en 1946. Depuis, elle a perdu une part de son autonomie du fait de la création de la zone euro et de la BCE.
La « Fed », une suite d’échecs pour cette
Si elle est aujourd’hui la banque centrale la plus surveillée au monde, la Réserve fédérale des États-Unis n’a pas toujours eu ce succès. Une première banque nationale est créée en 1790 sous la supervision d’Alexander Hamilton pour un mandat de 20 ans. En 1816, la seconde Banque des États-Unis voit le jour, à nouveau pour 20 ans.
Le pays errera ensuite sans réserve fédérale pendant près de 80 ans. C’est l’aspect fédéral du pays qui est responsable de ces moments de flottement : pendant le XIXe siècle, la gestion et la réglementation du domaine bancaire sont laissées aux états fédérés. Avant la Fed, les États-Unis fonctionnaient tout de même sous le National Banking System. Celui-ci n’était pas du tout satisfaisant. Les régions agraires se trouvaient tantôt en pénurie de billets, laissant les agriculteurs sur le carreau, tantôt en surabondance.
En 1907, le pays fait face à l’une de ses premières crises économiques majeures : la « Panique des banquiers ». La Bourse chute brusquement et perd 25 % de sa valeur en neuf mois. Cet événement crée un environnement favorable à la Fed, établie par le « Federal Reserve Act » en 1913. La Fed a alors pour but de préserver la stabilité du système bancaire et financier en surveillant les différentes banques du pays et en monopolisant le droit d’émettre des billets.
Ironie du sort, ce n’est que 16 ans plus tard qu’aura lieu la Grande Dépression. Elle aura été causée et par le secteur bancaire et par le secteur financier américain que la Fed devait surveiller. Ni la Fed, ni la SEC ne parviendront, 80 ans plus tard, à stopper la crise financière de 2008.
Alors que le rôle des banques centrales s’est normalisé au cours du temps, il est intéressant de revenir sur leurs origines. Aujourd’hui, elles n’ont plus qu’un rôle de régulation, de confiance ; pour Guillaume III à l’inverse, elles ont servi d’instrument pour faire la guerre.
Sources :
- Cairn – La Révolution anglaise de 1688 : économie politique et transformation radicale et L’origine du Fed
- Wikipédia – Réserve fédérale des États-Unis, Banque de France et Banque d’Angleterre
- Martin Collet – Finances publiques (LGDJ)