Qu’est-ce que la « contribution à l’audiovisuel public » ?

Victor Adan
Victor Adan
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Elle coûte chaque année jusqu’à 138 euros à plus de 20 millions de Français. Elle vient d’être supprimée en première lecture à l’Assemblée nationale. Retour sur la « Contribution à l’audiovisuel public », un don des Français pour les chaînes de télévision et les radios du service public.

La contribution à l’audiovisuel public

Nommée redevance audiovisuelle jusqu’en 2009, actuellement, on doit l’appeler « contribution à l’audiovisuel public ». Créé en 1933, la redevance ne concernait à l’époque que les postes radio. L’argent récolté visait à financer les radios publiques et s’inspirait de celui de la BBC en Grande-Bretagne. Cependant, dans ces années-là, on dénombrait 1 million et demi de postes de radio dans le pays. L’État décida que seules les personnes disposant d’un poste devaient payer cette redevance.

En 1980, la taxe ne concerne plus seulement les postes radio, mais la télévision. Et à ce moment-là, quasiment chaque famille possède un poste de télévision. La contribution s’élève alors à 138 euros pour les habitants de métropole, 88 euros pour les départements d’outre-mer.

Selon la direction générale des finances publiques, la contribution est montée à 3.8 milliards d’euros en 2020. En 2021, on dénombre 27.6 millions de foyers assujettis à la redevance. C’est un peu moins de 23 millions de personnes qui la payent chaque année. Depuis 2005, la contribution est adossée à la taxe d’habitation. Les personnes ne payant pas la taxe d’habitation ne sont pas forcément exonérées de la contribution.

Télévision radio loi France
La contribution à l’audiovisuel public concerne la télévision et la radio publique.

Qui la paye ?

Un citoyen français doit payer cette contribution à l’audiovisuel public si son domicile est équipé d’un téléviseur. Les dispositifs assimilés tels que les lecteurs-enregistreurs de DVD, vidéoprojecteurs équipés d’un tuner et associés à un écran sont comptés dedans.

Le Français est exonéré de la contribution s’il est veuf/veuve ou âgé de plus de 60 ans. Les personnes dont le revenu fiscal de référence est de zéro euros sont aussi exonérées. Les personnes handicapées, ou personne hébergeant une personne handicapée (sous condition de ressources) ne payent pas non plus la contribution. Finalement, ce sont aussi les personnes âgées qui vivent en maison de retraite ou Ehpad qui sont exonérés. Et cela, même s’ils conservent leur ancien logement.

Si la maison est équipée de plusieurs téléviseurs, le foyer ne paye qu’une seule redevance. Que le foyer soit habité par 1 ou 7 personnes, une seule contribution à l’audiovisuel public sera demandée. Cette « redevance » et sa modalité de perception ne relèvent pas du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA). C’est le Parlement et le Trésor Public qui la fixe. Depuis un arrêté publié le 21 juin 2013, le contrôle de la contribution est effectué par un service national créé par Bercy et situé à Toulouse. Ce service lutte contre les fraudes comme les fausses déclarations de non-possession d’un appareil de télévision.

Qui la touche ?

Cette contribution ne finance pas l’ensemble des chaînes de télévision et de radio. Elle ne finance que le secteur public de l’audiovisuel. Elle est collectée au bénéfice des groupes France Télévisions et Radio France. Ainsi, la contribution vient aider aux productions de France 2, France 3, etc. Ainsi que les radios comme France Info ou France Inter. Elle finance aussi la société Arte France, France Médias Monde (France 24, RFI), TV5 Monde et l’INA pour la sauvegarde des archives télé et radio.

France télévisions France 2 France 3
Siège social du groupe France Televisions. / ©Charles Roberge

Les milliards sont ainsi alloués à 65% à France Télévisions. 15.9% vont à Radio France, 7.5% à Arte, 7% à France Médias Monde. Finalement, 2.4% vont à l’INA et 2.1% à TV5 Monde.

La somme récoltée n’est pas la totalité du budget des médias publics. La somme représentait, en 2007, 74% des ressources du service public. Par exemple, elle couvre 86.4% du budget de Radio France. Le reste est alors couvert par le fond venant directement de l’entreprise. Elle l’obtient notamment grâce aux publicités.

En échange de cette redevance, le groupe France Télévisions s’engage à n’effectuer aucune coupure publicitaire durant les longs-métrages diffusés sur leurs chaînes. Le temps de publicité consacré sur France 2 et France 3 ne peut pas être supérieur à 6 minutes par heure en moyenne. Elle ne peut pas dépasser 8 minutes pour une heure donnée. Chaque coupure publicitaire ne peut être supérieure à une durée de 4 minutes. De 20 heures à 6 heures du matin, les chaînes s’engagent à ne diffuser aucun écran publicitaire.

À titre de comparaison, TF1 et M6, peuvent diffuser jusqu’à 12 minutes de publicité pour une heure donnée. Et cela, qu’importe le moment de la journée. Les programmes du soir sont ainsi entrecoupés de publicités.

La contribution à l’audiovisuel public supprimée

La contribution à l’audiovisuel public a été supprimée ce 23 juillet 2022. En 2019, près de 85% des Français se disaient pour la suppression de la redevance (sondage Ifop publié par le JDD). Le président de la République, Emmanuel Macron avait promis lors de sa campagne présidentielle de la supprimer. Ce samedi, les députés de l’Assemblée nationale l’ont supprimé par 170 voix pour et 57 contre.

Assemblée nationale contribution audiovisuelle
L’Assemblée nationale a décidé de la suppression de la contribution à l’audiovisuel public ce 22 juillet 2022.

Auparavant, Horizons, MoDem et Les Républicains avaient également déposé des amendements dans ce sens. Le Rassemblement National est lui aussi favorable, mais souhaiterait aussi que France Télévisions et Radio France se privatisent. La Nouvelle Union populaire écologiste et sociale a quant à elle fait front, et ne souhaitait pas la disparition de la contribution.

Quel avenir pour le service public ?

Le gouvernement devra répondre à une question : la remplacer oui, mais par quoi ? En effet, cette suppression créera un gros trou dans le budget des services audiovisuels publics. Plusieurs raisons ont été avancées par le Président. Il justifie cette suppression par la baisse du pouvoir d’achat. Ainsi, les Français économiseront 138 euros chaque année (et 88 euros pour ceux en outre-mer). La deuxième raison concerne la disparition de la taxe d’habitation à laquelle était accolée la contribution.

Pour remplacer ces 3.7 milliards d’euros, l’exécutif esquisse quelques pistes. Ils évoquent notamment la mise en place d’un budget tiré directement du budget de l’État. Les syndicats des médias publics, certains acteurs du monde de la culture et les partis de gauche sont inquiets. En effet, la fin de la contribution signifie peut-être la perte d’indépendance du service public.

« L’inconvénient de la budgétisation, c’est que l’on est beaucoup moins à l’abri des aléas politiques, puisque ce dernier décide du budget » Françoise Benhamou, économiste de la culture

La deuxième crainte des opposants semble être la réduction des budgets de l’audiovisuel public. En effet, à tout moment, l’État peut dire que les services audiovisuels publics coûtent trop chers. Les budgets seront alors réduits, peut-être une chaine sera fermée ou même privatisée.

Sources : 

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Après ma licence en Information-Communication, j'ai commencé un master en journalisme à l'ISCPA. Actuellement, je suis en deuxième année de Master. Je suis passionné de culture, et aime écrire dessus.
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