Il était une figure incontournable du mouvement surréaliste. Nous parlons bien entendu de Paul Éluard, de son vrai nom Paul-Eugène Grindel. Poète français aussi passionné qu’engagé, il a su nous insuffler bien des émotions par le seul usage de sa plume. Aujourd’hui, Cultea vous propose un petit tour d’horizon de sa vie plutôt houleuse.
Paul Éluard, la naissance d’un poète
C’est le 14 décembre 1895 à Saint-Denis et à 11 heures du matin (oui quitte à être précis…) que naît Paul Éluard. Élevé par un père comptable et une mère couturière, il entre par la suite à l’école supérieure Colbert à Paris. Lancé dans des études prometteuses, il est malheureusement contraint d’y mettre un terme à l’âge de 16 ans, frappé par la tuberculose. Et comme c’est parfois de grands malheurs que surgit la chance, lors de son séjour à l’hôpital, il fait la rencontre d’Elena Diakonova, surnommée Gala.
À ses côtés, et profondément admiratif de sa culture, Éluard ne tarde pas à donner naissance à ses premiers vers amoureux. Toutefois, en 1914 éclate la Première Guerre mondiale et notre jeune poète doit partir au front comme infirmier militaire. Par la suite, il devient majeur le 14 décembre 1916 et finit par épouser Gala deux mois plus tard.
L’aventure Surréaliste
Nous sommes en 1918. La guerre est finie et c’est le mouvement Dada qui s’impose. Briser les carcans, annihiler la notion de sens, remettre en question la raison, frôler la folie, embrasser l’absurde et s’y jeter. Voilà ce que propose ce mouvement, prélude du surréalisme. Ainsi, aux côtés d’André Breton, Éluard prend part à l’aventure.
Plus tard, en 1924, il décide de tout plaquer et de partir voyager pour voir le monde. C’est par ailleurs à cette période que paraît son recueil « Mourir de ne pas mourir », dont l’un des poèmes les plus connus est « L’amoureuse ». On peut y lire les vers suivants :
Elle a toujours les yeux ouverts
Et ne me laisse pas dormir.
Ses rêves en pleine lumière
Font s’évaporer les soleils
Me font rire, pleurer et rire
Parler sans avoir rien à dire.
D’ailleurs, cette période est aussi la chanceuse contemporaine des ouvrages Capitale de la douleur (1926) et L’Amour, la poésie (1929).
Nusch, « Aurore d’une ville un beau matin de mai »
L’année 1928 abat d’un coup d’un seul la relation du poète. À cette époque, Gala rencontre Dalí et s’enfuit avec lui. Quelques temps après, il rencontre Maria Benz, encore appelée Nusch. Elle est artiste de Music-hall, mais avant tout, elle est et restera le vrai grand amour de Paul Éluard. Ainsi, il se marie à elle en 1934. Mais par malheur, en novembre 1946, c’est par un coup de téléphone qu’il apprend son décès. Anéanti, le poète déclare :
Mon amour si léger prend le poids d’un supplice.
En 1947, il publie le recueil Le temps déborde comme un hommage à sa femme qui l’a quitté si brutalement. On peut lire :
Morte visible Nusch invisible et plus dure
Que la faim et la soif à mon corps épuisé
Masque de neige sur la terre et sous la terre
Source des larmes dans la nuit masque d’aveugle
Mon passé se dissout je fais place au silence.
« La terre est bleue comme une orange »
Engagé pour le combat communiste et la liberté, Éluard choisit d’utiliser son art comme sa meilleure arme. C’est ainsi qu’en 1948, il écrit Poèmes politiques et en 1950 Poème à Staline. Ses écrits ont eu un réel écho. C’est sa vie que nous retrouvons à travers ces lignes. Poète de la résistance, du non-sens, de l’amour éperdu, ses œuvres sont le fait d’associations hasardeuses de mots, d’images et d’éléments fragmentés et désordonnés.
Enfin décidé à pousser les limites qui lui étaient imposées, il invite lors de la création poétique à s’élever. Selon lui, la pensée a des ailes et il convient d’enfin oser les ouvrir.
En conclusion, bien qu’on ne fasse plus l’éloge d’Éluard, nous avions à cœur de le célébrer aujourd’hui lors de l’anniversaire de sa naissance. En effet, nous ne laissons pas grand chose lors de notre passage sur Terre, mais les mots… voilà ce qui nous restera toujours. N’hésitez donc pas à aller découvrir ses œuvres si vous ne les connaissez pas encore, vous ne serez pas déçus, c’est une promesse !
Plus encore que « Capitale de la douleur » (1926), « L’amour la poésie » (1929) est le recueil où s’exprime le mieux le génie poétique et surréaliste de Paul Eluard :
« La terre est bleue comme une orange
Jamais une erreur les mots ne mentent pas »
« Le loup-corail séduit l’épine-chevalière »
« La fraise-rossignol chante son sang qui fume »
« Les trésors sont des murs et leur ombre est aveugle
Et l’amour est au monde pour l’oubli du monde »
Les années 1930 traduisent ensuite une nette baisse d’inspiration chez Eluard, mais son étonnant poème « Quelques-uns des mots qui jusqu’ici m’étaient mystérieusement interdits » publié en 1937 renoue avec le surréalisme débridé des années 1920.
Sylvain foulquier