Buffalo Bill : qui était vraiment l’homme derrière le mythe ?

Maurane Charles
Maurane Charles
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En 1905, Buffalo Bill et sa troupe de 1 300 hommes et 800 chevaux se posent à Reims, pendant trois jours. - Collection Michel Thibault

Nous connaissons tous, de nom au moins, le célèbre Buffalo Bill. Mais savez-vous pourquoi ? Savez-vous qui était Buffalo Bill et quel événement a fait de lui ce personnage si célèbre de l’Ouest américain ? Lorsque l’on prononce son nom, de grandes images emplies de bisons, d’Indiens et de cow-boys s’imposent dans nos esprits. Entre mythe et réalité, découvrez comment Buffalo Bill a construit sa légende.

William Cody, l’enfant de l’Ouest américain

Buffalo Bill est né William Frederik Cody, le 26 février 1846 dans l’Iowa au sein d’une Amérique divisée sur la question des esclaves. Après la mort de son frère Samuel, il devient l’aîné de la famille, qui, bouleversée, tente de trouver une échappatoire en déménageant au Kansas.

Mais lorsqu’ils arrivent, le pays est en pleine guerre civile. La décision du Congrès de déterminer par vote de la population si le nouvel État sera esclavagiste ou non agite la population. Isaac Cody, le père de celui qui deviendra Buffalo Bill, est anti-esclavagiste. Il finit par prendre la parole devant des opposants en 1857 et se fait poignarder. Il meurt tristement, caché dans une scierie.

Dès lors, William se doit d’aider sa mère à subvenir à leurs besoins. Pour ce faire, il trouve rapidement un travail d’homme à tout faire auprès de John Willis. Ce dernier est le contremaître de la firme Russel, Majors & Waddell qui assure le ravitaillement le plus important des émigrants et des forts de l’Ouest. À ses côtés, le jeune garçon découvre un monde de chevaux et d’hommes résistants de l’Ouest américain.

Première rencontre avec des Indiens

À douze ans, William Cody embarque pour sa première traversée des Grandes Plaines en tant qu’apprenti convoyeur de bovins sur le trajet du fort de Leavenworth à l’Utah. Mais au cœur de l’expédition, des Indiens Pawnees attaquent le convoi, volant chevaux et bovins. La traversée s’arrête là pour Willy. Sans montures ni bétail, le voyage n’a plus lieu d’être… Cette première rencontre n’est pourtant que le début d’un fort lien qui se nouera entre la légende de Buffalo Bill et les Indiens !

Buffalo Bill et Sitting Bull, deux légendes de l’Ouest. Photo DR1 /3

En grandissant, William multiplie les péripéties du même genre : attaques d’Indiens, bêtes échappées, problèmes de chariots… Il rencontre des personnalités emblématiques de la légende de l’Ouest, comme le célèbre éclaireur Kit Carson.

Buffalo Bill : un témoin clef de l’histoire de l’Ouest américain

Le Pony Express

Avec l’or découvert en Californie, on cherche à moderniser et accélérer les communications entre l’est et l’ouest. La firme de Russell, Majors et Waddell propose alors un système d’acheminement plus rapide que les diligences : le Pony Express. Si quelques cavaliers sont présents parmi nos lecteurs, ce nom ne doit pas leur être étranger. Si aujourd’hui il résonne comme un jeu, en 1860, la mise en place de ce système de relais de cavaliers permet de distribuer le courrier en 10 jours seulement !

Et William Cody, du haut de ses quatorze ans, est un des premiers cavaliers du Pony Express. Bien que ce système s’achève rapidement en octobre 1861 avec l’arrivée du télégraphe, ces impressionnantes chevauchées ont marqué l’histoire de l’Ouest !

Entre la guerre de Sécession et la révolution du chemin de fer

La guerre de Sécession éclate. Cette guerre traumatisante est la plus meurtrière que les Etats-Unis aient connue ! De 1861 à 1865, 624 500 hommes sont tués, et près de 500 000 blessés. Le conflit a fait ainsi à lui seul plus de victimes que toutes les autres guerres auxquelles les États-Unis ont participé depuis…

Notre William s’engage, sans savoir encore, dans le 7e régiment de la cavalerie du Kansas. Mais il ne s’en sort pas trop mal et exécute quelques missions d’éclaireurs avant de rentrer, en 1865, à Leavenworth.

À cette époque, le chemin de fer se développe. La compagnie Kansas Pacific (qui construit l’InterContinental) engage alors William pour apporter de la viande aux ouvriers sur la voie qui se construit entre Abilene (Kansas) et Sheridan (Wyoming). Il doit tuer douze bisons par jour, mais on lui en attribue 4 300 en neuf mois ! Ses exploits attisent la presse locale : Buffalo Bill est né.

Un peu grisé par son succès, il n’hésite pas à faire étalage de son talent lors de concours d’abattage de bisons. Il se retrouve en compétition avec Bill Comstock, un chasseur de bisons comme lui. Buffalo Bill écrase son adversaire en tuant 69 bisons contre 48 en une journée.

Les Indiens, les bisons et le Stetson

De 1868 à 1872, William est nommé chef de la vingtaine d’éclaireurs du 5e régiment de cavalerie par le général Sheridan, chef d’état-major des troupes de l’Ouest. C’est d’ailleurs dans cette fonction que Buffalo Bill aurait affronté le chef Cheyenne Tall Bull dans un duel à mort. Et si officiellement le major Frank North est reconnu comme le véritable « héros », beaucoup soutiennent que c’est Buffalo Bill. Pour l’époque, c’est en tout cas un véritable exploit, acclamé dans la presse.

Le général Sheridan le réquisitionne ainsi une nouvelle fois pour des missions bien particulières. Il s’agit non plus d’accompagner l’armée, mais de servir de guide à quelques expéditions prestigieuses. Il faut accompagner dans l’Ouest américain de grosses fortunes de la Nouvelle-Angleterre, ainsi que le grand-duc Alexis, fils du tsar Nicolas II de Russie. Durant l’été 1871, lors de cette première expédition, Buffalo Bill, chevauche un magnifique étalon blanc. Il inaugure une tenue de circonstance, un costume d’apparat de « vaqueros » (garçons vachers mexicains) surmonté d’un spectaculaire chapeau, commandé sur-mesure à la compagnie Stetson. Il incarne et fabrique le portrait idéal de l’homme de l’Ouest.

Nota Bene : Sheridan organisait surtout ces parties de chasse avec l’idée stratégique de poursuivre un plan de pacification des Indiens en épuisant leurs réserves de gibier.

Un succès spectaculaire ?

Pour organiser la chasse du grand-duc Alexis, Buffalo Bill réquisitionne une centaine de guerriers Sioux. Il offre ainsi un spectacle haut en couleur avec des danses de guerre indiennes typiques, avant bien sûr d’initier le tsar aux rudiments de la chasse aux bisons. Buffalo Bill, avec quelques années d’avance, pose déjà les traits de son futur « Buffalo Bill’s Wild West Show » (dont nous parlerons dans un prochain article !).

La presse s’empare de l’événement jusqu’à New York. Buffalo Bill comprend que ces actions « spectaculaires », bien qu’absolument pas quotidiennes, forgent le mythe de l’Ouest dans les esprits de l’Est et de l’Europe. Il décide alors de se rendre là-bas.

En 1872, il est à Chicago où il découvre que certains de ses exploits sont rejoués avec plus ou moins de réalité sur des scènes. Amusé par ce qu’il voit, l’homme du Far West devient acteur. En 10 ans, il alterne les scènes de Chicago et New York en incarnant son propre rôle dans des pièces naïves, mais pleines d’action et de coups de revolver. Puis, il retourne dans l’Ouest.

Pendant son absence, la dramatique bataille de Little Bighorn, opposant le 7e régiment à l’alliance de nombreuses tribus menées par les Sioux Crazy Horse et Sitting Bull, fait de nombreuses victimes… C’est sans doute la bataille la plus connue de la grande guerre Sioux de 1876. Elle sonne la mort du colonel George A. Custer et de 267 cavaliers du 7e régiment, auquel a appartenu Buffalo Bill.

Même après la mort du général, Buffalo Bill continue la lutte contre les Indiens d’Amérique. Il poursuivra la lutte même après la mort du général en tuant le chef Cheyenne, Chevelure Jaune.

Vers la création du Wild West Show

La presse relaie sa victoire et Buffalo Bill retourne jouer sur les planches avec un succès encore plus grand. Sa tournée La Femme de la Prairie est un véritable triomphe ! Mais lassé par sa vie d’acteur, il part avec son ami publicitaire John Burke à la recherche d’une maison. Ils la trouvent à North Platte. William fait alors venir sa famille (Louisa Frederici et ses enfants). C’est dans cette ville que le squelette du célèbre Wild West Show se construit…

Nous en avons beaucoup appris sur la vie du mythique Buffalo Bill. Et plus encore, nous avons découvert une partie du Far West américain à travers elle ! Cependant, la vision unilatérale de l’époque laisse finalement de côté la part sombre de cette conquête de l’Ouest. Nous explorerons cette piste dans un prochain article sur le Wild West Show !

Bibliographie :

  • Portes Jacques. Buffalo Bill et le Wild West Show : légende et postérité, Hachette Livre, 2016.
  • Portes Jacques. Buffalo Bill, Fayard, 2002.
  • Portes Jacques. Histoire des Etats-Unis de 1776 à nos jours, Armand Colin, 2010.
  • Kasson, Joy S. Buffalo Bill’s Wild West : Celebrity, Memory and Popular History, Hill & Wang, 2000.

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Étudiante chercheuse en Histoire Contemporaine - Passionnée de littérature, de musique, de cinéma.
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