Tout est dans le titre, le poète Charles Baudelaire aurait demandé à Gustave Courbet d’effacer sa maîtresse d’un tableau suite à un froid entre eux. Si vous vous demandez comment tous ces éléments ont pu être réunis au même endroit, laissez nous vous l’expliquer.
Charles Baudelaire et sa « Vénus noire »
Qui ne connait pas le célèbre poète, auteur des Fleurs du mal ? Mais savez-vous qui se cache derrière cette inspiration troublante entre désir, passion et dégoût des femmes et de la vie ? Entre les lignes de ses œuvres aujourd’hui historiques, on retrouve la trace fantomatique de la « Vénus noire » : Jeanne Duval. Cette femme bien mystérieuse a en effet laissé une empreinte indélébile sur Baudelaire.
Véritable muse, elle a accompagné Charles dans ses délires, dans ses dettes, sa vie de bohème jusqu’à imprégner ses textes. Aujourd’hui, bien qu’il ne nous reste que peu de traces de ce lien entre cette femme et l’artiste, quelques lettres demeurent. Madame Aupick, mère de Baudelaire, n’a en effet pas pu brûler l’entière correspondance entre les deux amants.
Les sources restent donc très vagues. Nous savons cependant que Jeanne Duval et Baudelaire se sont rencontrés au printemps 1842 à Paris. A cette époque, Jeanne tenait de petits rôles dans les théâtres et fréquentait de près la bohème parisienne. Ainsi, elle fût notamment maitresse de Nadar.
Tantôt fascinante, tantôt moquée, sa beauté exotique obséda rapidement Beaudelaire. En effet, malgré le peu de données, Jeanne devait être une métisse originaire soit d’Haïti soit de Saint-Domingue. La liaison entre les deux amants était très mal vue par la mère et le beau-père de Baudelaire. Ce dernier ayant dépensé une grande partie de l’héritage de son père et croulant sous les dettes, on accusait Jeanne la « mulâtresse » d’être à l’origine de ces dépenses.
Leur relation fût donc tumultueuse et marquée par de nombreuses séparations. L’état de santé de Baudelaire déclinait d’ailleurs à mesure que le couple se déchirait.
Le tableau de Gustave Courbet
Camarades de la bohème, Baudelaire et Courbet fréquentaient régulièrement le café Momus, lieu de rencontre des arts et des idées. Ils se lièrent rapidement d’amitié et partagèrent la critique mutuelle de leurs arts. Fuyant les créanciers et les disputes avec Jeanne, Baudelaire fini par s’installer chez le peintre une semaine en 1847.
Atteint de la vérole et de la syphilis, le poète s’enfonça dans les limbes du laudanum, de l’opium et de l’alcool. Les relations entre le peintre et le poète haïssant le réalisme commencent alors à se refroidir… Gustave Courbet en profite cependant pour terminer le portrait de son ami. Il réutilise ce modèle au sein de son œuvre majeure « L’atelier du peintre ».
C’est sur ce monumental tableau que nous avons pu voir apparaitre au fil du temps la silhouette fantomatique de Jeanne Duval, derrière Baudelaire.
Au printemps 1855, à l’occasion de la première Exposition Universelle, Courbet présenta une série de tableaux. Le jury du salon des Arts refuse cependant cinq tableaux dont L’atelier du Peintre. En réaction, Courbet inaugure le Pavillon du réalisme, sa propre exposition pile en face la grande Exposition Universelle.
Alors que figurait quelque temps auparavant la figure de la muse de Baudelaire à ses côtés, le peintre l’efface. En effet, à la demande de Baudelaire lui-même, Courbet recouvrit la Vénus noire d’une couche de peinture. Avec le temps cependant, la peinture s’est effritée pour révéler la beauté délicate de Jeanne Duval, observant Baudelaire travailler…
Par ces coups de pinceau, Courbet gravait à jamais la présence unique de cette femme dans la vie de Baudelaire. Si vous souhaitez en apprendre un peu plus sur la vie de Jeanne Duval, nous vous conseillons la lecture de la fiction Madame Baudelaire par le dessinateur Yslaire.
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