Depuis quelques années, l’Arabie Saoudite a augmenté de manière significative son investissement dans le football, attirant de plus en plus l’attention du monde entier sur sa stratégie sportive ambitieuse. Le royaume tente d’attirer les meilleurs footballeurs au monde pour relever le niveau de son championnat et générer de nouveaux revenus. Mais que cache cet intérêt soudain pour ce sport ?
La puissance financière de l’Arabie Saoudite est actuellement considérable. Et dans le domaine sportif, son niveau d’ambition est comparable à celui du Qatar. Cela ne concerne d’ailleurs pas que le football. Le pays cherche à augmenter sa présence internationale dans le sport d’une manière générale. En témoigne l’accueil d’ici 2029 des Jeux asiatiques d’hiver (oui oui… d’hiver…)
L’Arabie Saoudite et le football : une histoire d’amour récente, mais sérieuse
Les investissements de l’Arabie Saoudite dans le football ont des implications économiques, politiques et sociales significatives, notamment pour le futur. La « vision 2030 » du prince héritier Mohammed Ben Salmane (communément appelé « MBS ») comprend le football comme un élément-clé pour transformer l’image de l’Arabie Saoudite, mais également stimuler la croissance économique. L’acquisition de Newcastle United FC par le fonds souverain du pays, ainsi que l’attraction de joueurs célèbres comme Christiano Ronaldo ou de Karim Benzema sont des manifestations très claires de cette stratégie.
Actuellement, l’Arabie Saoudite cherche à diversifier son économie, qui est très dépendante du pétrole et du gaz. Le pays a donc décidé d’investir massivement dans le sport, localement et à l’étranger. En témoigne la construction de Qiddiya, un méga-projet de sport et de divertissement. De plus, l’accent mis sur le sport, le divertissement et les loisirs vise à répondre aux intérêts et aux demandes de la jeune population saoudienne, qui représente près de 70% de la population totale du pays. L’objectif est donc de prévenir toute forme de mécontentement social (du pain et des jeux…)
Enfin, l’Arabie Saoudite souhaite promouvoir massivement le sport comme un outil pour encourager un mode de vie plus sain, face à l’augmentation des taux d’obésité, de diabète et de maladies cardiaques dans le pays.
L’Arabie met en place son « soft power »
Il s’agit probablement du point le plus évident (et le plus controversé) de cet intérêt soudain pour le football. En effet, l’Arabie Saoudite souhaite utiliser le football comme un instrument politique, afin de projeter une image positive du pays à l’échelle internationale. Rien de nouveau ni d’original… Nous assistons ni plus ni moins qu’à une stratégie classique de « soft power », comme tous les pays du monde peuvent en exercer.
Cependant, cette stratégie n’est pas sans susciter de controverses. En effet, par le biais de cette stratégie, L’Arabie Saoudite est actuellement accusée de « sportswashing », c’est-à-dire de tenter de détourner l’attention du monde sur l’état des Droits de l’Homme et des Droits des Femmes dans le pays. Pour rappel, le rapport de 2023 de Human Right Watch s’exprimait en ces termes :
Les autorités ont procédé à des arrestations de dissidents pacifiques, d’intellectuels publics et de militants des droits de l’homme et ont condamné des personnes à des peines de prison de plusieurs dizaines d’années pour avoir publié des messages sur les médias sociaux. Les pratiques abusives dans les centres de détention, y compris la torture et les mauvais traitements, la détention arbitraire prolongée et la confiscation des biens sans procédure légale claire, restent omniprésentes.
D’une façon générale, l’état des libertés fondamentales en Arabie Saoudite est extrêmement préoccupant. Face à cela, la stratégie du pays est claire : lisser son image auprès de la communauté internationale, par l’intermédiaire du sport.
La question qui se pose désormais est la suivante : est-ce que ces stratégies politiques, économiques et sociales seront payantes. Seul l’avenir nous le dira… Mais au vu des stars du football ayant fait le choix de l’Arabie Saoudite, nous n’avons pas fini d’en entendre parler dans les prochaines années. D’ici là, nous vous invitons à écouter les propos de Jean-Baptiste Guégan, spécialiste de la géopolitique du sport, sur le sujet.
Sources :
