« Love Lies Bleeding » : une romance sulfureuse et vengeresse très réussie [critique]

Après Saint Maud en 2021, la cinéaste britannique de 34 ans Rose Glass est de retour avec son deuxième long-métrage : Love Lies Bleeding. Emmené par Kristen Stewart, Katy O’Brian et Ed Harris, le récit raconte le destin de Lou, une gérante d’une salle de sport, qui tombe amoureuse de Jackie, une culturiste qui cherche la notoriété. Leur relation va passer par différentes étapes qui va les entraîner dans une spirale toxique et violente.

Love Lies Bleeding : un quotidien morose qui va être chamboulé

Avec Love Lies Bleeding, la cinéaste Rose Glass revient à des thématiques déjà explorées dans Saint Maud. Ici encore, elle cherche à analyser les relations amoureuses entre deux individus différents, opposés, dont les trajectoires vont entrer en collision par hasard.

Au départ, on suit le parcours de Lou (Kristen Stewart), une jeune femme rongée par la solitude, par une vie monotone, sans but, ni ambition. Elle est au bureau de sa petite salle de sport, et pas grand-chose ne se passe dans sa vie. En plus, elle doit composer avec un père mafieux égoïste et potentiellement dangereux. Débarque alors Jackie (Katy O’Brian), une auto-stoppeuse culturiste qui pousse la porte de sa salle de sport. Jackie, elle, a une vie bien remplie. Elle voyage beaucoup, vit au jour le jour, n’a pas d’attache et a énormément d’ambition.

Kathy O’Brian et Kristen Stewart

Deux électrons dissociés qui vont donc se rencontrer, se heurter, et aboutir sur une relation amoureuse passionnée mais aussi accidentée, imprudente et périlleuse. Lou voit en Jackie une échappatoire. Un moyen de sortir de sa monotonie, et de sa vie qu’elle ne semble pas contrôler. Sortir de sa relation sans intérêt avec Daisy (Anna Baryshnikov), se libérer du joug nocif de son paternel (Ed Harris), et s’éloigner de son beau-frère violent (Dave Franco) qui bat constamment sa sœur.

Changer de vie, et s’échapper de ce trou à rat qu’est son quotidien. Un quotidien qui se résume à un taff relou, à une vie amoureuse vide, et à un manque criant de passion. Pour exprimer cette vie morose, Rose Glass décide de mettre en scène un décor crasseux, souillé, redondant. Il fait chaud, il fait humide, les gens transpirent, le sang gicle, les maisons sont sales, tout respire un peu le dégoût et la noirceur d’un quotidien sans intérêt dans lequel notre héroïne attend simplement la mort. L’arrivée de Jackie lui donne un nouveau but, un nouveau désir, tout ça grâce à l’amour.

L’amour sous toutes ses formes

Parce que Love Lies Bleeding parle finalement de ça. D’amour. Sous toutes ses formes. De la plus belle à la plus toxique. De la plus fidèle à la plus traîtrise. De la plus rassurante à la plus inquiétante. Rose Glass décide de parler d’amour, sans l’idéaliser, sans le ternir, simplement pour rappeler que ce voyage n’est pas toujours au beau fixe, et que les tempêtes sont nombreuses.

Les deux femmes forment un couple lesbien aussi sulfureux que meurtrier. Romance charnelle et physique, Love Lies Bleeding parle également de l’opposition entre l’homme et la femme. Rose Glass aborde le machisme, le sexisme, la violence physique de l’homme sur la femme, et met en scène un récit vengeur de la femme contre l’homme.

En fait, dans Love Lies Bleeding, aucun portrait d’homme n’est positif. Notre héroïne doit composer avec un père manipulateur, un beau-frère violent et des personnages masculins secondaires misogynes. Et petit à petit, le récit se mue en une intrigue punitive dans laquelle les femmes s’émancipent radicalement à travers une justice purgative sanglante.

Film pop, esthétiquement hors du temps, à l’étalonnage jaunâtre superbe, avec du grain à l’image, Love Lies Bleeding est donc une histoire d’amour et de vengeance particulièrement séduisante. Stylisée mais jamais ostentatoire, esthétiquement pertinente mais jamais maniérée, la mise en scène déploie un déroutant mélange de glamour et de crasse, d’action et de mélancolie, de folie et de sérénité. Toujours sur le fil, Love Lies Bleeding évolue entre deux eaux, entre amour et violence, entre sensualité et hémoglobine, entre sueur et romance.

Les performances de Kristen Stewart et de Katy O’Brian frôlent la perfection. Les deux comédiennes créent une alchimie de tous les instants et portent largement le film sur leurs épaules. On regrettera simplement un scénario légèrement prévisible, notamment dans son dénouement, et peut-être un léger manque de fulgurances visuelles.

Si l’ambiance lancinante, pulpe, quelque part dans une continuité du cinéma des frères Coen, fonctionne à la perfection, on regrette que Rose Glass n’aille pas encore plus loin dans ses accès de violence. Les séquences d’action auraient gagné à être plus ambitieuses et plus créatives dans leur gestion.

Mais si ce n’est ces quelques petites réserves, Love Lies Bleeding est une proposition hors du commun, globalement très maîtrisée, qui s’inscrit dans la droite lignée des films « désertiques » comme Paris Texas (1984), Blood Simple (1984) ou dans une moindre mesure Arizona Junior (1986). On peut également y voir un parallèle avec le récent Drive-Away Dolls, qui aborde globalement les mêmes thématiques. Mais le film de Rose Glass met largement à l’amande la proposition d’Ethan Coen. 

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