Rebecca Zlotowski s’attaque à un sujet si peu traité au cinéma : le rôle de la belle-mère. Dans Les Enfants des autres, sorti le 21 septembre dernier, Rachel (Virginie Efira) est une professeur de français de confession juive. Elle tombe sous le charme d’Ali (Roschdy Zem), déjà papa d’une petite Leïla, âgée de quatre ans et demi.
Synopsis : Rachel est une quadragénaire pétillante à qui il manque une seule chose : être maman. Elle est d’ailleurs entourée d’enfants. Elle s’éprend d’Ali et s’attache très vite à sa petite fille née d’une première union, Leïla. Mais s’attacher aux enfants des autres n’est pas sans risque…
Les Enfants des autres, une poésie de notre temps
Qu’est-ce qu’une famille ? Faut-il forcément porter un enfant pour être maman ? Les Enfants des autres pose des questions ô combien d’actualité. Exit le topos de la marâtre acariâtre d’un autre temps. Place désormais à la délicatesse. Rebecca Zlotowski réinvente avec profondeur et subtilité le personnage de la belle-mère, pour notre plus grand bonheur. Rachel porte tout de suite pour la fille de son amoureux une affection aussi forte que pudique. La jeune femme cherche constamment sa place auprès d’Ali, de Leïla, mais aussi, et surtout, auprès d’Alice (Chiara Mastroianni), la mère de Leïla.
Rachel, Ali et Leïla font progressivement famille. Les instants de la petite famille sont tout à la fois réalistes et poétiques, bercés par des musiques aussi douces que dynamiques. La réalisatrice a choisi de faire de nombreuses ellipses temporelles. On se concentre ainsi davantage sur les sentiments et les liens qui unissent les différents personnages. Il y a ces moments de pur bonheur sur fond d’envoûtants paysages camarguais. Mais il y a aussi ces moments si lourds, filmés très justement, au cours desquels la petite Leïla réclame sa mère. « C’est pas évident, les enfants des autres », dira Ali.
Se dessine alors en creux toute une réflexion sur la famille. Le film met en effet en scène des familles qui ne sont pas conventionnelles. Il y a bien sûr Rachel, Ali et Leïla. Mais y a aussi Rachel, sa sœur et son père, qui forment une autre famille. Dans Les Enfants des autres, il n’y a pas de familles établies, seulement des individus qui font famille, qui ne se contentent pas des liens établis. Les personnages se distribuent de l’amour sans compter. Ils tissent des liens de plus en plus profonds entre eux. Rachel prend par exemple l’habitude de récupérer Leïla au judo. Et c’est beau.
Magnétique Virginie Efira
Virginie Efira est éblouissante. L’actrice illumine et porte le film à elle seule. Elle y joue à merveille la complexité des sentiments que lui demande son personnage de belle-mère. Le personnage de Rachel réfléchit perpétuellement au fait ou non d’avoir des enfants, d’autant qu’elle est entourée d’enfants. Rachel est lumineuse. Mais le désir d’avoir un enfant la rend plus touchante, plus sensible. Plus humaine, somme toute. Virginie Efira incarne, toujours avec tact et délicatesse, cette forme de fragilité en creux. Cela n’est quasiment jamais dit, mais toujours habilement suggéré par des expressions, des regards perdus. Et c’est encore plus fort.
On aime également la pudeur des sentiments de Rachel pour Leïla, toujours soucieuse de ne pas remplacer Alice. Et on aime tout autant la fusion qui éclot parfois entre Rachel et Leïla. Virginie Efira explore, tant par ses mots que par son corps, différentes manières de montrer de l’amour. C’est tout naturellement qu’elle passe de la joie au tourment. Virginie Efira est tellement captivante qu’on recherche avec elle quelle place est celle de la belle-mère. Bluffant.
Les Enfants des autres est un petit bijou cinématographique de cette rentrée. A voir, sans hésitation…