Ancrée dans l’histoire vestimentaire, et ce, dès la Préhistoire, l’utilisation de la fourrure animale soulève aujourd’hui de nombreuses problématiques, éthiques et environnementales. Des initiatives sont ainsi prises par des acteurs du secteur de la mode pour dénoncer la cruauté qu’engendre ce type de production et proposer des alternatives plus durables.
Ce 2 décembre, le magazine Elle a fait savoir dans un communiqué qu’il allait faire disparaître la fourrure animale d’ici 2023, aussi bien dans les articles que dans les publicités de ses 45 éditions. Treize d’entre elles appliquent déjà cette mesure. Avec ses 33 millions de lecteurs, Elle devient ainsi la première grande publication du domaine de la mode à prendre cette décision.
Valeria Bessolo Llopiz, la directrice internationale du magazine, a déclaré « la présence de fourrure dans nos pages et sur nos supports numériques n’est plus en phase avec nos valeurs, ni celles de nos lecteurs ». Grâce à cette initiative, elle espère « promouvoir une industrie de la mode plus humaine. » PJ Smith, le responsable de la mode de la branche américaine de l’ONG Human Society International, a déclaré souhaiter que « d’autres magazines de mode suivent son exemple ».
Cette industrie de la mode, plus humaine et plus éthique, est souhaitée depuis plusieurs décennies. En France, Brigitte Bardot porte ce combat dès les années 1960 par Brigitte Bardot. En 1977, elle dénonce le massacre des phoques dans des clichés devenus mythiques. Durant cette période, plusieurs associations sont créées pour lutter contre les maltraitances animales, comme la fondation 30 Millions d’Amis en 1976 ou l’association PETA (People for the Ethical Treatment of Animals) en 1980 aux États-Unis.
Il faut pourtant attendre les années 2010, pour que certains acteurs de l’industrie de la mode renoncent à la fourrure. Les podiums des défilés d’Amsterdam, d’Oslo, de Melbourne ou encore d’Helsinki l’ont désormais bannie. Plusieurs grandes marques y ont également renoncé, comme Burburry, Michael Kors, Jean-Paul Gaultier, Balenciaga, Armani, Gucci, ou Prada par exemple. Donatella Versace a d’ailleurs déclaré :
« C’est notre responsabilité de protéger l’environnement et l’écosystème. On possède aujourd’hui la technologie pour développer de nouvelles fibres, qui peuvent.se substituer aux peaux animales et qui ont les mêmes standards de qualité. »
Ces nouvelles fibres sont réalisées à partir de végétaux comme les bambous. En collaboration avec PETA, le leader de la fausse fourrure Ecopel a créé des coiffes véganes que pourraient porter les gardes de la reine d’Angleterre. Ces coiffes sont traditionnellement réalisées à partir de fourrure d’ours. Pour lutter contre leur traque, l’entreprise propose de fournir gratuitement le ministère de la Défense anglais jusqu’en 2030.
Ces initiatives seraient ainsi en accord avec l’opinion publique. En 2020, un sondage Yougov révèle que 93 % des Britanniques refusent de porter de la fourrure. Un sondage IFOP réalisé pour la fondation 30 Millions d’Amis montre que 9 personnes sur 10 s’opposent au commerce de la fourrure. En juin 2021, Israël est devenu le premier pays à interdire la vente de fourrure pour la mode. La Californie a également interdit le vente de vêtements et accessoires contenant de la véritable fourrure à partir de 2023.
De l’utilitaire à l’esthétique
Ces préoccupations éthiques et environnementales marquent ainsi une césure profonde dans l’utilisation de la fourrure. Utilisée dès la Préhistoire, la fourrure a résisté à l’épreuve du temps. Son premier usage est ainsi purement utilitaire, afin de se protéger du froid. Elles servent également de trophée pour montrer le courage des hommes ayant combattu les animaux sauvages.
C’est à partir du Moyen Âge que le commerce de la fourrure se développe. Il entraîne la naissance de certains métiers, comme celui du pelletier, qui prépare les peaux avant de les vendre. Progressivement, la fourrure est assimilée au rang social de son porteur. Alors que les paysans portent des peaux de mouton ou de chèvre, les hommes et.les femmes de rangs plus élevés possèdent des fourrures de vairs et martres. L’hermine quant à elle devient le symbole royal.
Au fil des siècles, la fourrure est donc associée au luxe, à l’élégance et au raffinement. La Haute Couture l’utilise dans de nombreuses pièces, malgré des avis de plus en plus défavorables à partir de la seconde moitié du XXe siècle. Karl Lagerfeld a ainsi défendu à de très nombreuses reprises la fourrure dans l’industrie de la mode. En 2019, quelques mois seulement après sa mort, la marque a toutefois annoncé qu’elle renonçait à son utilisation.
Face à l’expansion du bannissement de la fourrure, il est probable que les prochaines créations vestimentaires soient plus soucieuses du bien-être animal. Alors que le podium d’Helskinki a banni le cuir de ses défilés, ce 1er décembre, la marque Armani a annoncé qu’elle renonçait à l’utilisation de la laine angora dans ses collections automne hiver 2022 / 2023.
Sources :
- Le Monde – La fourrure animale va disparaître du magazine de mode « Elle »
- Huffington Post – La fourrure d’animaux sauvages interdite en Californie dès 2023
- Fondation Brigitte Bardot – La marque Karl Lagerfeld s’engage à ne plus utiliser de fourrure animale !
- 30 millions d’amis – La mort sur les épaules
2 Replies to “La fourrure, la mode d’une autre époque ?”