La femme fatale au cinéma existe depuis toujours, c’est une figure qui a traversé les époques et qui a toujours occupé une place à part. Dans l’imaginaire collectif, la femme fatale incarne le mystère, la sensualité, le désir et l’interdit. C’est un personnage qui a longtemps été défini par le regard que le héros porte sur elle et non par sa présence dans une œuvre. De la pellicule noir et blanc des années 20 au numérique d’aujourd’hui, la femme fatale n’a cessé d’évoluer. Aujourd’hui, elle n’est plus nécessairement l’incarnation cinématographique et symbolique d’Eve, n’existant que parce que le personnage masculin a besoin d’elle. Elle devient parfois un levier de l’émancipation féminine.
La femme fatale au cinéma existe depuis toujours
La figure de la femme fatale n’est pas née avec le cinéma. En effet, on la retrouve dans les textes religieux, les mythes anciens, la peinture : Lilith, Circé, Cléopâtre, Salomé… Autant de femmes qui fascinent parce qu’elles incarnent une transgression : celle d’une femme qui ne se laisse pas dominer. La femme fatale, à ses origines, n’est pas une criminelle, telle qu’on la connaît dans les films noirs. C’est un personnage qui vit dans un monde qui se veut naturellement compliqué pour une femme.
Dans les films noirs hollywoodiens des années 40-50, Phyllis Dietrichson, dans Assurance sur la mort, Gilda, dans le film éponyme, ou encore Kathie dans La Griffe du passé, sont belles, brillantes, insaisissables. Mais, à la fin, ce sont des personnages toujours punis, car la femme fatale est celle qui agit, choisit et manipule. Dans une société patriarcale où le pouvoir est réservé aux hommes, elle dérange, mais surtout, elle fascine… les hommes. Elle est construite autour des fantasmes d’hommes qui rêvent d’une femme forte, dominante, mais qui doit toujours dépendre de l’homme, et lorsque le personnage de la femme au cinéma prend une trop grande lumière, elle est tuée ou bien mise à l’écart.

L’archétype de la femme fatale au cinéma
Au fil des décennies, le personnage de la femme fatale au cinéma devient moins caricatural et, dans les années 90, le personnage de Catherine Tramell du film Basic Instinct est un personnage intelligent et assumé, qui joue de la sexualisation de la femme faite par les hommes, en la transformant en force pour elle et en faiblesse pour l’homme. Elle est là pour déranger. Mais là encore, elle est filmée par le regard masculin.
Ce n’est que plus récemment que cet archétype a vraiment été chamboulé, lorsque les critiques ont arrêté d’analyser le personnage féminin lui-même, mais se sont intéressées au regard porté par le metteur en scène. La femme fatale au cinéma n’existe pas seulement à Hollywood. Dans le cinéma indien par exemple, son parcours est différent. Des réalisateurs comme Sanjay Bhansali magnifient la douleur féminine. Gangubai Kathiawadi est une figure de femme blessée, puis déterminée, devenue leader de son quartier. Et chez Vikas Bahl avec Queen, Rani est fatale au système, il n’est pas question d’amour ou de relation homme et femme, elle est indépendante et affirme son libre-arbitre.

Et maintenant ?
Aujourd’hui, la femme fatale n’a pas disparu, mais son évolution montre qu’elle est autre chose qu’un objet de désir. Elle peut être mère, héroïne, antagoniste, amante, tueuse, égoïste, politiquement incorrecte ou rien de tout ça. C’est un personnage qui, aujourd’hui, sort du carde, littéralement. Le cinéma, comme la pop culture en général, est un produit influencé par le monde qui l’entoure, mais c’est aussi un cycle vertueux où le cinéma nourrit le monde et où le monde nourrit le cinéma.
Ce n’est pas un hasard si on la retrouve aujourd’hui à l’écran, dans des livres ou bien dans les jouets. La femme fatale au cinéma, c’est surtout le témoin de l’évolution d’une société et d’une mentalité. Il suffit de regarder un film des années 40 suivi d’un film plus contemporain pour en faire le constat. Regardez le premier film James Bond et Barbie. La femme fatale peut être ce qu’elle veut et cette évolution touche aussi les minorités. La femme fatale queer émerge lentement, notamment dans les cinémas indépendants : Portrait de la jeune fille en feu, Daayraa, Fire ou encore Carol.
Dans ce contexte, la question n’est plus seulement : que veut la femme fatale ? Mais : qui a le droit de la représenter ? Si elle a longtemps été filmée comme un fantasme ou une menace, peut-elle maintenant exister comme un personnage à part entière ? La femme fatale au cinéma n’est pas morte, elle est devenue libre et n’a plus besoin de correspondre à un rôle. Dans un monde où les stéréotypes persistent, les représentations de la femme fatale au cinéma doivent continuer d’évoluer.
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