Joel Edgerton, après un coup d’essai avec The Gift, réitère l’expérience de réalisation avec Boy Erased. Un cinéma très différent, puisque cette fois l’acteur s’attaque à une histoire vraie, racontée dans le livre de Garrard Conley publié en 2016. Ce dernier a été victime d’une association religieuse vouée à « guérir » les homosexuels. Pour l’occasion, en plus de jouer dans son film, Joel Edgerton s’entoure de Nicole Kidman, Russell Crowe, Xavier Dolan et Lucas Hedges.
Un film pédagogue et pudique
Boy Erased met en avant le danger des thérapies de conversion, encore pratiquées dans de nombreux pays, dons les États-Unis. Ce genre de thérapies n’est pas délivré par des professionnels et s’assimile parfois davantage à des sectes qu’à de véritables programmes médicaux. Aux USA, 36 États ne disposent toujours pas de loi interdisant les thérapies de conversion. Pour l’Association Américaine de Psychiatrie (AAP), la dépression, l’angoisse et les comportements autodestructeurs peuvent grandement se développer suite aux thérapies dites « réparatrices ».
Joel Edgerton avertit donc son spectateur sur le danger de ces extrémistes qui continuent d’influencer une jeunesse perdue en toute impunité, et surtout en toute illégalité. La religion chrétienne est évidemment extrêmement ancrée dans la culture américaine, ce qui n’empêche pas l’acteur de lui taper sur les doigts. Bien sûr, il reste politiquement correct, n’offrant pas non plus un procès historique à la religion américaine dominante.
Le long-métrage de Joel Edgerton tente de mettre en lumière ce genre d’endroits. Avec subtilité, le cinéaste ne condamne pas, mais présente le fonctionnement méconnu de ces associations louches. Il en joue d’ailleurs le mentor avec beaucoup de précision. Boy Erased ne se veut pas moralisateur, notamment grâce à ses rôles secondaires. Russell Crowe est très convaincant dans le personnage de ce pasteur ambigu, très croyant, mais qui va devoir ouvrir son esprit et briser ses préjugés pour tenter de faire évoluer la relation qu’il entretient avec son fils. Un personnage touchant, et surtout très positif dans son évolution comportementale.
Joel Edgerton évite le pathos, en s’abstenant d’aller dans la surenchère, ou dans l’exposition abusive. Il reste très discret dans les éventuelles séquences charnelles ou d’abus sexuels, permettant de souligner la condition sous-jacente et masquée de ce genre d’associations qui évoluent dans l’ombre. Bref, le sujet est bien traité et les acteurs ne manquent pas d’implication. Malheureusement, la réalisation est trop paresseuse pour totalement convaincre.
Une réalisation qui manque d’originalité
Il faut dire que Joel Edgerton n’en est qu’à ses débuts, certes. Mais Boy Erased manque d’inventivité dans sa mise en scène pour totalement capter l’attention de son spectateur. Le sujet ne se suffit pas à lui-même. Joel Edgerton peine à créer un véritable rythme et s’enferme dans un montage répétitif. Le squelette du long-métrage se dessine trop rapidement et finit par entrer dans une structure trop téléphonée. La direction artistique n’est pas folichonne, Nicole Kidman et Russell Crowe n’étant pas utilisés à leur plein potentiel. Le cinéaste en herbe tente de masquer l’absence de vision artistique par des ralentis redondants et parfois inappropriés.
Boy Erased se concentre sur ce sujet qui envahit en ce moment Hollywood : l’homosexualité et l’homophobie. Mais Joel Edgerton offre une approche pudique et intelligente, condamnant la religion chrétienne extrême, tout en modérant le propos avec le personnage de Russell Crowe. Dommage que la mise en scène n’offre rien de très personnel.