Au cours de sa longue carrière, Superman a connu de multiples réécritures et réinventions. Fils adoptif d’ouvriers durant l’URSS, une existence sans pouvoir ou encore un départ plus tardif de la planète Krypton, le personnage est un terreau fertile pour les scénaristes friands de nouvelles idées. Avec Superman Space Age, Mark Russell s’essaie à l’exercice pour nous offrir trois chapitres remplis d’espoir et teintés d’une pointe de mélancolie.
Un monde palpable qui évolue
Le propos est clair. Nous commencerons cette histoire durant les années 60 et nous avancerons chronologiquement jusqu’au milieu des années 80. Ce concept, utilisé avec brio cher Marvel dans Spiderman : L’histoire d’une vie et également dans Fantastic Four : L’histoire d’une vie, histoire déjà écrite par Mark Russell, se retrouve maintenant dans l’univers de DC.
Contrairement aux récits cités précédemment, Superman Space Age ne cherche pas à être une rétrospective des grandes heures de l’Homme d’Acier depuis sa création en 1938 et pendant les décennies qui ont suivi sa première apparition. Ici, la thématique sera moins large et plus focalisée sur un sujet précis.
Cette recherche narrative se ressentait déjà dans Fantastic Four : L’histoire d’une vie où le scénariste avait décidé d’épaissir le fil rouge des aventures de la première famille super-héroïque. Cette ambition se séparait un peu de ce qui avait été fait par Chip Zdarsky pour son récit sur Spider-Man, qui ressemblait parfois à une carte postale des grandes heures du super-héros.

Mark Russell n’en oublie pas d’ancrer Superman dans les différentes époques qu’il traverse en connectant ses aventures aux évènements marquants de l’Histoire américaine. On passera ainsi par l’assassinat de Kennedy et les heures inquiétantes de la Guerre Froide avec la menace atomique.
Cette inspiration se retrouve également dans la partie artistique avec aux commandes le dessinateur Michael Allred et sa compagne Laura Allred. Ils livrent tous deux des planches inspirées du style pop art, essence emblématique des années 60. Les planches finissent même par lorgner vers un style franco-belge qui le démarque du style américain des comics.
Ces moments clés américains lui permettent de jouer avec les personnalités des protagonistes, comme par le biais de Lois Lane en tant que journaliste ou encore le pilote d’aviation Hal Jordan. L’ensemble de l’univers de DC est ainsi déployé pour servir l’Homme de Demain dans sa recherche du miracle ultime pour sauver le monde.
DC et Superman, deux faces d’une même pièce
Superman Space Age permet de remettre au centre de l’univers DC la pierre angulaire qu’est Superman. Tout tourne autour de sa figure mythologique. Il est le symbole que tout le monde veut suivre, un héros qui n’abandonne jamais et qui veut toujours sauver chaque personne sans en abandonner aucun.
Même si une partie de la mythologie du super-héros est présente par le biais de l’incontournable Lex Luthor, le monde du Daily Planet ou encore Brainiac, Mark Russell met en perspective que son aura dépasse sa propre mythologie et englobe l’ensemble de l’univers. C’est un personnage incontournable qui fait émerger l’espoir dans le cœur des personnages qu’il côtoie, qui les pousse à faire l’impossible et qui se sentent perdus une fois qu’il disparaît pour accomplir d’autres exploits.

Cette recherche scénaristique permet de mettre en avant certains personnages iconiques du catalogue DC, à l’image de Flash. Il est dépeint ici avec un trait de caractère teinté d’ironie face à un monde qui fonce droit vers sa perte mais stagne dans sa non-action face à cette fatalité.
Ce fatalisme ambiant face à une menace inévitable permet d’exacerber le caractère rempli d’espérance qui constitue la personnalité de Superman. Cela renforce ce parallèle entre lui et le monde dans lequel il vit et qui est constitué de super-héros si puissants et pourtant statiques face à une fin du monde programmée. Au sein de ce groupe de surhumains, un héros finit par se démarquer pour offrir une dualité forte avec l’Homme d’Acier en la personne de Batman.
Dualité et espoir
On sent dès le premier chapitre que l’histoire axera une partie de son récit autour du duo mythique de l’éditeur. En effet, durant les premières années de service de Kal-El sous sa cape rouge, Mark Russell s’intéresse aussi à celles du futur Chevalier Noir. Cette envie d’insérer le monde de Batman avec celui de Superman s’explique par cette dualité forte entre les deux personnages.
Tandis que l’un est prêt à tout sacrifier pour sauver des personnes en danger, l’autre préfère élargir le spectre en se demandant s’il peut sauver l’entièreté de la situation. C’est ainsi que leurs différentes rencontres font partie des éléments centraux du récit et des passages les plus intéressants de ce Space Age.

C’est là où Mark Russell déploie la raison de la création de cette mini-série tout en faisant également ressentir un amour profond pour la galerie de personnages peuplant le monde de Gotham City. Le tout finit par atteindre son climax tout d’abord via la conclusion tournant autour de Batman. Elle déroute la première fois mais est finalement compréhensible par rapport à tout ce qui a été raconté précédemment.
Enfin, c’est via la dernière action de Superman que cette dualité en prend tout son sens. Tandis que l’un met tout en œuvre pour sauver la vie des autres aux prix d’un sacrifice trop grand, l’autre sacrifie tout ce qu’il a pour sauver l’intégralité de l’univers ainsi que ceux qu’il aime sans pour autant sacrifier ce qu’il est et ce qu’il représente. Ce parallèle entre fatalisme et espoir permet d’en faire tout le sel de ce récit.
Superman Space Age est une proposition forte au sein de la continuité de DC. Elle s’en affranchit pour offrir une vision d’auteur autour de l’Homme d’Acier tout en le faisant interagir avec les personnages constituant ce monde riche et varié. Les dernières planches permettent encore une fois de montrer toute la symbolique du personnage face à un monde fataliste qui ne cherche qu’à espérer.
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