« Parfum de Femme » est le voyage de la mélancolie ! [Festival Avignon 2021]

Emeric Gallego
Emeric Gallego
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Alors que des milliers de pièces de théâtres sont présentées au Festival Off d’Avignon, certaines sortent rapidement du lot et attirent l’attention. C’est le cas de Parfum de Femme, une pièce créée par la Compagnie Gérard Vantaggioli. Une œuvre aux incroyables interprètes et aux personnages marquants ! 

Synopsis : Neuf ans auparavant, le Capitaine Fausto a perdu l’usage de ses yeux en manipulant une grenade lors de la guerre. Irascible et flamboyant, Fausto devine dorénavant la présence des femmes à la fragrance de leur parfum. Il recrute Ciccio, jeune soldat aux ordres, qui doit l’accompagner de Turin à Naples rejoindre son ami Vincenzo pour un mystérieux rendez-vous. Il y retrouvera notamment Sara, toujours très éprise de lui. Le voyage confronte la naïveté du jeune premier au violent cynisme de l’aveugle vieillissant.

Adapté du roman de Giovanni Arpino et du film de Dino Risi (1974), la représentation théâtrale de Parfum de Femme s’est déroulée, le 18 juillet 2021, au Théâtre du chien qui fume à Avignon. Le spectacle est joué du 7 au 30 juillet 2021 à 16h30.

Mise en scène par Gérard Vantaggioli.

Des interprétations magistrales !

Les lumières s’allument et le public découvre un homme surgissant de l’obscurité. Fausto est un personnage extrêmement complexe ! Tantôt détestable, tantôt attachant, il représente formidablement cette image de l’être brisé par le passé. Il suffit de quelques scènes pour suggérer immédiatement qu’il n’est qu’un homme voulant garder un semblant de contrôle sur une vie qui n’a plus rien à lui offrir. Un homme provocateur, dominant et violemment autoritaire, qui ne veut aucunement qu’on ne le prenne en pitié. Chaque spectateur est alors libre de l’approuver, de le juger et de le comprendre.

On peut rire avec lui, pleurer avec lui, le trouver pathétique, le trouver admirable. On est stupéfait de l’interprète Jean-Marc Catella (déjà connu du festival puisqu’il remporta en 1995 le prix de la meilleure comédie pour L’étroite mousquetaire) qui fusionne corps et âme avec ce mutilé de guerre, en le transformant en une véritable figure désolée voulant soumettre tout le monde. Cet aveugle, prétendant reconnaître les femmes grâce à leurs parfums, ne peut alors laisser le public indifférent.

Jean-Marc Catella. Photo par Emeric Gallego

Parfum de Femme : voyage au bout de la mélancolie

S’il y a un parfum que respire le public tout au long des 105 minutes de la représentation, c’est bien celui de la mélancolie. Partant du désir, de l’amour et de la mort, cette image se renforce par la mise en scène. En véritable virtuose, le metteur en scène Gérard Vantaggioli fait régner une véritable approche cinématographique tout au long de ce voyage en Italie. Les personnages arrivent et partent, mais apportent chacun quelque chose d’important dans l’âme étouffée de Fausto. Lumière crépusculaire et bleuâtre sous fond de musique douce inspirant à la peine qui frappe tout le long du voyage du protagoniste.

N’allez pourtant pas croire que l’œuvre ne semble que morose. Grâce aux autres personnages et leurs rencontres et confrontations avec Fausto, le public peut sourire et rire. Autant qu’il peut pleurer et ressentir de la tristesse. Tous les autres personnages sont marquants, grâce à l’interprétation mémorable de son casting. Mention spéciale à Vanessa Aiffe-Ceccaldi (que l’on retrouvera dans le téléfilm de TF1, Touchés ! d’Alexandra Lamy) qui réussit l’exploit de jouer tous les personnages féminins du spectacle ! Une véritable prouesse, surtout quand chaque personnage apporte une émotion nouvelle, amenant simplement à ce final que l’on ne racontera pas. Autant avouer que Parfum de Femme réussit à jouer avec les sentiments de chacun.

Vanessa Aiffe Ceccaldi et Hugo Valat. Photo par Emeric Gallego.

Véritable ode à l’amour et la mélancolie, Parfum de Femme joue à la perfection avec la vision et le ressenti de son public. Une œuvre éblouissante dont on parlera encore une fois à la sortie de la salle. Elle ne laissera pas le spectateur indifférent, mais il serait regrettable de rester aveugle face à un personnage tragique qui ne demande finalement qu’à être vu… 

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Photographe et réalisateur indépendant. Certains de ses films ont obtenus une soixantaine de sélections en Festival à travers le monde. Rédacteur chez Cultea, ses écrits sur le Traumatisme abordé dans le jeu vidéo sont publiés sur le site !
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