On connaît bien la célèbre peinture à l’huile sur toile de Théodore Géricault (1791-1824). Mais Le Radeau de La Méduse cache une histoire réelle très sombre…
Un départ pour le Sénégal
En 1816, quatre navires sont affrétés en direction du Sénégal. Effectivement, l’Angleterre vient tout juste de redonner à la France les comptoirs et les établissements qu’elle possédait au pays. Parmi les bateaux, on retrouve la frégate La Méduse. On charge cette dernière de transporter le personnel administratif qui organisera la colonie, ainsi que des soldats et leur compagne, soit près de quatre cents passagers. On choisit pour diriger cette mission un capitaine aristocrate qui n’a pourtant pas commandé en mer depuis 25 ans : Duroy de Chaumareys.
Les erreurs du commandant Duroy de Chaumareys
Le commandant commet rapidement une première erreur. Il veut aller le plus vite possible et se retrouve bientôt isolé en mer… Effectivement, seul le navire Écho arrive à rester en vue.
De plus, malgré les conseils reçus sur le trajet à prendre pour éviter les ennuis, Duroy de Chaumareys n’en fait qu’à sa tête. Il traite ses officiers avec méprise et préfère écouter les conseils d’un passager du nom de Richefort, un explorateur qui prétend connaître la côte d’Afrique. Ils croient atteindre le cap Blanc le soir même, sans savoir qu’ils sont finalement beaucoup plus au nord… Le commandant dirige alors la frégate au sud-ouest, puis repique au sud-est. Cette manœuvre, convenue sur le trajet initial dès l’apparition du cap Blanc, intervient trop tôt. L’Écho tente de leur faire des signaux, en vain. Duroy de Chaumareys est sûr de son choix, tant et si bien qu’il omet de sonder la profondeur de l’eau…
Le 2 juillet 1816, La Méduse s’échoue fatalement sur le banc de sable d’Arguin qu’elle devait contourner. Les marins s’empressent de construire un radeau afin de déposer du matériel et alléger le navire. Mais au bout de trois jours d’immobilisation, une tempête se déclare. Le vent dégrade le navire et l’eau s’y infiltre rapidement.
Le commandant ordonne par conséquent qu’on évacue le navire. Erreur de nouveau ! Il ne le sait pas encore, mais La Méduse restera un long moment en dehors des flots. Les personnes restées à bord seront d’ailleurs secourues !
Bref, revenons à notre histoire… Il n’y a pas assez de chaloupes de sauvetage pour évacuer tout le monde… Cent cinquante soldats, femmes et enfants grimpent alors sur le radeau destiné au matériel. Les hommes s’éloignent, laissant sur La Méduse une soixantaine de personnes. La cohorte tente à partir de maintenant de rejoindre la terre ferme à quatre-vingts kilomètres de là. On attache le radeau incapable d’avancer seul aux chaloupes. Mais « accidentellement », le lien se rompt laissant le navire de fortune seul en pleine mer.
L’enfer du radeau de La Méduse
La surcharge d’hommes implique que le radeau s’enfonce à un mètre sous la surface de l’eau. On ne peut ni s’asseoir, ni s’allonger. Il y a à bord très peu d’eau et de nourriture… Dès le premier jour, les seuls apports nutritifs, des biscuits, sont mangés. Une tempête se lève et, déjà au petit matin, une vingtaine d’hommes a disparu.
Cette deuxième journée n’est guère mieux pour nos hommes. Certains perdent espoir et se suicident, d’autres perdent la raison et hallucinent. Le vin consommé, les problèmes s’intensifient. Des soldats veulent démonter le radeau et une bataille entre officiers et soldats démarre. Le lendemain, c’est une soixantaine d’hommes cette fois qui sont morts. Quelques passagers suspectent un complot de la part des officiers afin d’alléger le radeau…
Les cadavres s’amoncellent sur le bateau. Mais il est difficile de tous les jeter immédiatement à la mer. Désespérés et affamés, des hommes commencent à manger la chair des morts. Quelques-uns tentent même de la faire sécher. Peu à peu, tous les passagers auront goûté à la viande humaine.
Au quatrième jour, il reste cinquante-trois hommes à bord. De nouvelles rixes éclatent au sujet d’un sac d’or. On se massacre encore. Tout le monde est extrêmement faible et malade, et il ne reste que du vin pour s’abreuver.
Alors que tout espoir semble avoir quitté les passagers, au bout de treize jours, un des navires partis pour le Sénégal apparaît. C’est d’ailleurs cette scène que représente le tableau de Théodore Géricault en 1818. L’arrivée de l’Argus tire enfin les quinze survivants de l’enfer.
Sources :
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