Il y a 75 ans, dans la nuit du 10 au 11 juillet 1947, l’Exodus prenait le départ. Un bateau avec à son bord 4 554 juifs rescapés des camps nazis, direction la Palestine. Ce qui suivra marquera le monde à l’époque et aboutira à la création d’Israël en 1948.
Le President Warfield devient l’Exodus
Avant de devenir Exodus 1947, le bateau avait comme nom d’origine President Warfield. Le bateau en question est un bateau côtier sous pavillon américain. Pendant plus de 10 ans, il navigue dans la baie de Chesapeake, entre Baltimore et Norfolk.
En 1944, il est déployé lors du débarquement en Normandie. Après son utilisation à des fins militaires, il retourne dans les eaux américaines. Dans un mauvais état, le bateau se revend pour pas grand-chose. La Haganah, une organisation militaire juive clandestine de Palestine, le rachète en effet pour à peine plus de 8 000 dollars.
Quelques membres de l’organisation arrivent à mettre le President Warfield à quai en France. Le but ? Transporter des juifs qui cherchent à immigrer illégalement en Palestine. Des charpentiers sont alors appelés afin d’aménager le bateau. Le rafiot, dans un état très moyen, ne peut accueillir à son bord que 700 personnes. On aménage donc des couchettes et, finalement, 4 554 personnes embarquent dans le bâtiment de croisière.
« Je ne suis qu’un simple participant involontaire. À l’époque, on nous avait juste demandé de travailler au plus simple et au plus rapide, sans nous donner de noms ni de but. Ce n’est que plus tard que nous avons compris. » – André Aversa, charpentier marin qui a participé à l’aménagement du bateau.
L’Exodus au départ de Sète
Dans la nuit du 10 au 11 juillet 1947, le President Warfield quitte le port de Sète. Quelques jours après son départ, le bateau arborant un drapeau avec l’étoile de David sera rebaptisé Exodus 1947, référence à l’exode de Moïse. Le 10 juillet, les Sétois s’intéressaient plus à autre chose : le passage du Tour de France dans la ville. Ils n’étaient alors même pas étonnés de voir des milliers de personnes arriver sur le port, en habits d’hiver.
« Cet événement était clandestin, c’était la Haganah (NDLR : organisation militaire sioniste clandestine) qui était à la manœuvre, très peu de gens parmi la population sétoise étaient informés. », – Gustave Brugidou, président de la Société d’études historiques et scientifiques de Sète et sa région pour La Croix
Des milliers de juifs, originaires d’Europe centrale et souhaitant partir en Palestine, arrivent dans le plus grand secret vers le sud de la France. Ce ne sont pas moins de 172 camions qui firent le voyage. La plupart trouvent une place à bord d’un rafiot prévu à la base pour 700 personnes, inadapté à la navigation en mer.
« Les conditions étaient terribles, nous n’avions pas de couchettes, nous étions sur le sol. » – Un rescapé de l’Exodus
Malgré les conditions de vie très moyennes sur l’embarcation, aucune animosité ne se fait ressentir. Aucune dispute n’éclate. Alors qu’officiellement le bateau doit se rendre en Colombie, il se dirige vers la Palestine. Le but ? Briser le blocus britannique qui empêche l’immigration des juifs sur le territoire palestinien. Là-bas, les sionistes veulent la création d’un État juif.
Londres interdit le territoire aux passagers
Ils sont à quelques kilomètres de la côte et, le 17 juillet à 22 heures, un message est transmis aux passagers. « Ici la voix de la Résistance juive à bord de l’Exodus 47 en route vers la Terre promise. Sur ce navire de la Haganah, il y a 1 600 hommes, 1 282 femmes, 1 017 jeunes gens et 655 enfants. La flotte britannique a repéré le bateau : nous sommes encerclés par six bâtiments de guerre, à cent kilomètres des côtes du pays. (…) Rien n’empêchera le courant de l’immigration de grossir. Rien n’empêchera ces Juifs sans patrie de monter en Israël. »
Londres interdit le territoire aux juifs à bord du bateau. Le 18 juillet, le bateau est arraisonné. Les Anglais procèdent à un contrôle afin de vérifier la destination, la cargaison, l’état sanitaire de l’équipage et des passagers. Dans le conflit, 3 personnes mourront : deux passagers et un membre de l’équipage.
Un événement qui amènera à la création de l’État d’Israël
Les 4 554 personnes se font alors évacuer jusqu’à Port-de-Bouc (Bouches-du-Rhône) dans des bateaux cages. Là-bas, les passagers refusent de débarquer. Mais les autorités françaises ne souhaitent pas utiliser la force pour les faire sortir. Les Britanniques, quant à eux, craignent des réactions négatives de l’opinion publique. Ces derniers attendent que les passagers sortent de leur propre chef. Alors, les juifs entament une grève de la faim. À ce moment-là, les Anglais se trouvèrent obligés de les renvoyer à Hambourg, une zone en Allemagne occupée par les Anglais.
Les passagers de l’Exodus sont parqués dans des camps les 8 et 9 septembre 1947. Les habitants du monde apprennent cela et une forte émotion se fait ressentir. L’épisode aura une influence sur le vote de l’ONU, quelque temps plus tard. Le vote aboutira en faveur du partage de la Palestine en novembre 1947. La création d’Israël date du 14 mai 1948.
« L’opération Exodus stricto sensu paraît un échec, mais le cataclysme ressenti a conduit à la création un an plus tard de l’Etat d’Israël, les conséquences géopolitiques ont été majeures. » – Guy Kalfa, co-président du comité Exodus pour L’Express
La nuit du 10 au 11 juillet 1947 est l’une des dates importantes de l’Histoire récente, qui n’est pourtant que très peu abordée. Depuis la création d’Israël en 1948 en Palestine, les deux nations sont en perpétuel conflit.
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