L’Histoire a connu son lot d’écologistes et d’amoureux de la nature. Aristote, Théophraste, Colbert… Que de grands noms. Mais connaissez-vous René Dumont ? Ce nom ne vous dit peut-être pas grand-chose, pourtant, il s’agit du premier candidat à l’élection présidentielle sous l’étiquette écologiste. Voici son portrait, ainsi que ses actions et pensées.
Un amour de la nature, qui lui vient de ses origines paysannes
René Dumont naît le 13 mars 1904, à Cambrai. Son père est un ingénieur agricole et sa mère est agrégée de mathématiques.
Enfant, René Dumont se familiarise avec le monde agricole. Cette familiarisation est née de la volonté de son père, qui souhaite voir son fils suivre ses pas. Et ça fonctionne. René passe avec succès le concours de l’Institut national agronomique. Il devient ensuite ingénieur agronome et se spécialise dans l’agronomie tropicale.
Il décide de partir pour le Vietnam en 1929. Là-bas, il découvre le modèle agricole colonial. Les techniques agraires locales sont méprisées pour laisser place aux engrais et à la modernisation occidentale. René Dupont n’adhère absolument pas à ces méthodes et décide de rentrer en France en 1932.
Une notoriété internationale favorable à l’expansion de ses idées
René Dumont s’oriente ensuite dans les études universitaires. Il devient professeur à l’Institut national agronomique, mais également enseignant à l’ENA (École Nationale d’Administration).
Devenu enseignant-chercheur, René Dumont parvient à se faire de nombreux contacts, du fait qu’il participe à de nombreuses conférences. Sa vision de l’agronomie plaît à de nombreux chefs d’État, dont un plus particulièrement : Fidel Castro. Mais les pensées de Dumont quant à la politique socialiste, qu’il juge responsable des failles économiques et agricoles dans les pays de l’Est, ainsi que son interrogation sur la politique de Cuba, rompent définitivement les relations entre les deux hommes.
La notoriété qu’il a acquise au cours de sa vie lui permet d’accéder à des postes importants. Par exemple, Jean Monnet, celui qu’on considère comme l’un des « pères fondateurs » de l’Europe, l’engage en 1937. Quelques années après, René Dumont intègre le CGP (Commissariat Général du Plan) en tant que conseiller. Il participe activement à la mise en place du plan Monnet.
Grâce à la reconnaissance envers son travail, René Dumont peut aller encore plus loin. Il publie alors Le Problème agricole français. Esquisse d’un plan d’orientation et d’équipement (1946), un livre dans lequel il défend ses théories sur une agriculture productiviste. Il affirme son intéressement et son attachement pour ceux qui ont trop souffert de la famine.
René Dumont dérange le monde de la politique
Il n’a jamais supporté le colonialisme, ni la notion de dépendance d’un être humain envers un autre. Cela s’est vu au Vietnam, et cela s’est encore vu avec l’Afrique.
En plein processus de décolonisation, l’Afrique est victime de la volonté des Occidentaux à garder leur mainmise sur le territoire. Une emprise économique se met alors en place et des chefs corrompus sont nommés pour diriger les opérations occidentales. René Dumont n’accepte pas la situation et le fait savoir. Mais le Premier ministre Michel Debré décide de l’évincer. Dumont, qui était au sein du Comité directeur du Fonds d’aide et de coopération (FAC), quitte ses fonctions en 1961 et publie l’ouvrage L’Afrique noire est mal partie (1962), dans lequel il dénonce la politique occidentale entreprise envers l’Afrique.
René Dumont n’a pas dit son dernier mot. Puisqu’il ne fait plus partie du monde politique, il décide tout de même d’y replonger. Il publie L’utopie ou la mort en 1973, un livre qui a pour effet de fonder le parti écologiste. Dans ce livre, René Dumont lance une mise en garde à l’humanité. Si rien ne change, si la production industrielle continue de manière démentielle, les richesses naturelles seront appauvries et la civilisation chutera d’elle-même.
Il se présente aux élections présidentielles de 1974. Et pour ce qui est d’attirer l’attention des électeurs, René sait s’y prendre. Il déclame des petites phrases qui changent des discours traditionnels, comme celle prononcée lors de son déplacement en Bretagne :
« La voiture ça pue, ça pollue et ça rend con. »
Ou encore son intervention à la télé, qu’il conclue en buvant un verre d’eau, qu’il présente comme une eau précieuse.
Malgré ses efforts, René Dumont atteint un triste score pour le premier tour des élections, estimé à 1,3% de votes. Il meurt le 18 juin 2001. Néanmoins, son implication pour l’écologie a poussé les gens à se pencher un peu plus sur la question. Un enjeu qui, à présent, a sa place dans le schéma politique et dans les interrogations sur l’avenir. Merci René.