En juin dernier, l’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté un nouveau projet de loi relatif à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement (ou loi PATR). Et son article 19 fait trembler les archivistes et les historiens car il met en péril leur capacité à documenter l’histoire. Chez Cultea on a souhaité vous expliquer cet article.
De nouvelles catégories d’archives modifient les délais d’accès
Jusque là, on pouvait accéder aux archives publiques au bout d’un certain temps. Ainsi, les documents relatifs à des décisions gouvernementales étaient rendus publics après 25 ans, ceux liés aux relations extérieures étaient soumis au même délai, et les documents pouvant risquer le secret de la défense nationale et les intérêts fondamentaux de l’Etat étaient rendus accessibles après 50 ans.
Cependant, l’article 19 du projet de loi PATR souhaite encadrer l’accès aux archives publiques, notamment les délais de communication de ces archives. Pour ce faire, il choisit d’élargir le champ des exceptions qui empêchent l’accès à certains documents. Ici, il s’agit des archives classées secret-défense et de celles qui concernent les infrastructures militaires, l’utilisation de matériel de guerre, certaines opérations et les capacités techniques des services de renseignement.
Ainsi, l’article instaure de nouvelles catégories de documents pour lesquelles il est impossible de fixer par avance un délai au bout duquel ils deviennent consultables. L’article rend alors impossible la consultation de certains documents, même après la période de 50 ans. En somme, il va à l’encontre du droit d’accès aux archives, soit le droit d’accéder à la vérité.
L’article 19 empêche le travail des historiens et archivistes
Le texte établit que les documents sensibles peuvent être consultables une fois qu’ils ont perdu leur « valeur opérationnelle ». Mais ce terme est flou et peut s’interpréter différemment selon chacun. Partant de cela, certaines archives pourraient être interdites indéfiniment.
Essentiellement, ce nouvel article de loi rend la consultation des archives bien moins libre qu’avant. Le texte mettrait donc en péril la liberté, la recherche et le travail des historiens qui documentent le passé. En effet, on ne peut pas écrire l’histoire sans avoir accès aux archives des militaires et des renseignements.
C’est pourquoi la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme s’oppose vivement à cet article. Elle a d’ailleurs déclaré que ce dernier « menace directement la recherche sur notre histoire contemporaine ».
Globalement, il semblerait que l’Assemblée Nationale et le Sénat soient prêts à rendre inaccessibles certains pans de notre passé. Et ce notamment concernant certaines décisions du gouvernement et de l’armée.