Pendant trente ans, le faussaire philanthrope Adolfo Kaminsky fabriqua de faux papiers dans le but d’aider les autres à échapper à des régimes dictatoriaux.
Il y a quelques semaines, Cultea vous parlait de Han Van Meegeren. Un peintre faussaire qui a réussi à berner les plus grands avec notamment sa reproduction des Disciples d’Emmaüs de Vermeer.
Cette fois-ci, c’est d’un autre faussaire dont il est question. Tout débute durant la Seconde Guerre Mondiale. Adolfo Kaminsky fait alors partie des résistants. Et il l’est d’une façon qui lui est bien propre… D’ailleurs, celui qui s’était officiellement reconverti comme photographe après la guerre n’avait en réalité jamais raccroché le tablier de résistant. Ainsi, jusqu’en 1971, il continua à fabriquer de faux papiers.
Aider les autres
Sous le régime de Vichy, Adolfo Kaminsky vient en aide à de nombreux juifs en les aidant à échapper au régime autoritaire en place. Mais lorsqu’en 1945 la guerre prend fin, il continue son activité clandestine.
Que ce soit durant la guerre d’Algérie, pendant l’apartheid en Afrique du Sud, au Chili sous la dictature du Pinochet ou encore en Argentine et au Salvador, une seule chose l’importe : venir en aide à ceux qui en ont besoin. Sa fille Sarah disait d’ailleurs de lui qu’il :
« ne peut pas supporter que la vie d’un homme ou d’une femme soit mise en danger »
Vivre dans la clandestinité
L’histoire est belle, mais l’envers du décor comporte des zones d’ombre. Fabriquer de faux papiers, c’est aussi vivre dans la clandestinité. La supercherie fut ainsi dévoilée et « le faussaire de Paris » devint un homme recherché par la police. Un jour, alors qu’il prenait le train, un policier l’interpelle.
Il a avec lui un sac que le policier lui demande d’ouvrir. Avec ses airs juvéniles, il réussit à le convaincre que rien d’autre ne s’y cache à part son déjeuner. En réalité, il transportait cinquante fausses cartes d’identité et tout son matériel. Cette vie de faussaire lui impose, en plus de la clandestinité permanente, un rythme de vie effréné.
Pris d’une conscience immense et voulant à tout prix aider le plus grand nombre de personnes possible, il travaille d’arrache-pied pour produire toujours plus de précieux sésames permettant de traverser les frontières et d’entrevoir la liberté.
Adolfo Kaminsky : une vie digne d’un roman
Cette histoire vous paraît incroyable ? Elle l’est, mais elle est pourtant bien vraie ! Conscient d’avoir eu une vie surréaliste, Adolfo Kaminsky n’hésita pas à la partager. En 2018, Sarah Kaminsky raconta ainsi la vie de son père dans un livre intitulé Adolfo Kaminsky, une vie de faussaire. Son engagement, les risques qu’il a pris, tout ça sous la plume aimante de sa fille.
En 2016, le New York Times lui consacre un reportage. Dans un mélange d’interviews et d’images qui empruntent au style du film d’animation, il retrace lui-même son histoire. On le regarde comme on regarderait un film que l’on croirait fictif…
Un récit incroyable qui redonne foi en l’humain. Un récit qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler les actions extraordinaires de Sir Nicholas Winton, surnommé le « Schindler Britannique ». Ce héros s’en est allé le 9 janvier 2023, laissant derrière lui tout une vie d’engagements forts…
Sources :