« Sale Temps à l’Hôtel El Royale » de Drew Goddard : Quand Hitchcock rencontre les frères Cohen [critique]

Robin Uzan
Robin Uzan
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Voilà un thriller comme on en voit (trop) rarement. Après l’excellent Bohemian Rhapsody, la 20th Century Fox nous présente sa nouvelle production : Sale Temps à l’Hôtel El Royale (Bad Times at the El Royale). A mi-chemin entre le cynisme des frères Cohen et le suspense hitchcockien, Sale Temps à l’Hôtel El Royale est un petit bijou porté par un casting poids lourd et une réalisation léchée. Focus ! 

Un scénario simple pour une réalisation impeccable 

Un chassé croisé dans un hôtel qui aboutit à un immense bazar ? Voilà un postulat de départ fort basique qui s’avère pourtant très efficace.  Le film prends le parti audacieux de se découper en actes, mis en valeur par les différentes chambres. Chaque péripétie est ainsi  très bien calibrée et tout s’enchaîne avec fluidité. Les cinéphages les plus aguerris sauront distinguer quelques retournements avec un coup d’avance, mais cela n’enlèvera en rien le plaisir de suivre ces personnages hauts en couleurs. On notera cependant certaines longueurs ça-et-là, mais toujours rattrapées par un événement suffisamment marquant pour récupérer notre attention. Difficile d’en raconter plus sur l’histoire, dans la mesure où Sale Temps à l’Hôtel El Royale fait partie de ces films dont il vaut mieux ne rien savoir avant d’entrer dans la salle.

Là où le film excelle, c’est surtout dans sa réalisation. Tout y est nickel du début à la fin. Une photographie aux petits oignons, des plans séquences incroyables, des musiques choisies avec soin, un travail sur les silences très minutieux… Le film est tellement maîtrisé qu’il en devient déroutant. Cette mise en scène parvenant à rester aussi juste du début à la fin en laissera plus d’un pantois, notamment chez les amateurs d’images esthétisées. Sale Temps à l’Hôtel El Royale fait partie de ces œuvres dont la réalisation rattrape absolument tout, y compris quand le scénario pêche par simplicité. Une vrai régal pour la rétine. Drew Goddard (surtout connu pour avoir réalisé quelques épisodes de The Good Place ainsi que La Cabane dans les bois) s’avère très efficace et particulièrement doué à l’image. De quoi donner envie de suivre ce réalisateur et ses prochaines œuvres.

Un casting poids lourd accompagné de nouveaux talents 

Sale Temps à l’Hôtel El Royale réussit le tour de force de réunir des cadors de l’acting et des novices du milieu, ce qui nous offre un cocktail savoureux de comédien(ne)s. Parmi les cadors, on retrouve évidemment Jeff Bridges, interprétant un homme d’église aussi mystérieux que touchant. Bridges nous offre une performance particulièrement émouvante, qui pourrait bien lui valoir quelques récompenses dans les mois à venir. A ses côtés, on retrouve Jon Hamm, star de la série Mad Men, dans le rôle d’un vendeur d’aspirateurs exubérant qui cache cependant bien son jeu. Le charisme d’Hamm parle de lui-même et l’acteur n’a au final pas besoin de se forcer niveau jeu tant il crève l’écran. Dakota Johnson, connue notamment pour la saga Cinquante Nuances de Grey (ouch !), s’extirpe de son rôle de femme soumise pour prendre les traits d’une grande sœur forte et badass, prête à tout pour protéger sa famille. Cela change radicalement (en bien) la vision que l’on pourrait avoir d’elle. Enfin, on a le droit à un Chris Hemsworth qui a rangé son marteau de Thor pour se transformer en gourou impitoyable, sadique et manipulateur. Un vrai plaisir de découvrir le super-héros que l’on aime tous en sociopathe aussi dangereux.

Au-delà de ces poids lourds, on a le plaisir de découvrir un petit nouveau et deux petites nouvelles particulièrement prometteurs. Cynthia Erivo nous offre des performances de comédie et de chant tout à fait délectables et crée avec Jeff Bridges un duo touchant et atypique. Le jeune Lewis Pullman nous interprète ce concierge torturé et repentant à la perfection. Celui-ci est d’ailleurs incroyable de versatilité, puisque le jeune homme faible et craintif que nous suivons tout le film s’avère être en fait un personnage particulièrement badass. Enfin, la jeune Cailee Spaeny est elle aussi impeccable dans son rôle d’adolescente gouroutisée. Malheureusement, malgré son talent indéniable, celle-ci n’a pas vraiment l’occasion de briller, tant les autres rôles prennent de la place dans l’intrigue. Quoiqu’il en soit, nous sommes dans ce film en présence de jeunes talents plein de potentiels, que l’on espère revoir très vite sur grand écran.

Sale Temps à l’Hôtel El Royale est un thriller de très haut calibre comme on aimerait en voir plus souvent. Aidé par un casting au top et une réalisation léchée, ce film au scénario simple est un argument de choix pour les Oscars 2019. Entre ça et Bohemian Rhapsody, la Fox risque fort de peser lourd sur la future compétition. Affaire à suivre. En attendant, filez vite découvrir Sale Temps à l’Hôtel El Royale dans les salles obscures ! 

Bande-annonce : Sale Temps à l’Hôtel El Royale 

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Journaliste, photographe et réalisateur indépendant, écrire et gérer Cultea est un immense plaisir et une de mes plus grandes fiertés.
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