« Oddworld : Soulstorm », aussi méchant qu’un Glukkon ? [TEST]

Emeric Gallego
Emeric Gallego
8 Min Read

Pour Lorne Lanning, il était impératif de faire revenir Abe dans le cœur des joueurs. Oddworld est une licence qui, malgré le remake kickstarter New’n’tasty, semblait condamnée à disparaître. Dans un univers envahi par l’industrialisation et le modernisme, il était important que le sauveur des Mudokons parvienne à prouver sa valeur. Résultat ? Oddworld Soulstorm est presque une réussite. Abe n’est pas encore prêt pour le progrès

Le grand retour de l’Exode !

Quiconque a déjà joué aux premières aventures Oddworld sur Playstation connait l’histoire d’Abe et de l’entreprise Rupture Farms. Pour rappel, Abe est un esclave qui comprend que son peuple et les 300 autres esclaves allaient servir de nourriture en conserve jusqu’à l’extinction. Il libère alors les Mudokons, et se voit ainsi choisi pour devenir leur sauveur. C’est précisément à cet instant qu’Oddworld Soulstorm commence. Précisons une importante différence entre l’histoire originale et cette relecture. Cette dernière se veut plus épique, plus spectaculaire et plus humaine.

On est toujours dans cette fable politique, satirique et écologique mais avec une histoire bien plus profonde. Abe n’est plus seulement ce petit alien naïf qui ne pète plus. Il est devenu une véritable figure de l’héroïsme auquel on s’attache énormément. Cela pourrait ressembler à une trahison par rapport aux matériaux d’origine. Fort heureusement, il n’en sera rien (bien que cette épisode se révèle bien moins glauque et malsain que certains passages de l’original). On se sent véritablement concernés par sa quête et on est prêts à tout pour obtenir la meilleure fin possible. Certes, entre nous, nous avons terminé le jeu avec une fin tellement tragique qu’elle prouve que tout ce jeu est devenu un Oddworld unique et non un simple remake de l’Exode d’Abe (1998).

Les cinématiques sont somptueuses. Et notre émerveillement rien qu’à la séquence d’introduction nous fait absolument penser à un film d’animation en images de synthèse. Les expressions faciales aident énormément à l’immersion et renforcent l’aspect tantôt dramatique, tantôt humoristique. On en vient juste à regretter l’absence d’une version française, d’autant plus que l’ancienne voix d’Abe était parfaite ! Revoyons ci-dessous la mythique scène d’introduction de l’Odyssée d’Abe (1997) :

Une aventure un poil compliquée !

Oddworld Soulstorm est toujours un jeu entre la 2D et la 3D. Il s’agit d’un jeu de plateforme comme on en voit très peu aujourd’hui. Il faut courir, s’infiltrer, protéger les Mudokons et éviter les pièges face aux ennemis extrêmement nombreux et armés jusqu’aux dents. Jamais vous ne devrez relâcher votre vigilance, sinon la mort sera assurée. De toute manière, malgré la présence de points de contrôle, la difficulté du jeu vous conduira à mourir plusieurs fois. Le niveau de difficulté est d’ailleurs extrêmement mal dosé. Par exemple, le jeu peut à certains moments frustrer par sa difficulté, et soudainement devenir extrêmement facile. Autant vous dire qu’il faudra privilégier l’infiltration pour se tirer de bien mauvais pas.

Les nombreux bugs au sein du gameplay n’arrangeront vraiment pas les choses. L’intelligence artificielle des ennemis peut faire n’importe quoi, comme vous repérer alors que vous êtes presque invisible et loin. Mais c’est surtout celle des alliés qui pose véritablement problème. Certes, les Mudokons peuvent réagir de manière très efficace et exécuter les ordres d’Abe via le fabuleux système Gamespeak. Toutefois ils peuvent aussi paraitre absolument stupides. Et cela finit par être extrêmement rageant lorsque le cheminement devient difficile. Dans certaines situations, malgré les ordres que vous leur donnerez, les Mudokons auront tendance à faire n’importe quoi. Ils peuvent aussi n’écouter qu’après un long délai. Quand la situation se gâte, le jeu n’est plus franchement plaisant, ce que l’on déplore. Cela contrevient assurément à l’envie de persévérer et de faire notre possible pour atteindre le bout de l’aventure. Savoir que l’on perd le contrôle de la situation peut vite devenir une très grande frustration. Surtout que Soulstorm joue beaucoup trop sur l’action et qu’il ne faut jamais relâcher sa vigilance. 

"Oddworld : Soulstorm", aussi méchant qu'un Glukkon ? [TEST] - Cultea
Oddworld : Soulstorm, aussi méchant qu’un Glukkon ? [TEST] – Cultea

Du vieux avec du neuf dedans !

Heureusement, le gameplay s’est permis de se moderniser. Il propose en outre des nouveautés qui font sacrément plaisir, à l’instar du double saut, d’un inventaire et un moyen de confection artisanale. Dans Soulstorm, il sera désormais possible de fouiller les poubelles et les placards afin de trouver des éléments nécessaires à la progression. Ces éléments peuvent être, notamment, des bouteilles d’eau ou des bouteilles de bières. Vous trouverez aussi de quoi faire appel à vos talents d’inventeur afin de créer des mines, des antidotes ou encore des écrans de fumée. Tout est bon pour se frayer un chemin parmi les Glukkons, même si ce craft de matériel finit par être indispensable pour pouvoir s’en sortir. L’équipement peut même être donné à nos équipiers qui pourront l’utiliser dans l’ordre adéquat (encore une fois, attention aux bugs !). Cependant, On aurait aimé plus de réflexions, ainsi qu’un bestiaire plus varié. En effet, car les Paramites et les Scrabs, créatures connues de l’univers d’Oddworld ont tout simplement disparu du jeu !

Au niveau de la technique, le jeu écrase ce que proposait le remake New’N’Tasty malgré quelques faiblesses !  On note ainsi une excellente durée de vie (une douzaine d’heures et pleins de secrets à découvrir). Le jeu comprend également quatre fins différentes en fonction de vos performances, et une rejouabilité plutôt bonne si elle n’était pas autant ternie par ses bugs constants, cette difficulté exagérée et cette répétitivité qui s’installe doucement. Deux mots reviendront très souvent lors de cette aventure : frustrant et décourageant !

Oddworld Soulstorm pourrait diviser les fans à cause de tous ses changements par rapport au jeu original, mais il n’en sera rien. Cependant, beaucoup de choses sont à revoir afin de proposer une vraie aventure tant elle est frustrante, et pas pour les bonnes raisons. On espère sincèrement qu’en attendant la sortie dématérialisée, les développeurs réagiront aux erreurs de ce Soulstorm. Un jeu à la cruauté similaire aux Glukkons.  

Bande-annonce d’Oddworld Soulstorm (2021) :

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Photographe et réalisateur indépendant. Certains de ses films ont obtenus une soixantaine de sélections en Festival à travers le monde. Rédacteur chez Cultea, ses écrits sur le Traumatisme abordé dans le jeu vidéo sont publiés sur le site !
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