Le site archéologique de Göbekli Tepe, vieux de 12 000 ans, n’a pas fini de fasciner les scientifiques. En effet, situé dans la province de Şanlıurfa au sud-est de la Turquie et connu comme l’un des plus anciens exemples d’architecture monumentale, Göbekli Tepe dévoile de nouveaux secrets notamment concernant les observations célestes effectuées par ses anciens habitants. Ainsi, un calendrier très ancien a été découvert courant juillet 2024.
Göbekli Tepe : un joyaux archéologique
Le site est une vraie mine d’or en ce qui concerne la compréhension des premières formes de spiritualité et d’organisation sociale humaine. Les énormes colonnes en forme de T et les sculptures complexes qui ornent les structures arrondies du lieu témoignent d’une civilisation néolithique très avancée et sophistiquée.
Après quelques années de travail, les recherches menées par des archéologues de l’Université d’Édimbourg nous dévoilent une interprétation des gravures faites sur les piliers de pierre de Göbekli Tepe. Ces découvertes publiées dans le journal Time and Mind le 24 juillet dernier, donnent, à ses gravures longtemps restées mystérieuses, la fonction de calendrier solaire préhistorique qui aurait été conçu comme « mémorial à une collision dévastatrice avec une comète ».
La zone archéologique de Göbekli Tepe comporte plusieurs compartiments circulaires ou ovales, souvent interprétés comme des temples ou des lieux de culte. Ils sont composés de colonnes qui sont ornées de motifs détaillés, comprenant des représentations d’animaux, de figures humaines et de motifs géométriques.
Toutefois, c’est le « Pilier 43 » qui a en particulier attiré l’attention des spécialistes. En effet, d’après l’étude, ce pilier est gravé de symboles en forme de V qui pourraient représenter des jours. En comptant ces symboles, les scientifiques ont déchiffré ce qui semble être un calendrier solaire de 365 jours, divisé en douze mois lunaires, avec l’ajout de onze jours supplémentaires pour s’aligner sur l’année solaire.
Le solstice d’été semble d’ailleurs avoir une importance particulière puisqu’il est figuré de façon distinctive sous la forme d’une créature ressemblant à un oiseau portant un collier en forme du fameux V. D’autres statues qui ont été retrouvées à proximité portent elles aussi des marquages similaires, ce qui peut donc signifier qu’elles représentent probablement des divinités.
« Étant donné que les cycles de la Lune et du Soleil sont tous deux figurés, les gravures pourraient représenter le plus ancien calendrier luni-solaire connu au monde, basé sur les phases de la Lune et la position du Soleil – et antérieur de plusieurs millénaires aux autres calendriers connus de ce type. »
Etude publiée dans le journal Time and Mind.
Ainsi, si l’interprétation donnée par les chercheurs de l’Université d’Edinbourg se confirme cela ferait de Göbekli Tepe le site ayant le plus vieux calendrier luni-solaire (lunaire et solaire) connu ! En effet, les plus anciens calendriers avaient été retrouvés dans la période mésopotamienne (environ 3000 av J-C) ou aztèques (Tonalpohualli et Xiuhpohualli).
Nouveau calendrier, nouvelle religion ?
Selon l’étude publiée, les gravures auraient dépeint un événement astronomique majeur : la chute d’un fragment de comète tombé sur Terre il y a 13 000 ans. L’impact aurait marqué le début de la période de refroidissement climatique brusque connue sous le nom de Dryas récent. L’événement serait survenu juste avant la fin de la dernière période glacière et serait responsable de la disparition de plusieurs espèces d’animaux géants. Ce changement de température aurait aussi forcé les populations humaines à s’adapter développant alors de nouvelles méthodes d’agricultures plus complexes et marquant par la même occasion le début de la sédentarité.
Il est donc logique après un évènement impactant autant la vie des habitants de Göbekli Tepe, que ceux-ci se mettent à observer attentivement le ciel, à retranscrire et rapporter les événements passés. La création du calendrier serait donc une tentative de suivre les cycles afin de prévenir d’autres événements majeurs. Cette interprétation est d’ailleurs renforcée par la découverte d’un autre pilier sur le site, qui semble représenter le flux des Taurides, une pluie de météores résultant de la désintégration de la comète.
« Cet événement pourrait avoir déclenché la civilisation en initiant une nouvelle religion et en motivant des développements dans l’agriculture pour faire face au climat froid » […] « Il est possible que leurs tentatives de consigner ce qu’ils ont vu soient les premiers pas vers le développement de l’écriture des millénaires plus tard. »
L’étude suggère aussi qu’ils étaient capables d’appréhender la précession, un phénomène astronomique complexe lié au balancement de l’axe de la Terre et qui affecte le mouvement des constellations. Et cela des milliers d’années avant que le phénomène ne soit documenté par les Grecs en 150 av. J-C. Si ces théories scientifiques s’avèrent être vraies, elles permettraient alors de mieux comprendre nos ancêtres qui semblent avoir des connaissances bien plus sophistiquées que ce qui avait été pensé auparavant. En effet, non seulement ils seraient capables de suivre des cycles célestes complexes, mais aussi de les retranscrire et les transmettre de génération en génération avec précision et sans l’aide du langage écrit.
Sources :