27 est un spectacle du Festival d’Avignon OFF bien complexe. D’une durée exacte de 27 minutes, la pièce plonge son public dans une ambiance nocturne, onirique et expérimentale. Il était ainsi évident pour nous d’allez à la rencontre de sa créatrice : Zoé Lepetitdidier-Carcano.
Synopsis : ….5….10….15….20……27
Se surprendre à observer des gens dans la rue, prendre un temps, les regarder, être attentif.
Tel fut le commencement. J’ai volé les gestes de leur quotidien, je les ai emprunté le temps de 27 minutes intenses et vivantes. Aussi, à chaque minute, à chaque instant, tous ces gestes sont automatiques, comme si l’on dormait finalement. J’ai invité 27 personnes à dormir chez moi, ils ont été filmé, observé. Conjuguer l’inconscient du jour et celui de la nuit via le rêve.
Notre performance rythmée par le son électronique révèle une monstration de leurs songes.
Ces 27 gestes, si différents, sont à vous.
La représentation s’est déroulée le 19 Juillet 2021 à 22h40 au Théâtre La Luna.
Bonjour Zoé. Pouvez-vous me raconter la genèse de votre projet 27 ?
Je me suis intéressée aux gestes du quotidien, au mécanisme de ces gestes, à quel point la même action réalisée peut-être différente selon les personnes. Ces gestes conscients qui en deviennent inconscients, dû à leurs automatismes. De fait, il était important pour moi de confronter ces gestes volés à des personnes inconnues dans la rue à des gestes complètement inconscients. Le sommeil. J’ai donc invité des personnes à dormir chez moi et 27 personnes ont répondu présent et cela a déterminé la durée de la pièce à 27 minutes. Ils ont été filmés deux heures chacun. Et j’en ai gardé seulement 1 min par dormeur.
Pourquoi une performance aussi expérimentale, expliquez-nous chaque détail ? Que raconte donc l’écran pendant la performance ?
27 est une performance plastique, qui pourrait aussi bien être vue dans un théâtre que dans un musée d’art contemporain, comme une installation. C’est sûrement pour cela qu’on pourrait lui attribuer une case de théâtre expérimental, mais c’est surtout un théâtre visuel.
La scénographie monochrome, épurée, a son importance car la construction du projet n’est qu’aller-retour entre fond et forme. Partant du vol des gestes dans la rue, puis dans le sommeil. La relation entre inconscient et conscient qui s’unissent, se séparent, se bousculent. Nous avons au plateau la représentation d’un dormeur qui est finalement la figure de celui qui se retrouve piégé à l’intérieur de son rêve. Ce corps au plateau représente tous les dormeurs dans le film. Le plateau devient donc l’épicentre d’un rêve éveillé. Un rêve se réveille et s’endort pour laisser place au réel ensuite. C’est une boucle sans fin, c’est pour cela qu’une danse de la vie à la mort est surement envisageable pour celui qui est invité à vivre cette expérience.
La présence de la danse, la question du corps, arrivent avec l’envie de faire vivre ces gestes. Comment un geste peut-il progressivement amener à la danse, si celui-ci n’est pas stoppé par sa simple action ? Le rêve dure une journée. Cette temporalité est très importante pour ces gestes qui vont finalement se construire petit à petit, partir des extrémités du corps jusqu’à l’englober complètement. Le comédien qui se retrouve piégé à l’intérieur de son rêve et rêve qu’il se fait voler ces gestes du quotidien.
Puis, je voulais une musique organique, d’où ces sons électroniques. La musique a été composée en fonction de nos mouvements. La musique se construit au fur et à mesure, en osmose avec ce qu’il se passe au plateau. La présence de la couleur blanche, qui d’ailleurs n’est pas une couleur mais une valeur, un infini, a son importance dans la représentation d’un au-delà, ici le rêve. Une lumière froide, le bleu vient adoucir ce songe. Les rouleaux sont la représentation des lits. La bâche, un drap transparent, une invitation à voler ces gestes inconscients, comme cela ce passe dans le film. La peinture blanche, la disparition des corps, la fin du rêve. Nous imaginons donc qu’à la 28e minute, tous les dormeurs se réveilleraient et tout ce qu’il se passe au plateau n’existerait plus.
Pour finir : une musique de fin radicalement différente de celle de 0 à 20 min. Une musique d’Arvo Pärt sur laquelle a été écrite la pièce. Nous avons donc une construction d’une mécanique corporelle de 0 à 20 minutes, qui va finir par se déconstruire de cette 20e minute jusqu’à la fin. Pour finir, cette pièce laisse libre cours à l’imagination de chacun.
Et maintenant ? Qu’espérez-vous pour la suite ?
L’emmener le plus loin possible, je l’espère. Pour l’instant, la prochaine étape est Paris. Nous avons la chance d’être programmés au lavoir moderne parisien en janvier 2022. Il était important pour moi de présenter cette pièce, ma première écriture et mise en scène, au festival d’Avignon pour lui donner une chance professionnellement afin de rendre visible mon identité artistique. À ce jour, une deuxième création est en cours d’écriture. Sine qua non est une compagnie parisienne émergente qui a comme ligne directrice la performance et le théâtre visuel.
Merci beaucoup à vous. À ce propos, pourquoi 27 ?
Pourquoi 27 ? 27 minutes, 27 gestes, 27 dormeurs.
Le Festival d’Avignon nous a donc permis de découvrir cette performance. 27 nous plonge dans un univers onirique à travers sa musique et sa scénographie qui en font une expérience unique à vivre.