Si l’Égypte antique fascine autant, c’est pour son histoire, sa mythologie et ses pharaons. Mais cette période historique fascine aussi pour ses légendes, comme celle de la malédiction de Toutânkhamon. Mais une autre légende, peu connue, fait aussi le charme de l’Égypte ancienne. Elle concerne un roi, qui suscite aujourd’hui de nombreux débats quant à sa réelle existence. Il s’agit du roi Scorpion.
Une tombe creusée lors d’une dynastie antérieure à la première
Si la majorité des experts et des archéologues s’accorde sur le fait que la civilisation égyptienne démarre environ 3 150 ans avant J-C, le doute est permis depuis la découverte d’un sarcophage.
En effet, la tombe découverte en 1988 à Abydos par Günter Dreyer, un archéologue allemand, laisse planer le doute. Cette tombe est accompagnée d’une écriture particulière qui utilise un système mêlant les signes phonétiques et symboliques.
Les archéologues s’accordent pour dire que cette découverte permet de retracer l’histoire des hiéroglyphes. Quoi qu’il en soit, de par cette découverte, on affirme qu’une dynastie existait bel et bien avant la première dynastie de l’époque thinite, la période qui marque le commencement de l’Égypte antique. Les archéologues décident d’appeler cette dynastie antérieure la « dynastie zéro ».
Le scorpion : un symbole pour représenter le défunt ou le contenu d’une poterie ?
Là est la grande question que s’est posée Günter Dreyer et que les archéologues d’aujourd’hui se posent encore.
Lors de la découverte de la tombe, aucun cadavre ne fut découvert. En revanche, Günter mit la main sur de nombreuses poteries. Sur ces dernières est représenté un scorpion, accompagné d’une plante. Günter, face à ces découvertes, explique :
« On a découvert tout d’abord des centaines de poteries provenant de Canaan (Palestine), ce qui témoigne d’échanges commerciaux florissants. Mais, surtout, il y avait des poteries de fabrication locale portant des dessins à l’encre noire. »
Mais une autre découverte va faire pencher la balance : celle d’un fragment de sceptre Heka. Ce sceptre symbolise la royauté ; seuls les pharaons pouvaient en avoir un. Dreyer en a alors conclu qu’il s’agissait du nom d’un roi accolé au symbole d’un domaine agricole. C’est à ce moment précis qu’il nomma la tombe comme étant celle du roi Scorpion.
Les archéologues du XXIe siècle ne sont pas en accord avec les dires de Dreyer. Par exemple, pour Damien Agut et Juan Carlos Moreno-García, il est possible que le scorpion ne représente que le défunt :
« L’une de ces jarres de terre cuite porte, tracé à l’encre, un scorpion. Est-ce une manière de désigner le propriétaire de la tombe ? Ou, au contraire, cela renvoie-t-il au domaine où le produit que contenait cette jarre avait été élaboré ? »
Roi scorpion : un titre honorifique ?
Il est intéressant de noter que, tout au long de l’article, nous avons mentionné uniquement le « roi Scorpion », comme s’il n’en avait existé qu’un seul et unique. Mais, en réalité, un autre roi Scorpion aurait existé : il s’agit de Scorpion II.
Scorpion Ier serait le roi qui reposait dans la tombe que Günter a découverte en 1988. Scorpion II serait le roi qui est représenté sur une preuve picturale unique. On y voit un roi, tenant une massue. Ce dernier est accompagné d’un scorpion.
Une différence existe entre ces deux souverains : leurs noms. Scorpion Ier est nommé Selk, tandis que Scorpion II est nommé Serk ou Ouha. Nicolas Grimal, éminent archéologue, appuie le fait que « roi Scorpion » est en réalité une nomination utilisée pour deux souverains :
« En réalité, il faut peut-être voir dans ce nom de Scorpion deux rois différents. »
Qui a uni la Haute-Égypte et la Basse-Égypte ? Une véritable énigme
Il s’agit là d’une affaire des plus complexes. Et c’est compréhensible, car les archéologues ne s’entendent pas sur ce point.
La plupart attribuent les mérites de l’expansion égyptienne et de son unification au roi Narmer, qui n’est autre que la figure majeure de la dynastie zéro. C’est ce roi qui aurait réuni, pour la première fois, la Haute-Égypte et la Basse-Égypte. Ce dernier ne serait autre que le descendant d’un roi Scorpion, mais lequel ? Selk ou Serk ?
Pour d’autres, l’unification de l’Égypte serait l’œuvre du premier roi Scorpion. Ce dernier aurait régné sur l’intégralité de l’Égypte, symbolisant alors son unification. Il aurait aussi soumis, au sud, la Nubie. Au nord, il régnait sur la Palestine, ce qui expliquerait alors les poteries provenant de Canaan auprès de la tombe découverte par Günter.
Mais quelques archéologues avancent le fait que Narmer et le roi Scorpion ne serait en réalité qu’une seule et même personne. C’est ce qu’avance Bernadette Menu, qui met en avant les ressemblances physiques entre Scorpion II et Narmer. Cette théorie remet alors en doute la réelle existence d’un roi Scorpion, ou même plusieurs. On peut notamment voir les similitudes au niveau du visage.
Le Roi Scorpion dans la culture populaire
Bien que la figure du roi Scorpion suscite de nombreux débats historiques et archéologiques, ce dernier a tout de même su se faire une place dans la culture contemporaine, notamment dans le domaine de la cinématographie.
Il est représenté dans le film Le retour de la Momie (2001) comme un fier guerrier qui souhaitait étendre sa puissance, mais qui échoua au bout de sept années de combats. Il fait alors un pacte avec un dieu égyptien pour conquérir les terres qu’il convoitait.
D’ailleurs, le personnage du roi Scorpion a été interprété par Dwayne Johnson. Il s’agit de la première apparition du catcheur, qui deviendra acteur, dans le monde du cinéma.
De ce film naît alors un autre film, qui met encore plus en avant le fameux personnage. Ce film, a pour titre Le Roi Scorpion (2002). Il met en avant l’ascension d’un jeune guerrier, qui finalement deviendra le roi Scorpion, donc Scorpion Ier si on suit la logique historique. Ce film donnera par ailleurs naissance à une série de films.
L’affaire du roi Scorpion est l’une des plus grandes énigmes non résolues encore jusqu’à ce jour. Et cela pour de nombreuses raisons. On ignore encore si un tel roi a existé, mais ce qui est sûr, c’est que ce dernier reste l’une des plus grandes légendes historiques.
Sources :
- Persée – GAUTIER, Patrick, MIDANT-REYNES, Béatrix, »La tête de massue du roi Scorpion » dans Archéo-Nil, 1995
- Libération – Le «roi Scorpion» plus vieux pharaon identifié. Il appartenait à une dynastie antérieure à la première. Et l’écriture était déjà apparue.
- Peplum – Le Roi Scorpion
- Wikipédia – Scorpion Ier
- Wikipédia – Scorpion II
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