Tycho Brahe, alchimiste ? Bien connu pour ses observations astronomiques extrêmement précises, le Danois a aussi été fasciné par l’alchimie. Récemment, des études et analyses chimiques menées dans son laboratoire souterrain ont permis de mieux comprendre certaines de ses pratiques pseudoscientifiques.
Tycho Brahe : astronome et alchimiste
En effet, l’astronome, qui n’a jamais caché son attirance pour cette matière…
» Dès mon plus jeune âge, je me suis assidûment donné à l’étude [de l’art chymique], non moins qu’à celle de l’astronomie, et je l’ai poursuivie avec diligence et en faisant des dépenses considérables. »
Astronomiœ instauratœ mechanica, Wandesburg, 1598
…a conservé précieusement ses secrets et ses connaissances. L’alchimie est une pratique non scientifique et mystérieuse qui, jusqu’à ce jour, n’est pas complètement comprise et élucidée. Néanmoins, une étude qui a récemment été publiée dans la revue Heritage Science (le 25 juillet 2024) semble lever le voile sur quelques mystères, permettant ainsi de mieux comprendre ce qui se passait dans ce laboratoire souterrain mystérieux.
Le laboratoire de l’alchimiste n’avait pourtant pas bien résisté au temps. En effet, désertée avant la fin de la vie de son propriétaire, la bâtisse avait été détruite par les habitants qui réutilisaient les pierres pour construire d’autres édifices. Mais des travaux archéologiques menés entre les années 80 et 90 ont quand même permis de trouver des fragments d’instruments provenant du laboratoire dans les jardins de la bâtisse.
Parmi les trouvailles, cinq d’entre elles ont été analysées chimiquement et des traces d’éléments tels que le nickel, le cuivre, le zinc, l’or, le mercure, le plomb ou encore l’étain et le tungstène ont été trouvées. Leur présence n’a pas forcément de quoi surprendre. Certains étaient même assez attendus, car connus comme utilisés pour traiter des maladies, ce qui est notamment le cas de l’or ou du mercure par exemple.
Le plus étonnant semble être la quantité, bien que la découverte de certains éléments reste importante, comme le tungstène par exemple qui n’avait pas encore été scientifiquement décrit puisque c’est 180 ans plus tard que le scientifique Carl Wilhelm Scheeled le découvre.
» Le plus intrigant, ce sont les éléments trouvés en concentrations plus élevées que prévu [Cela] indique un enrichissement et permet de mieux comprendre les substances utilisées dans le laboratoire alchimique de Tycho Brahe. »
Kaare Lund Rasmussen, professeur émérite et expert en archéométrie du Département de physique, chimie et pharmacie de l’université du Danemark du Sud
Cette analyse nous permet donc de mieux comprendre les recettes de l’alchimiste. En connaissant ainsi les ingrédients et leur quantité approximative, il est plus facile de comprendre ce qui se déroulait dans le laboratoire de Tycho Brahe
Pourquoi un astronome serait-il aussi alchimiste ?
Tycho Brahe appartenait à une branche de l’alchimie qui se différencie par son côté médical et philosophique. Elle introduit ainsi l’idée que les plantes, minéraux et métaux peuvent être utilisés, après transformation chimique, comme médicaments pour soigner des maladies comme la syphilis, la lèpre, la peste, etc.
Ce qui semblait intéresser l’alchimiste Brahe était donc plus cet aspect médical, puisqu’il se tenait à l’écart de l’alchimie cherchant à transformer des métaux en or.
» Il peut sembler étrange que Tycho Brahe soit impliqué à la fois dans l’astronomie et l’alchimie, mais lorsque l’on comprend sa vision du monde, cela a du sens. Il croyait qu’il y avait des connexions évidentes entre les corps célestes, les substances terrestres et les organes du corps. »
Explique Poul Grinder-Hansen du Musée national du Danemark
Ainsi, avec cette vision de l’alchimie, le soleil était lié à l’or et au cœur, et la lune à l’argent et au cerveau.
On pouvait donc retrouver ces éléments chimiques dans les antidotes concoctés. Une analyse des cheveux et des os de l’alchimiste a d’ailleurs montré la présence d’or. Tycho Brahe buvait-il alors lui-même certains de ses médicaments ?
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Sources :
- Chemical analysis of fragments of glass and ceramic ware from Tycho Brahe’s laboratory at Uraniborg on the island of Ven (Sweden)
- Chemical analyses find hidden elements from renaissance astronomer Tycho Brahe’s alchemy laboratory
- Les secrets d’un alchimiste de la Renaissance en partie révélés par des analyses chimiques